Les ministres européens des Finances, après avoir réagi en ordre dispersé face à la crise financière, vont tenter d'afficher un front commun, lundi et mardi, dans le sillage du mini-sommet de Paris qui a, toutefois, irrité certains pays non invités. La crise secouait encore l'Europe dimanche : en Allemagne, le gouvernement d'Angela Merkel travaillait «d'arrache-pied» pour sauver la banque Hypo Real Estate. Pour éviter la panique, le ministère des Finances a indiqué que la garantie de l'Etat sur l'épargne privée serait désormais illimitée. La réunion mensuelle des 15 ministres des Finances de la zone euro lundi à Luxembourg, puis celle des 27 ministres de l'UE mardi, devraient permettre de mettre en musique l'engagement proclamé samedi à Paris par les quatre plus grands pays de l'UE d'agir avec plus de cohérence face à la crise. Les ministres veulent essayer d'avancer sur l'amélioration de la régulation financière, en coordonnant mieux le travail des superviseurs nationaux dans l'assurance. Une question sur laquelle ils peinent à s'entendre depuis des mois. Il s'agira surtout de commencer à réfléchir aux mesures annoncées samedi par les dirigeants des quatre membres européens du G8 (France, Italie, Allemagne, Royaume-Uni), invités à Paris par le président Nicolas Sarkozy. Ces pays se sont engagés à prendre «toutes les mesures nécessaires» pour «assurer la solidité et la stabilité» du système financier européen, sans toutefois évoquer un plan de sauvetage comme aux Etats-Unis. Ils ont aussi annoncé des initiatives sur la garantie des dépôts bancaires, pour lesquelles ils veulent «un développement coordonné des règles européennes». Une manière de critiquer l'Irlande qui a mis ses partenaires devant le fait accompli dans ce domaine. Sur les normes comptables bancaires, qui contribuent en l'état à amplifier les effets de la crise pour les banques, un travail aura lieu «en urgence», a annoncé Nicolas Sarkozy. Surtout, les dirigeants européens se sont mis d'accord pour dire que «l'application du Pacte de stabilité et de croissance devrait refléter les circonstances exceptionnelles que nous traversons, en application des règles du Pacte». Certains pays en difficulté budgétaire, comme la France, pourraient y voir le moyen de dépasser la limite européenne de 3% du PIB autorisée pour le déficit, sans risque de se faire sanctionner. Le Pacte de stabilité, assoupli en 2005, prévoit, en effet, qu'aucune procédure ne sera lancée contre un Etat en cas de grave crise ou de fort ralentissement économique. La proposition d'une application plus souple «ne signifie pas que la France s'engage dans cette voie», a toutefois assuré dimanche le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant. La Commission européenne, gendarme des déficits dans l'UE, a averti dimanche par la voix de son président José Manuel Barroso que «cela ne saurait être une excuse générale pour dépasser la limite des 3%». Certains ministres européens très attachés à la rigueur, comme l'Allemand Peer Steinbrück, pourraient abonder dans ce sens à Luxembourg. La réunion permettra aussi de connaître les positions des pays qui n'étaient pas invités à Paris, le format réduit ayant fait grincer quelques dents. «Les conclusions de la réunion de quatre pays européens doivent être débattues entre tous les Etats membres», a demandé dimanche le ministre portugais des Finances, Fernando Teixeira dos Santos. Le président du Parlement européen Hans-Gert Pöttering a lui aussi jugé que les décisions devaient être prises à 27. Et la numéro deux du gouvernement espagnol, Maria Teresa Fernandez de la Vega, a rappelé que les «organes de décision» européens restaient le conseil des ministres des Finances et le sommet des chefs d'Etat de l'UE.