On s'y attendait, presque, vous diront certains observateurs à ce que cette rentrée scolaire de septembre 2016 connaisse quelques perturbations en continuité logique avec ce qui s'est passé auparavant avec les fuites des sujets du Bac, le projet de réforme controversé de l'école algérienne, la levée des boucliers par des contestataires du corps enseignant etc. Selon les uns, c'est le projet de réforme qui est ciblé par cette cabale qui ne dit pas son nom, selon d'autres ce démarrage scolaire quelque peu gâché par les erreurs signalées dans des ouvrages parascolaires est à mettre sur le compte de simples défauts techniques dues à la précipitation ou le manque d'attention minutieuse de la part des concepteurs de ces livres décriés. A l'heure qu'il est, les opérations de rectification seraient en cours de finalisation. De quoi est-il question au juste ? Ces erreurs signalées dans des ouvrages parascolaires de géographie, concernent l'une, la mention sur une carte géographique reproduite dans le manuel de géographie de 1ère année moyenne d'Israël à la place de la Palestine. L'autre bourde a trait à une classification des habitants de l'Algérie selon des critères ethniques et erronés en plus. D'après ce qu'a communiqué une source du ministère de l'Education nationale, à propos de l'erreur contenue notamment dans la page 65 du livre parascolaire remplaçant la Palestine par Israël, la responsabilité incomberait au partenaire -imprimeur de l'institution officielle : en l'occurrence l'Entreprise nationale des arts graphiques (ENAG), sous tutelle du Ministère de la Culture, l'infographe de cette instance éditrice ayant eu recours au moment de l'impression, à une carte géographique soutirée d'Internet au lieu de reproduire celle validée par le ministère de l'Education. C'est ce qu'aurait confirmé le directeur général de l'ENAG dans une déclaration à une chaîne privée d'après les échos des médias, alors que de leur côté les représentants des syndicats autonomes et d'autres instances culturelles ont déploré l'absence de concertations entre les commissions chargées des réformes et les représentants des enseignants, des associations des parents d'élèves et organismes relevant du secteur éducatif pour l'élaboration de programmes consensuels. Par ailleurs, les réactions à ces lacunes signalées dans ces manuels et ouvrages parascolaires ont enflammé les réseaux du Net, chacun y allant de son opinion, prenant à partie, responsables du ministère de l'Education et autres instances nationales auxquelles est reprochée cette défaillance jugée inadmissible. La presse nationale a déjà fait large écho de ces erreurs dans les manuels scolaires de cette rentrée scolaire 2016, et parmi cette somme d'informations et commentaires critiques qui continuent d'alimenter des débats chauds à divers niveaux de l'opinion publique, il y a notamment ces interventions et déclarations de gens du secteur éducatif sur ce sujet, comme celles du professeur Mohamed Arezki Ferrad rapportées par B. Mustapha dans l'édition du quotidien arabophone El Khabar du dimanche 18 septembre 2016 dont l'importante teneur de mérite d'être portée à la connaissance du public –lecteur francophone, en voici la traduction de quelques passages : « Se prononçant au sujet des erreurs signalées dans des ouvrages scolaires, le professeur Mohamed Arezki Ferrad a notamment fait savoir que ces bordes ne datent point d'aujourd'hui mais de bien auparavant, à commencer par l'année 1962. Il a ainsi fait observer que le texte du livre parascolaire qui a classifié la communauté des habitants d'Algérie en catégories raciales, prétendant que 80% de la population algérienne est arabe, le reste étant « un mélange de chaouis, Kabyles et Béni M'zab », comporte une erreur à la fois d'ordre culturel et d'ordre éducatif qu'il a qualifiée de « criminelle». M. Ferrad, prévenant, à propos de cette question qu'il situe son approche dans une optique scientifique et pédagogique, a précisé que ces erreurs ont été commises dans ces ouvrages scolaires à l'instar de celles d'auparavant, intervenues dans le contexte tendancieux de ce qu'il a appelé « l'exclusion de la composante Amazighe de la personnalité algérienne ». Erreur que notre interlocuteur a considérée d' « assassine » qui a fait que cette couche exclue oppose à cet extrémisme affiché un autre, cette prédisposition au reniement de l'autre ayant été l'une des causes de l'apparition du mouvement scissionniste en Algérie ». Poursuivant ses propos, cet ancien éducateur rappelle : « Par le passé ces erreurs dont ont pâti les manuels scolaires ne pouvaient être portées à la connaissance du public, à l'inverse d'aujourd'hui où l'on dispose de nombreux canaux d'expressions, de moyens d'informations, de sites web et de pages de réseaux associatifs multiples, qui les propagent rapidement en dévoilant leurs teneurs ». Commentant ce qu'il a considérée comme étant une erreur à double facettes véhiculée dans le livre parascolaire de géographie qui mentionne, notamment, que 80% des habitants d'Algérie sont arabes et le reste un mélange de Chaouis, Amazighs et Béni M'zab, l'ancien cadre du secteur éducatif estime :« Le premier volet de cette bourde, est contesté par l'éclairage scientifique qui atteste que les Arabes ne constituent nullement 80% des habitants de l'Algérie et qu'il n'est pas possible de déterminer ce taux, ainsi originellement de façon majoritaire surtout que l'Algérie est connue pour être la terre ancestrale des Amazighs que l'Islam a arabisés dans de larges proportions. En ce sens qu'il n'existe pas de problème racial en Afrique du Nord étant donné que la civilisation musulmane a arabisé les Amazighs. Et selon la même source, ce qui est vrai consiste à dire que « les habitants de l'Afrique du Nord sont des Amazighs dont leur existence a été renforcée par l'élément arabe et qu'avec l'écoulement du temps, les Amazighs se sont arabisés ». Ce qui nous rappelle la déclaration du défunt imam égyptien Mohamed El Ghazali, qui interrogé à propos de ses origines durant son séjour en Algérie où il enseignait à l'institut islamique supérieur de Constantine, a déclaré mot à mot : « Mes origines sont pharaoniques et l'Islam m'a arabisé »(« Asli fer'ouni wa ‘arrabanni el 'Islam »). L'histoire nous apprend que les premiers Arabes orientaux ,venus au Maghreb à l'avènement de l'Islam au VIIe siècle, ont contribué à l'islamisation de la majeure partie de l'Ifriqiya et que c'est à partir du XIe siècle, à l'arrivée des tribus Béni Hillal que l'arabisation s'est répandue dans la contrée . L'anthropologue Gabriel Camps mentionne dans un ouvrage, à l'instar de nombre d'historiens et de chercheurs, y compris nationaux : « Les Berbères, Mémoire et identité », je cite : « en renforçant par leur présence la part de population nomade, les Arabes arrivés au Xe siècle ont été d'un poids insignifiant sur le plan démographique, mais déterminant sur le plan culturel et socio-économique » (Les Berbères, Mémoire et identité, éd. Errance, Paris ,1995, p. 102).On prête également à Ibn Khaldoun, une citation à propos des Maghrébins où il les qualifie d'autochtones « arabisés » (moustaaraboune). Pour en revenir à cette erreur sus indiquée d'ordre pédagogique, M. Ferrad a indiqué qu'elle a trait à la manière dont sont représentées ces connaissances, - à l'instar de l'utilisation de l'expression citant « ...20% de mélange... », - qu'il a jugée d'expression « méprisante » et d'erreur flagrante tendant à semer les fâcheuses animosités et rancœurs. Concernant l'origine de cette erreur de classification tendancieuse dans cet ouvrage de géographie, notre interlocuteur a écarté l'éventualité qu'elle ait été intentionnelle de la part de la Ministre de l'Education Nouria Benghebrit ou d'un tout autre responsable, la renvoyant à une défaillance d'ordre technique. M. Ferrad a, ainsi, déploré ce qu'il a appelé « la suscitation d'une confrontation idéologique autour de cette erreur », considérant qu'il était tout à fait possible de procéder à la correction de ce défaut technique en toute quiétude dans le cadre ambiant du secteur éducatif. Par ailleurs, M. Arezki Ferrad qui a enseigné dans les trois paliers scolaires (primaire, moyen et secondaire) et occupé le poste de proviseur d'un lycée, a estimé, en outre : « Il y a lieu d'indiquer que cette fréquence d'erreurs récurrentes, résulte en fin de compte, de la nature autoritaire du système qui a considérablement laminé l'apport utile de l'activité politique contredisante de l'opposition, avec l'imposition au fil du temps, de ministres d'en dehors du secteur éducatif et qui l'ont géré au gré des circonstances». M.Ferrad devait conclure, en observant à propos de la conception des livres destinés aux élèves : « Cette opération est des plus ardues qui soient et elle nécessite le concours de scientifiques confirmés, linguistes, pédagogues, sociologues, psychologues, éducateurs et autres, c'est-à-dire une groupe considérable de spécialités pour l'écriture d'une seule expression. » (Extraits traduits de l'article de B. Mustafa paru dans l'édition du quotidien arabophone El Khabar du dimanche 18 septembre 2016). Cet éclairage apporté est fort instructifmais appelle à de nécessaires autres précisions à propos, notamment, de l'appellation Amazighs sujette à certaines confusions, assez répandues comme l'erreur involontaire, par commission ou méconnaissance, qui confond Amazigh avec une ethnie particulière, alors que ce terme désigne tous les Berbères, d'une manière générale qui ne se réduisent ni à une ethnie,exclusivement, ni à une zone géographique déterminée mais renvoie à un ensemble d'ethnies réparties dans toute l'Afrique du Nord, où par exemple, partout le traditionnel «yennayer amazigh» y est célébré chaque année , depuis la nuit des temps jusqu'à nos jours. Les spécialistes comptent près de 3 000 dialectes berbères qui se sont constitués au cours de l'évolution historique, faisant rattacher les langues berbères à la famille des langues chamito- sémitiques au même titre que la langue arabe et hébraïque.