General Motors n'a plus que quelques heures pour soumettre à la Maison blanche un plan de restructuration assurant sa survie, mais celle-ci pourrait, paradoxalement, dépendre d'une menace explicite de dépôt de bilan. Le premier constructeur automobile américain poursuit les discussions avec ses créanciers obligataires d'une part et le puissant syndicat United Auto Workers (UAW) d'autre part, pour tenter de boucler une vaste restructuration qui lui permettrait de réduire ses dettes de 28 milliards de dollars (22 milliards d'euros) environ, selon des sources proches des pourparlers. Mais il est peu probable qu'il aura conclu des accords avant l'échéance de mardi fixée par l'administration Obama. Cette dernière pourrait donc devoir prendre l'initiative, soit en remettant la main à la poche - alors que l'Etat a déjà accordé 13,4 milliards de dollars de prêts à GM - soit en forçant le groupe à se placer formellement sous la protection du Chapitre 11 de la loi sur les faillites au cours des prochaines semaines faute d'accord sur sa dette. «Les investisseurs redoutent l'absence de progrès», explique Brian Johnson, analyste de Barclays Capital, dans une note à ses clients. «De nombreuses parties prenantes doutent de la volonté du gouvernement fédéral d'exiger le remboursement des prêts en cours et de forcer le dépôt de bilan.» Les créanciers obligataires de GM parient visiblement sur l'hypothèse que Washington volera au secours de GM même si eux-mêmes refusent de voir réduites des deux tiers leurs créances, qui atteignent aujourd'hui 27,5 milliards de dollars, en échange d'une participation au capital du groupe. La faillite comme aiguillon De son côté, l'UAW a déjà exprimé sa réticence à l'idée de se voir accorder des actions d'un GM recapitalisé en échange de l'abandon de la créance de 10,2 milliards de dollars du groupe envers un fonds d'assurance santé des retraités de l'entreprise. Un dépôt de bilan de GM aurait notamment pour conséquence de réduire sensiblement les indemnités de départs pour les prochains plans sociaux, qui pourraient concerner 10.000 salariés. Mais les récentes décisions prises par l'administration Obama, pour soutenir Chrysler et renflouer les sociétés de crédit automobile ont convaincu nombre d'observateurs que la Maison blanche ne laisserait pas GM aller jusqu'au dépôt de bilan. La Maison blanche a mandaté deux cabinets juridiques spécialisés dans les faillites ainsi que la banque d'investissement Rothschild pour la conseiller. «Tant qu'une limite claire et nette n'aura pas été posée, il n'y a aucune raison que cela ne puisse pas se régler sans aller jusqu'au tribunal (des faillites)», estime Tom Macauley, avocat spécialisé dans le redressement d'entreprises au cabinet Zurckerman Spaeder. «Le chapitre 11 sert d'aiguillon.» La situation de Chrysler est moins complexe car la dette non-garantie de la société est très réduite. Un cadre dirigeant de Chrysler, qui a requis l'anonymat, a déclaré vendredi que les discussions du groupe avec ses créanciers et l'UAW progressaient. Chrysler a reçu quatre milliards de dollars de l'Etat fédéral et en espère trois autres. Son actionnaire à 80% Cerberus Capital Management lui a prêté 500 millions supplémentaires et son ex-maison mère Daimler, qui détient encore 20% de son capital, lui a accordé un prêt de 1,5 milliard.