L'affaire liée à la partie de chasse au sanglier qui a tourné au drame à l'orée de la réserve naturelle de la «Mare d'eau», en juin 2011, était hier devant la Chambre d'accusation près la Cour d'Oran. Avec comme ordre du jour: l'examen des appels formulés par la défense contre des ordonnances rendues par le juge d'instruction près le tribunal de Oued Tlélat en charge de ce dossier. En effet, cette juridiction, qui a instruit au 2e degré, devait en substance répondre à une demande de complément d'information judiciaire réclamée par les conseils des mis en cause, notamment en ce qui concerne l'expertise balistique. Pour les avocats de la défense, « beaucoup d'incohérences et de zones d'ombre sont soulevées dans le dossier d'instruction, d'où la nécessité d'actes d'investigation supplémentaires plus poussés pour faire la lumière sur ce qui s'est passé exactement cette nuit du 16 juin 2011». La décision (par la validation de la demande ou son rejet) devait être rendue tard dans la journée d'hier. La tournure qu'a prise l'affaire, notamment après l'inculpation des trois chasseurs pour assassinat, était un sénario «fort improbable» pour la défense, qui s'attendait à une qualification de «coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner» ou, dans le pire des cas, «d'homicide volontaire». Mais l'appréciation des faits par le juge d'instruction, qui y a perçu l'élément de la préméditation, a chamboulé les cartes de la défense. Pour le magistrat instructeur, il y a un faisceau de présomptions et de preuves attestant l'intention criminelle des accusés de donner la mort (à leurs deux copains de chasse). Deux variantes principales sont à envisager : soit les décisions du magistrat instructeur seront confirmées, et dans ce cas, c'est le droit chemin vers la Cour d'assises, soit au contraire les faits seront requalifiés, et par conséquent le dossier sera acheminé en fonction du délit (ou du crime, le cas échéant) retenu. Selon l'enquête, le 16 juin 2011, aux environs de 22h, cinq agriculteurs épaulant leurs fusils se sont rendus à la réserve naturelle de la Mare d'eau (relevant administrativement de la wilaya de Mascra, située à califourchon entre Sig et Boufatis) pour abattre les sangliers, dont les dégâts sur leur céréaliculture avaient atteint des proportions alarmantes. Arrivé sur les lieux, un groupe s'est mis à battre les champs et les taillis pour en faire sortir le gibier. De l'autre front, un autre groupe s'est mis aux aguets à hauteur de la ligne de grillage bornant la réserve protégée. Première étape réussie : un sanglier traqué s'est fait coincer dans une des brèches pratiquées par ces animaux sauvages pour s'ouvrir un accès sur les prés avoisinants. Commencent alors des tirs très approximatifs, voire à l'aveuglette, en direction de la bête qui grognait à mort, selon l'enquête toujours. Soudain des cris d'homme. Après le cessez-le-feu, l'épouvantable surprise : on aperçoit deux des cinq chasseurs allongés par terre, corps inertes. L'un deux, le plus âgé, un septuagénaire, touché par une balle qui lui a transpercé le crane, rend l'âme sur le coup. L'autre, la trentaine, qui avait reçu 3 projectiles dans différents endroits du corps, succombera à ses blessures aux UMC le lendemain. Il est à rappeler que cette affaire avait fait l'objet d'une procédure de reconstitution des faits. Il est par ailleurs établi que cette chasse a été improvisée par ces paysans, dans la clandestinité la plus totale: défaut de permis de chasse, défaut d'autorisation pour la battue administrative, défaut de permis de port d'armes à feu, etc.