Rattrapé par son passé, l'ex-maire d'El-Kerma, B.M., comparaissait hier devant le tribunal criminel pour faux en écriture officielle, une délibération communale en l'occurrence, en vertu de l'article 215 du code pénal, pour une affaire qui remonte à l'année 2002. Elément matériel de l'infraction : une fausse délibération de l'Assemblée populaire communale (APC) d'El-Kerma enregistrée sous le n° 13-bis, datée du 5 juin 2002. La genèse de l'affaire remonte au mois de juillet 2008, lorsque la brigade de Gendarmerie nationale d'El-Kerma a ouvert une enquête sur une présumée délibération communale falsifiée sur la base d'une lettre de dénonciation anonyme. La délibération en question concernait la régularisation de la situation juridique de trois anciens logements de fonction situés dans une école primaire «Samia Yacer», établissement fermé et désaffecté en 1992, au profit de trois enseignants dans le cadre d'une démarche de cession de biens de l'Etat. Le 13 mai 2002, les membres de l'APC, son président et ses deux premiers adjoints compris, se réunissent avec comme ordre du jour l'examen du dossier relatif à la régularisation de ces logements. L'assemblée se solde par une décision n° 09/2001, qui a été transmise au chef de daïra conformément à la loi. Quatre mois plus tard, le 9 décembre 2001, l'assemblée délibère sur le même sujet (délibération n° 742001), mais la décision sera invalidée par la daïra suite à la déchéance injustifiée de l'un des trois bénéficiaires, une femme. Juin 2002 : une troisième délibération (la délibération 13-bis suspecte, déclencheur de cette affaire). Dans la forme, celle-ci n'était pas conforme puisqu'elle n'avait pas atteint le quorum (4 sur les 7 membres de l'assemblée), seul le P/APC et un autre élu ayant pris part. Mais le maire fera en sorte que cette délibération soit revêtue de la légalité, mais «a posteriori et seulement en apparence», selon l'enquête. Si le document passera sous le nez des services de la daïra, il ne pourra pas néanmoins tromper la vigilance de la commission de cession des biens domaniaux, dont le 1er vice-président de l'APC d'El-Kerma était membre. La décision signée par le maire sera frappée de rejet. L'un des motifs de rejet évoqué par la commission : un des membres de l'assemblée délibérative, une femme, était en même temps concernée par l'objet de la délibération, la régularisation des trois logements. Plus qu'un acte qui prête à équivoque, c'est carrément un fait interdit par le code communal, dans l'esprit du principe : «On ne peut pas être juge et partie à la fois.» La bénéficiaire concernée a introduit un recours contre l'invalidation de la décision par la commission de cession des biens de l'Etat auprès de la chambre administrative près la cour d'Oran et ensuite auprès du Conseil d'Etat. En vain, elle a été déboutée. Le représentant du ministère public a requis dix ans de prison ferme. A l'issue des délibérations, il a été condamné à cinq de prison ferme.