Personne ne l'a vue, oui monsieur, personne ! Mais beaucoup en parlent, surtout ceux qu'on montre à la télé, à l'ouverture du jité, pour expliquer l'injustifiable et justifier l'invraisemblable. Personne ne sait d'où elle vient ni à qui elle appartient mais on la sert volontiers avec un pronom défini comme si son identité relevait de l'évidence. Elle est partout, là où ça sent le soufre et les gaz lacrymogènes. Elle est responsable des émeutes ethniques, derrière les pénuries de pain, sur la route des crises de logements. Elle est pyromane, destructrice, pousse les jeunes Algériens sur la Méditerranée et souffle dans leur moteur. Elle a approvisionné les maquis, aidé à presser sur les détentes, assassiné Boudiaf et Kennedy. Elle a cinq doigts, quatre comme dans les miki des Simpsons. Une image, un sens figuré, disent les plus diplômés. Elle est montrée du doigt, eh oui, ça peut arriver qu'un doigt montre une main, elle est multinationale, à double nationalité ou neutre, c'est selon la version du jour et l'inspiration du moment. Mais ce qui est certain c'est qu'elle est estampillée made in Là-bas. Elle ne cherche pas à nous serrer la paluche, elle veut nous écraser les doigts, les déformer, les broyer pour que nos députés ne lèvent plus la main pour un oui, pour un autre oui. Elle est la première explication de l'Intérieur, la tête de Turc des partis de la coalition, la main à abattre du gouvernement, et les ministres, en mal d'excuses, la sortent en guise de dernières cartouches pour justifier un trou, une quatrième voie de l'autoroute, le troisième rail d'une ligne ferroviaire, les vaccins achetés puis jetés, les malformations d'une relance économique. Bref, elle est là où elle est la plus utile. On la jette en pâture à la vindicte populaire, elle fait marcher les pieds et claquer les mains d'un peuple automate, elle squatte les logements sociaux et deale la drogue devant les écoles. La couper, lui tourner le dos, mettre des gants quand on la croise, le gouvernement ne dit pas comment il faut réagir à sa présence. Il la condamne, c'est tout. Mais, elle n'est pas notre propriété, elle n'a pas de frontière. On n'est pas ses seules victimes, tous les pays aussi démocratisés que la lune disent qu'elle leur veut du mal. Pour Sarkozy, ce sont les émigrés qui salissent le métro, brûlent les voitures et sifflent son hymne national alors que la France les fait manger. Pour mon Amérique à moi, c'est Ben Laden et Al Qaïda après que le Mur de Berlin se soit effondré sur la faucille. Pour la Russie du tsar Poutine, ce sont les Tchétchènes qui n'ont pas voulu descendre de leur selle. La main étrangère c'est tout cela et le reste.