C'est un véritable pavé qu'a jeté hier, vendredi, le directeur de wilaya de l'Education par le truchement des ondes de la radio locale, révélant que pas moins de mille sept cents élèves, âgés de moins de seize ans, âge obligatoire pour la scolarisation, n'ont pas rejoint les bancs des écoles lors de la rentrée du 13 septembre dernier. En effet, le premier responsable du secteur de l'Education a indiqué que ses services disposaient des coordonnées (noms et adresses) des élèves ayant cessé leur scolarité et que des «mesures de rétorsion seront prises à l'encontre de leurs parents» a-t-il menacé sur les ondes de la station radiophonique locale. Le même responsable a expliqué que des contacts avec leurs parents sont en cours par le biais des chefs de daïras et des présidents d'APC pour les contraindre à ramener leurs enfants à l'école, «faute de quoi la loi sera appliquée dans toute sa rigueur» a-t-il martelé. «Des dispositions légales existent pour contraindre les parents à scolariser leurs enfants de six à seize ans, âge obligatoire légale pour la scolarisation aux frais de l'Etat» a rappelé le directeur de l'Education. L'âge de scolarisation étant obligatoire de 06 à 16 ans révolu, une instruction a, d'ailleurs, été adressée par le ministre de l'Education nationale en mai dernier aux walis et aux présidents d'APC, les sommant d'établir la liste des personnes qui refusent de scolariser leurs enfants et que des commissions, composées d'enseignants et d'inspecteurs, se rendront dans toutes les wilayas du pays afin de «recenser les familles qui n'envoient pas leurs enfants à l'école ainsi que ceux qui empêchent leur progéniture de poursuivre leurs études». La liste des contrevenants «sera enregistrée et envoyée à la justice, conformément à la loi. Les parents seront traduits devant les tribunaux» a mis en garde Boubekeur Benbouzid. «J'ai 12 ans et je ne vais pas à l'école!» L'autre phénomène dénoncé par le directeur de l'Education de la wilaya de Tiaret est celui des enfants ayant largement dépassé l'âge obligatoire de scolarisation sans jamais essuyer les bancs des établissements scolaires. Pour lutter contre cette autre forme de déperdition scolaire, le directeur de l'Education, parlant de plusieurs milliers d'enfants qui seraient dans ce cas, notamment au niveau des zones rurales et/ou enclavées, a mis à contribution «forcée» les présidents d'APC et les représentants du mouvement associatif pour une large campagne de sensibilisation des parents refusant de scolariser leurs enfants, «ignorant qu'ils s'exposent aux mesures sévères contenues dans la loi» a encore rappelé le premier responsable du secteur. En milieu rural et dans les zones enclavées du sud-ouest et du sud-est de la wilaya de Tiaret, les enfants âgés entre 06 et 16 ans et qui ne sont toujours pas scolarisés sont de «l'ordre de plusieurs milliers, des filles plus que des garçons» a reconnu le directeur de l'Education, mettant à profit le média sonore local pour lancer un appel pressant aux parents des élèves privés injustement d'éducation et de savoir. Et pour parler d'un cas concret dans ce que d'aucuns appellent carrément «le prix à payer à l'inconscience des adultes», il y a Bilal, un chérubin de 12 ans et qui n'a jamais connu l'école. Le sourire angélique et la posture plutôt désinvolte, Bilal au corps famélique, a été rencontré par pur hasard, lundi dernier, dans un marché populaire de la ville, par un professeur de mathématiques, lui-même militant d'une association de protection de l'enfance. Révolté à la situation intenable du petit gredin, l'enseignant saura que Bilal habite un hameau isolé près de la commune de Serguine, à plus de 160 kilomètres de Tiaret et qu'il était venu jusqu'au marché des fruits et légumes de «Volani» à Tiaret pour revendre des figues de Barbarie pour le compte de son père au chômage et dormir la nuit dans une benne à ordure près du marché. Des enfants comme Bilal, il y en a eu peut-être des dizaines de milliers dans plusieurs régions en Algérie. Pourtant en mai dernier, le ministre de l'Education nationale avait même évoqué la possibilité d'ouvrir des internats dans le cycle primaire au profit des enfants des nomades dans plusieurs régions steppiques et agropastorales du pays. Pour lutter contre la non scolarisation des enfants, la surcharge des classes et l'analphabétisme, Boubekeur Benbouzid a également fait part de la «création d'écoles ambulantes auxquelles seront affectés, en vertu d'une prochaine instruction ministérielle, des postes budgétaires aux enseignants et inspecteurs qui voudront exercer au niveau de ce type d'établissement».