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L'ECONOMIE DE MARCHE ET LES CONTRADICTIONS DE L'ALGERIE
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 19 - 12 - 2012

Le projet (enlisé) de l'installation d'une usine Renault en Algérie est emblématique des incertitudes et des errements de la politique économique algérienne. En effet, ce dossier qui est loin d'avoir abouti -et qui pourrait ne jamais aboutir n'en déplaise aux communicants du constructeur automobile français- pose plusieurs questions vis-à-vis desquelles l'Algérie a encore du mal à se positionner. De façon générale, c'est le rapport de ce pays aux règles de l'économie de marché et de la globalisation dont il est question. C'est ce qu'a montré l'affaire Orascom, c'est ce que montre ce qui est désormais l'affaire Renault.
ACCEPTER LES REGLES DU MARCHE OUVERT
La première question concerne le degré d'ouverture du marché algérien. On le sait, Renault est, de loin, le constructeur qui écoule le plus de véhicules en Algérie. Il n'y a donc même pas à s'interroger sur la rentabilité de son activité commerciale. Mais, dans l'état d'esprit de nombreux responsables algériens, il serait normal qu'une partie des bénéfices de cette activité ne soit pas transférée hors d'Algérie mais réinvestie sur place. On ne parle pas ici des actions de sponsoring destinées à donner le change mais de monnaie sonnante et trébuchante. Or, dans les règles de la globalisation, il n'y a pas de place pour ce genre de raisonnement. Si vous ouvrez votre marché, vous devez accepter de voir le plus gros des bénéfices passer sous le nez de votre fisc. C'est cela un marché ouvert, c'est-à-dire un marché où il n'y a pas de place pour la susceptibilité et la fierté nationales.
Dans la danse du ventre qu'accomplissent de nombreux pays émergents pour attirer les investisseurs étrangers, l'affirmation selon laquelle rien n'entravera le rapatriement des bénéfices fait partie des arguments obligatoires. Dans le cas de l'Algérie, on sent qu'il y a tout de même une forte réticence. Nationalisme oblige, on y admet mal que le bénéfice réalisé sur place puisse partir ailleurs. Alors, on se dit qu'il faut que le commerçant qui écoule sa marchandise sur place -et c'est ce qu'est actuellement Renault- investisse sur place de façon à créer des emplois et donc à consacrer une partie de son résultat au bien-être de l'économie locale. Et c'est là que se pose la seconde question. Cette affaire Renault cache mal une autre réalité. C'est l'incapacité de la machine économique algérienne à créer des emplois industriels. A ce titre, l'ouverture du commerce extérieur et la généralisation de l'import-import ont été une erreur majeure dont les responsables mériteraient d'être traduits en justice. La règle est simple : on n'ouvre ses frontières que lorsque l'on a quelque chose à vendre à l'extérieur. Plus important encore, ce n'est pas parce que l'on a ouvert ses frontières que les investisseurs vont se précipiter chez vous pour y investir, bien au contraire. Pourquoi le feraient-ils alors qu'il est plus rentable pour eux d'écouler leur marchandise plutôt que de la fabriquer sur place ?
REPOSER LA QUESTION DU PROTECTIONNISME
Il est possible que le montant des réserves de change tourne la tête des dirigeants algériens et leur fasse croire que leur pays est capable de dicter sa loi à la mondialisation. Outre le fait que ces réserves peuvent fondre comme neige au soleil, le problème, c'est qu'il faut avoir une doctrine et s'y tenir. On peut décider de ne pas accepter les exigences des investisseurs étrangers mais il faut alors comprendre que l'on ne doit pas non plus accepter l'idée de transformer l'Algérie en un immense bazar peuplé de pseudo- entrepreneurs qui ne sont rien d'autre que des import-importateurs... On en revient donc à la question de la production nationale, qu'elle soit publique ou privée, et de la dose de protectionnisme, certes temporaire, dont elle a besoin pour se développer. Et cela, à condition -et c'est une autre paire de manches- que les mafias «bazaristes» qui gangrènent l'économie algérienne laissent faire.


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