Durant quatorze ans, le petit Boua-lem Rahoui n'a pas été gâté par l'existence. Qu'on en juge : orphelin de mère à six ans, sans la présence du père, évadé d'un camp de concentration et qui a rejoint le maquis, il est recueilli par sa grand-mère maternelle. Sur les artères d'Aïn Témouchent, c'était l'errance d'un enfant insouciant des dangers de la rue et qui, le ventre creux, se gavait comme il pouvait. Il l'avoue lui-même dans son premier livre paru en 2005 : «cette situation de petit voyou était considérée dans mon esprit comme étant une revanche contre la société». Sa chance, il l'a rencontrée au collège d'enseignement technique Savignon avec l'athlétisme, qu'il n'aimait pas d'ailleurs et qu'il a pratiqué à ses débuts, à contrecoeur. Il a fallu que ses «profs» Noiret, Tami Mohamed, Henkouche Djillali, Mustapha Benzellat et Djillali Benzeghi fassent preuve de fermeté pour qu'il consente s'aligner en Jeans et avec ses souliers de ville sur une course autour de l'établissement qui figurait au programme. Cette course, il l'a gagnée face à des adversaires mieux équipés mais cette victoire l'a rendu suspect aux yeux de tout le monde. Ce n'est que lorsque Boualem récidiva - avec le même accoutrement inadéquat pour la pratique de la course (pantalons Jeans et souliers) - que son entourage se rendit compte qu'il avait affaire à une sorte de phénomène. Notre regretté collègue Driss Jawad - qui l'a connu mieux que tout le monde - a écrit le lendemain de l'exploit des Jeux Méditerranéens «que Rahoui avait une préférence pour le football et que les résultats n'étaient pas brillants. Rahoui, un peu farfelu, a failli abandonner car il ne donnait pas d'importance à l'entraînement. Ce n'est que quelque temps après sous les couleurs de l'ASPTTO qu'il a commencé à se distinguer». Malgré ses dons, les résultats épousèrent une courbe irrégulière. Devenu adulte, il a pris conscience de la précarité de sa situation sociale. C'est en s'installant à Alger au mois de juillet 1970 que ses problèmes commencèrent à se résoudre. Employé à la Sonacome, il a enfin consenti à s'entrainer sérieusement. Il a consenti beaucoup de sacrifices avant «d'exploser» au mois d'août 1975 et d'effectuer une très bonne carrière. Toutefois, les experts estiment, qu'avec ses dons et ses extraordinaires facultés d'endurance, Rahoui aurait pu se construire un palmarès beaucoup plus fourni, car il était également excellent sur les distances de fond du 5.000, 10.000 et même au marathon. D'ailleurs, ce que beaucoup de gens ignorent, c'est que Boualem a remporté la médaille de bronze aux 10.000 m. Marqué physiquement par les efforts fournis aux 3.000 steeple, il est arrivé à grimper sur le podium au terme d'une course très relevée derrière les spécialistes, le tunisien Zeddam, et l'Espagnol Haro. En gagnant cette médaille, Rahoui a décomplexé l'athlétisme algérien. Toute sa vie, il restera fidèle à cette discipline, «à qui, dit-il, je dois tout, car elle m'a éduqué et formé sur tous les plans. Après une carrière bien remplie, Rahoui a fait partie du bureau fédéral, sans oublier qu'il a encadré de nombreuses sélections à l'étranger. Rahoui est resté un battant qui sait faire passer son message.