La colère gronde chez les commerçants du centre-ville de Constantine. Réunis hier au siège de l'UGCAA pour une rencontre d'information et de débat ouvert avec les membres de leur syndicat, les commerçants, principalement ceux de la rue Didouche Mourad (anciennement rue de France), ont fait part de leur grand mécontentement devant ce qu'ils qualifient de «tergiversations» des autorités locales à faire évacuer la rue envahie par les commerçants informels. Ils ont décrit une situation catastrophique et dangereuse induite par la présence des marchands informels qui ont squatté cette artère importante du centre-ville depuis plus d'un mois. «A l'abri de tout contrôle, ils vendent leurs marchandises à des prix concurrentiels, en écoulant notamment les stocks des produits alimentaires périmés, tels que la tomate en conserve, les olives et le beurre», a affirmé un épicier, en précisant qu'il achète le kilo d'olives «à 230 dinars, prix de gros et qu'il trouve la même quantité vendue à 100 dinars chez les marchands informels ! Idem pour le beurre dont ils proposent 3 morceaux pour 100 dinars alors qu'une seule unité vaut 50 dinars chez l'épicier. On comprend alors que c'est du produit périmé !». Reçus lundi par le chef de cabinet du wali, les commerçants ont été dirigés vers le président de l'APC. Mais le maire à déclaré que le problème ne concerne pas lui seulement, et qu'il est de plus du ressort de toutes les autorités. Aussi, il a proposé de réunir les représentants du wali, de l'APC, de la daïra, de la direction du Commerce et de la sûreté urbaine pour que chacun s'engage à prendre ses responsabilités pour faire vider le centre-ville des marchands informels. La rencontre est prévue dans les prochains jours. Face à ces tergiversations, les commerçants réguliers de la rue Didouche Mourad ont signalé qu'avec l'entrée en lice des habitants, le problème commence à prendre une tournure dangereuse car des conflits éclatent chaque jour. Il y a, disent-ils, «2.500 plaintes qui ont été déposées en l'espace d'un mois au niveau de la sûreté urbaine du 1er arrondissement», en mettant en garde contre les risques de glissement car, selon eux, la situation se dirige inévitablement vers un affrontement entre ces jeunes, dont des marginaux venus de toutes les communes et des wilayas voisines, comme Skikda, Oum El-Bouaghi, Mila et de quelques wilayas limitrophes, d'un côté, et les habitants et les commerçants réguliers, de l'autre. «Attendez voir que le beau temps revienne et ces marchands occasionnels, qui viennent de loin, ne vont pas se gêner pour passer la nuit dans les halls et les escaliers des immeubles, en se livrant à des actes répréhensibles», avertit un commerçant. Toujours est-il que cette rue est devenue un immense bazar à ciel ouvert et où la circulation automobile est plus que risquée. Même les piétons qui n'y ont rien à faire, qui veulent tout juste traverser la rue, évitent d'y pénétrer. «Nous déplorons vivement que les décisions prises dernièrement par les autorités locales de créer de nombreux marchés dans les quartiers périphériques pour absorber ces commerçants informels tardent à se concrétiser, ont déploré les responsables de l'UGCAA qui se rangent derrière les commerçants réguliers. Les réunions de concertation entre les différents intervenants (wali, APC, UGCAA, commerçants et citoyens) se sont multipliées cette semaine sans parvenir à dégager des décisions concrètes pendant que les commerçants réguliers sont à bout de nerfs et que le risque d'un dérapage avec les commerçants informels ne cesse de grandir, a observé un secrétaire du bureau de wilaya du syndicat des commerçants. Ce dernier propose d'ouvrir des marchés dans chaque daïra, dans les anciens locaux des Souks el-fellah, par exemple, pour empêcher ces marchands de venir s'installer à Constantine. Pour l'instant, ajoute ce syndicaliste, l'UGCAA tente bien que mal de faire patienter les commerçants réguliers. Mais qui calmera les habitants qui vivent pratiquement en état de siège ?