Dix nouveaux partis, auxquels les autorités ont officiellement délivré l'indispensable agrément d'existence, sont venus « enrichir » le paysage politique partisan du pays. A une ou deux exceptions près, ces nouveaux arrivants n'ont rien à espérer lors de la prochaine échéance électorale, sinon profiter de la campagne électorale pour se rendre visibles à l'opinion publique. Ils partent en effet trop tard à partir du moment où ils ont obtenu leur agrément pour réaliser la gageure d'être organiquement en ordre de bataille et ainsi ambitionner de bousculer les équilibres du champ partisan tels que délimités avant leur arrivée. La bataille électorale qui s'annonce aura de ce fait pour protagonistes les principaux acteurs traditionnels. Il faudra néanmoins être attentif au comportement de ces exceptions dont nous avons fait cas et qui sont le Parti de la liberté et de la justice de Mohamed Saïd, celui du Front de la justice et du développement, dont Djaballah est le leader, et le Front du changement emmené par Menasra. Si l'on distingue ces formations et qu'on leur prête la capacité de jouer les trouble-fêtes dans l'empoignade électorale, c'est en raison de la notoriété réelle ou supposée de leurs fondateurs et des sympathies électorales avérées dont ils disposent. Le Parti de la liberté et de la justice est l'héritier de Wafa, la formation à laquelle Ahmed Taleb El-Ibrahimi a en vain voulu donner naissance, laquelle avait suscité un engouement dont le pouvoir avait mesuré l'ampleur et s'est ingénié à contrecarrer en refusant la demande d'agrément introduite par Taleb Ahmed El-Ibrahimi. Si Mohamed Saïd n'a pas l'aura de son mentor politique, il peut néanmoins espérer drainer autour du PLJ une partie des sympathies qui se sont déclarées en faveur de Wafa. Le Front de la justice et du développement (FJD) bénéficie, lui, d'être dirigé par une personnalité politique, Abdallah Djaballah, qui n'est pas un inconnu sur l'échiquier politique et s'est acquis, à tort ou à raison, l'aura d'un acteur politique contre lequel le pouvoir s'est acharné en raison de la crédibilité qu'il s'est forgée en tant que son opposant. Enfin, le Front du changement aura pour lui d'être sur les starting-blocks de la compétition électorale en comptant sur le siphonage que sa création a opéré et va peut-être élargir dans l'encadrement du MSP dont il est une dissidence. Il est hasardeux néanmoins d'avancer que ces trois formations vont être en situation de chambarder les rapports de force électoraux antérieurs. Le pouvoir a balisé le terrain de telle sorte que si les partis qui sont dans son sillage ne disposeront plus de l'écrasante hégémonie électorale qui a été la leur dans les précédents scrutins, ils resteront néanmoins majoritaires en conjuguant leurs scores électoraux. Que dans ce cas de figure, leur coalition révèle une coloration aux teintes plus ou moins islamiste ou nationaliste ne lui posera aucun problème, car estampillée du sceau de la légitimité que confère un scrutin libre et transparent. Faut-il encore que ce pouvoir ne succombe pas à son vieux démon qu'est « le tripatouillage des urnes ». Car il en résultera que la recomposition politique qui en sortira ne contribuera nullement à mettre fin à la crise politique nationale.