Le dernier communiqué d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), revendiquant l'attentat suicide du 8 août contre l'ambassade de France à Nouakchott, est en fait un non événement médiatique, puisque tout le monde sécuritaire n'ignorait pas l'identité du kamikaze et son affiliation à l'organisation de Ben Laden. La revendication, publiée sur un site habituellement utilisé par Al-Qaida pour mettre en ligne ses communiqués, était accompagnée du CV de l'auteur de l'attentat un certain Abou Obeida Moussa al-Basri, et trois photos de ce dernier, originaire du quartier populeux de Basra dans la capitale mauritanienne. Le communiqué le présente comme une recrue de la dernière heure puisque enrôlé l'année dernière dans les rangs de l'organisation. L'Aqmi affirme, selon un site islamiste dédié aux opérations d'Al-Qaïda au Maghreb, que l'attaque était une riposte aux agressions des «Croisés», à leur tête la France, et des dirigeants mauritaniens contre l'islam et les musulmans et notamment l'ex-général putschiste Mohamed Ould Abdel Aziz, qui avait renversé il y a un an le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, avant d'être élu en juillet à la tête de l'Etat. Le groupe a reconnu que l'assaillant n'avait pas réussi à entrer dans l'enceinte de l'ambassade en raison de la présence d'une barrière, mais affirmé que l'explosion avait blessé plusieurs gardes français. De son côté, Paris avait fait état de deux blessés légers parmi les gendarmes affectés à la surveillance de l'ambassade mais qui n'étaient pas en service au moment de l'attaque. Après l'attentat, le ministre mauritanien de l'Intérieur de l'époque, Mohamed Ould R'Zeizim, avait indiqué que le kamikaze était un Mauritanien «recruté par les salafistes» et entraîné «dans des camps» situés dans le Sahara. Cet attentat suicide, le premier du genre dans un pays relativement épargné par la mouvance islamiste malgré quelques coups de force des éléments locaux de l'Aqmi, est perçu par les spécialistes des groupes terroristes comme une nouvelle étape dans l'escalade de l'action militaire d'Al-Qaïda. Un changement dans la façon dont les choses se passent dans ce pays», avait alors estimé Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE. Il vient également en charpente des discours propagandistes et belliqueux d'Al-Zawahiri qui avait menacé ouvertement Paris de représailles. Abdelmalek Droudkel, alias Abou Moussab Abd el-Ouadoud, le numéro 1 du GSPC algérien, devenu en 2006, sous le parrainage de Abou Moussab el-Zarqaoui, Al-Qaïda au Maghreb Islamique, avait revendiqué la paternité de l'attentat contre l'ambassade d'Israël en Mauritanie, dans une interview accordée au quotidien américain «New York Times», en août 2008. L'analyse de l'ancien barbouze fait craindre le pire pour la Mauritanie puisque, selon lui, que ce soit en Irak, en Somalie ou en Afghanistan, l'attentat suicide contre les forces occidentales ne faisait pas au départ partie de l'arsenal des combattants radicaux mais qu'ils y ont eu recours ensuite, en se radicalisant. «A la base, l'attentat suicide n'est pas dans la culture de l'islam sunnite», précise encore Alain Chouet. «Mais il en fait désormais partie, parce que cela fait vingt ans qu'on lave les cerveaux. On a maintenant des générations qui ont été élevées dans ce truc-là».