Il y a comme de l'électricité dans l'air au niveau de la cour de justice de Annaba, où le parquet général a alpagué deux avocates directement impliquées dans une affaire d'escroquerie aux logements. Elles ont été officiellement inculpées ce dernier jeudi sous l'accusation d'escroquerie. Cette institution judiciaire a tenu à vérifier préalablement les données rapportées par une soixantaine de victimes, auxquelles l'une et l'autre des deux avocates auraient promis, à chacun, un logement à la mesure de leur attente. Cette dernière fin de semaine, saisi de l'arrêt du juge d'instruction, le procureur général a réagi. Il a décidé d'entamer une procédure judiciaire à l'encontre des deux avocates et ce, malgré l'opposition du bâtonnier. Sa décision est motivée par les témoignages et des preuves matérielles fournis par les victimes. Des rebondissements ont suivi. Avec notamment l'effritement de ce qui paraissait être une solidarité entre les deux mises en cause. Acculée dans ses derniers retranchements par le juge d'instruction, l'une d'elles a affirmé avoir été menacée de mort par la co-accusée si delle-ci venait à trop parler. Cette grave accusation n'a pas été confirmée par nos sources. Elles ont, cependant, précisé que ce dossier est suivi avec attention par les membres du barreau de Annaba et par le Conseil de l'ordre des avocats à Alger. Les auditions des deux mises en cause et de la soixantaine de victimes avaient été entamées depuis plusieurs jours. Celles-ci ont toutes pointé du doigt les deux mises en cause comme étant les auteurs de l'engagement verbal et écrit de leur procurer un logement social en contrepartie d'une somme d'argent. Certaines se chiffrent à des centaines de milliers de dinars. Pour preuve de leur crédibilité, les avocates avaient établi des décharges cachetées et signées comportant la somme versée par chacun des candidats au logement social. Nos sources ont indiqué que les victimes ont fait l'objet de diverses pressions tout au long de l'instruction afin qu'elles se rétractent. Promesse leur auraient été faite d'être remboursées. Comme il est précisé qu'une des accusées proche parente du bâtonnier aurait déjà eu affaire à la commission de discipline en 2011. Elle y avait été traduite pour avoir commis un délit contraire aux dispositions du code de l'éthique et de la déontologie. Radiée, elle avait déposé un recours auprès du Conseil de l'ordre. Ce qui lui avait valu de voir sa sanction se transformer en trois années de suspension d'exercer. Bien qu'officiellement et pénalement poursuivies, les deux avocates étaient toujours en fonction jusqu'à hier. Contactées, plusieurs victimes ont affirmé avoir été poussées à bout par des proches du barreau investis d'une «mission impossible», selon nos interlocuteurs. C'est-à-dire contraindre les parties civiles à la rétractation. Du côté du barreau, malgré l'existence de documents irréfutables en possession du juge d'instruction, certains tentent de faire croire que les deux accusées, ne sont que des «coupables fabriquées». Au siège du barreau de Annaba où dans sa périphérie, tels les prétoires des salles d'audience et le hall des pas perdus, la tension est palpable. Des avocats jusqu'ici muets multiplient les débats juridico-juridiques. Ils ont été surpris hier dimanche, par la décision du parquet général de passer à la vitesse supérieure. Cette institution judiciaire officiellement a, en effet, bouclé l'instruction. La deuxième phase est la saisine de la chambre d'accusation pour la qualification du délit. Des magistrats ont réagi en soulignant que si le parquet fonce en ordonnant la mise en route de la procédure judiciaire, c'est qu'il a les preuves formelles du délit et qu'elles sont étayées par les témoignages des victimes. Dans cette affaire, il n'y a ni cadre ni agent de l'OPGI. Le nom avancé initialement par les victimes n'est rien d'autre qu'un appât que les deux avocates auraient avancé pour bien ferrer leurs futures victimes. Cette affaire d'avocates véreuses risque d'avoir des répercussions négatives sur le Conseil de l'ordre des avocats à Annaba. D'autant, précise-t-on, qu'une des avocates directement impliquées serait une proche parente du bâtonnier. Il reste aussi que pour le procès, les victimes ne risquent pas de trouver des avocats pour défendre leurs intérêts au titre de partie civile. Et pour cause la solidarité des uns et des autres robes en noir risque de s'exprimer même par les avocats commis d'office par le parquet général.