Dans ces conditions, comment l'Ukraine pourrait rester à l'écart et ne pas y aller de sa clownerie ? Nous avons vu comment l'affaire a débuté et que Moscou avait peu à y gagner, au contraire de la junte maïdanite au bord du gouffre et paniquée que le gaz russe ne transite plus par l'Ukraine. C'est maintenant l'escalade, verbale et symbolique pour l'instant. Poutine s'est envolé pour la Crimée tandis que Pocochenko évoque, comme d'habitude, une invasion russe. Ca doit être la 97ème depuis deux ans... L'estomac est repu de tant de conflits mais vous reprendrez bien une lichette de Mer de Chine où la guerre des nerfs pour contenir le Heartland / percer le containment (barrez la mention inutile) bat son plein entre l'empire du Milieu et l'empire tout court. La tension est montée tout au long de l'été, Pékin s'exerçant même en vue d'une guerre «courte, soudaine et cruelle» La militarisation des deux mers de Chine, méridionale et orientale (où Tokyo est prêt à déployer des missiles contre Pékin), n'est guère rassurante. Il n'y a décidément pas que le réchauffement climatique qui enfièvre la planète... L'automne sera-t-il plus calme ? Rien n'est moins sûr. Enfin, je vous fais grâce du Yémen - où la coalition wahhabite prend l'eau, les Houthis commençant d'ailleurs à multiplier les incursions et les bombardements en territoire saoudien - et de la Corée du Nord où Kim III redouble ses vraies-fausses menaces... Cela dit, et à peine finis les Jeux Olympiques de Rio, voilà que les puissances grandes et moyennes prennent le relais au Moyen-Orient. Anticipant le reflux de l'Etat Islamique, les grandes manoeuvres ont commencé et la course est lancée. La première étape, celle qui est sous les feux de l'actualité à l'heure où nous parlons, concerne Jarablous, à la frontière syro-turque. Les journaux font leurs gros titres sur la vingtaine de chars turcs entrés en territoire syrien pour accompagner la marche des inénarrables «rebelles modérés» (rappelons que parmi ces «mignons» se trouve le groupe Al Zinki, celui-là même qui avait décapité le gosse de 12 ans il y a quelques semaines). Jarablous a été prise sans combat, les petits hommes en noir de Daech l'ayant en fait quittée il y a assez longtemps pour se regrouper plus au sud autour du noeud d'Al-Bab. Cette offensive était dans les tuyaux depuis quelques temps et, il y a quelques jours, l'artillerie turque avait bombardé les YPG kurdes syriennes tandis que les «rebelles modérés» se préparaient de l'autre côté de la frontière depuis des semaines. Car c'est évidemment pour stopper l'avance kurde et la constitution d'un Kurdistan syrien tout le long de sa frontière sud que le sultan est intervenu. Le prétexte de supprimer le ravitaillement de Daech ne tient pas : les Turcs pouvaient tout à fait fermer la frontière à partir de leur propre territoire. Erdogan ne s'en cache d'ailleurs pas : l'opération vise à la fois Daech et le PYD (parti kurde chapeautant les YPG), c'est-à-dire, quand on passe par la machine à traduire, le PYD tout court. Le ministre turc des Affaires étrangères en rajoute une couche et menace de guerre les YPG si elles ne refranchissent pas l'Euphrate en sens inverse, qui était de tout temps la ligne rouge d'Ankara mais que le sultan ne pouvait pas faire respecter après l'incident du Sukhoï avec les Russes et le soutien américain aux YPG. (A suivre)