Le marché automobile d'occasion connaît, ces dernières années, une véritable «anarchie», et cela à tous les niveaux. Aucune loi, ni autorité ne régit cette jungle où les voitures d'occasion se vendent, parfois, plus cher que les neuves. Mais un phénomène d'un genre nouveau a investi, ces derniers temps, le marché automobile. On trouve des voitures neuves, fraîchement sorties des entrepôts des représentants des marques automobiles installées en Algérie, proposées à la ventedrecte. Intrigués par cette pratique,nous avons mené une enquête au cœur des réseaux spécialisés dans la revente des voitures neuves. Cette pratique, parfaitement légale aux yeux de la loi, permet à ces «investisseurs» d'obtenir d'importants bénéfices. Selon un habitué de ces pratiques d'un genre nouveau, «ces réseaux achètent carrément des voitures neuves et les revendent avec 70 000 à 100 000 DA de bénéfice, selon la marque et le modèle. Il leur suffit juste d'avoir un contact solide chez le concessionnaire pour se procurer des véhicules, non seulement avec des remises importantes, mais aussi avec des délais de livraison réduits». Notre source nous déclare qu'«en achetant 10 voitures chez le même concessionnaire, à titre d'exemple, il nous accorde une réduction sur le lot acheté allant de 5% à 10% sur le prix du véhicule», ajoutant que «cette situation engendre un épuisement des stocks chez les représentants des différentes marques automobiles. C'est précisément cette situation qui joue en notre faveur. Le futur acquéreur d'une voiture, en se présentant chez le concessionnaire, se retrouve contraint de patienter quatre, voire cinq mois, pour la livraison de son véhicule. C'est, ainsi, qu'il sera contraint de se tourner vers nous», nous a-t-il expliqué. «Avant l'annulation du crédit à la consommation par le gouvernement, a-t-il renchéri, les concessionnaires refusaient de nous faire des réductions sur les achats groupés, une situation qui a paralysé en quelque sorte notre commerce. Ces derniers n'éprouvaient aucun problème pour écouler leurs stocks. Mais aujourd'hui, on arrive à obtenir de très bonnes réductions.» Un petit tour au marché automobile d'occasion d'El-Harach nous a édifiés. Environ 80% des voitures proposées à la vente sont fraîchement sorties des entrepôts des concessionnaires. Qui est responsable de cette situation ? L'Etat qui ne veut imposer aucune loi pour réglementer ce marché ou les réseaux de revendeurs qui, au final, ne sont intéressés que par l'appât du gain? Non ! Ni l'un ni l'autre. C'est l'attitude des acheteurs qui est à l'origine de l'apparition de ce commerce d'un genre nouveau. L'impatience et la hâte des Algériens pour obtenir ce qu'ils veulent laisse libre cours à ces pratiques. En attendant une solution à ce nouveau phénomène, le consommateur est obligé de piocher encore plus dans ses économies pour acquérir une voiture neuve dans des délais raisonnables. Les prix des voitures d'occasion flambent Durant notre virée au marché d'occasion d'El-Harach, notre attention a été attirée par les prix exorbitants des véhicules d'occasion, même ceux qui ont plus de 20 ans de marche. Une Peugeot 205 GTL, année 1988 (plus de 22 ans), est proposée à 300 000 DA. Une Renault Twingo, année 2000 (plus de 10 ans), est proposée à 500 000 DA. Pour une Renault 4, année 1980 (plus de 30 ans), son propriétaire demande 280 000 DA sous prétexte qu'elle a été totalement rénovée en Espagne. Une Hyundai Atos GLS, année 2008, est proposée à 700 000 DA négociables. Une Toyota Corolla, année 2008, est proposée à 1 700 000 DA. Une Chevrolet Aveo élégance, année 2009, est proposée à 920 000 DA négociables. Qui fixe les prix et régule le marché ? Et sur quelle base les prix sont-ils fixés ? Une poignée de spéculateurs fait la loi en fixant les prix des voitures au gré de leur humeur. On se demande pourquoi ce marché très important pour l'économie nationale échappe totalement au contrôle de l'Etat ? Une question qui restera, sans aucun doute, sans réponse. Selon un habitué du marché des voitures d'occasion,«cette hausse infernale des prix a commencé dès la promulgation du décret imposant une taxe allant de 50 000 DA à 150 000 DA sur l'achat des véhicules neuf. Les gens ont préféré acquérir une voiture d'occasion qui a roulé une année ou deux seulement au lieu de débourser le montant de la taxe pour obtenir une neuve. C'est en remarquant l'énorme importance de ce marché que les spéculateurs ont saisi l'occasion pour engranger de l'argent sur le dos des petites bourses », a-t-il dit. Ainsi, en voulant réguler le marché du neuf, en supprimant le crédit à la consommation et en instaurant des taxes sur l'achat des voitures neuves, l'Etat se retrouve face à un problème plus complexe : celui de la spéculation. Parmi les principales mesures instaurées par le gouvernement, celle de l'instauration d'une taxe sur l'achat des véhicules neufs allant de 50 000 à 70 000 DA. Quelque temps après, l'Etat a promulgué l'ordonnance N° 09-01 du 22 juillet 2009 de loi de finances complémentaire 2009. Elle concerne le relèvement de la taxe sur les transactions des véhicules automobiles neufs pour les cylindrées supérieures à 2 500 cm3 et l'extension de son champ d'application aux camions et engins de travaux publics La taxe passe de 100 000 à 200 000 DA pour les véhicules dépassant 2 500 cm3, essence, et de 150 00 à 300 000 DA pour les véhicules diesel. Concernant les camions et les engins de travaux publics, la taxe varie entre 350 000 DA et 500 000 DA. La seconde décision se résume à travers l'article 75 de la loi de finances complémentaire qui stipule que «les banques ne sont autorisées à accorder des crédits aux particuliers que dans le cadre des crédits immobiliers». A travers ces lois, le gouvernement voulait, à la fois, faire baisser la facture des importations et par la même occasion imposer aux constructeurs automobiles d'installer des usines de montage en Algérie. Au final, ces décisions ont fait beaucoup plus de mal que du bien au simple citoyen qui ne peut, ainsi, acheter ni une voiture neuve ni une d'occasion !