La visite au Proche-Orient du vice-président américain Joe Biden s'est achevée vendredi sur une note plutôt morose pour celui qui devait relancer le processus de paix dans la région, en panne depuis plusieurs années. Unanimement dénoncée par la communauté internationale, la tentative d'accélération de la colonisation d'Al-Qods a pris au dépourvu autant le vice-président américain que l'administration Obama, qui n'a pas vu venir cette torpille. Tout autant d'ailleurs que le Premier ministre israélien Netanyahu, accusé par la presse et les partis politiques israéliens de ne pas savoir ce qui se passe au sein même de son cabinet. Mais pour les Palestiniens, cela a sonné une fois de plus la charge pour d'abord geler les discussions indirectes pour la relance du processus de paix, tant que le projet de construction de logements à Al-Qods Est n'est pas retiré, ensuite pour enflammer la rue palestinienne, qui ne croit plus à l'option pacifique pour reprendre ses droits et sa patrie spoliés. En fait, c'est l'extrême droite israélienne qui contrôle le ministère de l'Intérieur à travers le parti Shas, qui est à l'origine d'un brusque froid entre l'administration Obama et Israël. Joe Biden, qui s'est senti trahi par l'extrême droite israélienne alors qu'il tentait de réchauffer le processus de paix israélo-palestinien, a aussitôt condamné la colonisation d'Al-Qods. Cela a fait mal au sein du cabinet Netanyahu et refroidi encore plus les relations entre l'administration Obama et le gouvernement israélien. C'est inédit, cette condamnation de Joe Biden, vice-président des Etats-Unis, d'Israël, même si, au fond, cela n'a pas le poids d'un tel geste qu'aurait pris le locataire du bureau ovale. Mais la sortie de Biden est assez symptomatique des turbulences actuelles que traversent les relations israélo-américaines. L'affaire est tellement grave que Netanyahu a présenté ses «regrets» à l'administration US. Pour autant, les enjeux de cette brouille, qui ne sera que passagère de toute manière entre Washington et Tel-Aviv, sont ailleurs, au niveau même de la volonté d'Israël d'annexer complètement la ville sainte, et chasser de facto la population palestinienne. Car l'annonce de la poursuite de la colonisation dans la partie Est d'Al-Qods a été faite sciemment par l'extrême droite israélienne pour saborder la relance du processus de paix. Parce que les Israéliens ne veulent pas de cette paix, puisque la droite et les partis extrémistes considèrent Al-Qods occupée comme leur capitale «éternelle et indivisible», alors que les Palestiniens veulent faire de la partie Est de la ville sainte la capitale du futur Etat de Palestine. C'est là que se situent les enjeux actuels et futurs des négociations de paix israélo-palestiniennes et de tout ce qui se fera autour de cette question, ainsi que la fronde de l'extrême droite qui a ridiculisé le vice-président US en pleine tournée devant réchauffer un processus qui a perdu depuis longtemps de sa vigueur. Dans tout ce fatras qui remet les négociations de paix à la case de départ, c'est très certainement le camp des faucons et de l'extrême droite en Israël qui jubile, Joe Biden revenant les mains vides aux Etats-Unis alors qu'il pensait aller moissonner, la fleur aux dents, une «paix des braves» en terre conquise.