La crise économique mondiale, la mondialisation, la précarité et l'insécurité dans le milieu professionnel, le développement technologique et l'instabilité du travail sont devenus des facteurs de risque qui donnent de l'ampleur au phénomène du harcèlement moral au travail. De nos jours, les travailleurs se plaignent de moins en moins des conditions de travail mais expriment de plus en plus leur épuisement psychique dans leur milieu professionnel. Le sujet a été débattu entre psychologues, chercheurs, universitaires et médecins du travail lors d'un colloque international organisé, durant deux jours, les 6 et 7 octobre, au CRASC par les équipes de recherche du centre. Durant ces deux jours, les spécialistes ont tenté d'identifier le harcèlement sous toutes ses formes, d'étudier la prise en charge des victimes sur le plan juridique et de proposer les moyens de prévention pouvant protéger le travailleur contre ce mal qui peut conduire à la dépression et parfois même au suicide. Les participants ont été unanimes sur deux points: le premier est que les femmes sont les plus exposées au harcèlement moral et même au harcèlement sexuel, et le second est le silence des victimes et leur peur de dénoncer cet acte de crainte de perdre leur boulot ou de faire un scandale qui peut nuire à leur réputation. Le fait de se taire sur ces pratiques, dont les conséquences graves sur la santé ne sont subies que par la victime, donne, estiment les spécialistes, plus de pouvoir aux auteurs du harcèlement et place la victime dans une situation de stress, de pression et d'isolement qui réduisent les capacités mentales et physiques de travail chez l'individu. Pour le docteur Hachelafi, le président du comité scientifique du colloque et spécialiste en médecine du travail, les résultats de deux études menées en milieu hospitalier dans la région d'Oran sur le harcèlement psychique ont montré que les victimes sont attaquées pour leurs compétences professionnelles. Conséquences de ces situations de harcèlement, la destruction de ces compétences et leur isolement. Mme Lhuilier Dominique, chaire de psychologie du travail « CNAM » France, qui a présenté une communication sur « Le harcèlement moral, étiologie, traitement et prévention », est revenue sur les conséquences du harcèlement moral sur les employés de France Télécom, une entreprise qui a enregistré plusieurs cas de suicide de ses travailleurs. Pour cette spécialiste, les mutations qu'ont connues le monde du travail, la mondialisation, l'immigration clandestine, l'instabilité du travail et la délocalisation de l'industrie ont créé un nouveau climat au sein de l'entreprise, basé sur la pression et le stress des employés. Acculés par la préservation de leur société, les employeurs ont adopté un nouveau mode de procédure avec les employés afin de les pousser vers la porte de sortie sans avoir à payer les charges d'un licenciement. S'il faut réduire le nombre de l'effectif, l'employé est soumis à un harcèlement moral terrible qui le met dans une situation d'instabilité, de déséquilibre et de manque de confiance tel qu'il va s'isoler, se renfermer sur lui-même et finit par quitter son emploi. Comment y résister donc et quels sont les moyens de prévention? Les conférenciers estiment qu'il est impératif de mettre en place des dispositifs de prévention et la prise en charge des victimes du harcèlement moral ou sexuel en milieu du travail. Sur le plan juridique, la loi qui protège les travailleurs du harcèlement en Algérie existe à travers l'article 341 du code du travail. Mais elle reste sans effet si les victimes n'osent pas dénoncer l'acte et déposer plainte.