Malgré les efforts consentis par les pouvoirs publics dans le développement de l'agriculture et en dépit d'une amélioration de la croissance de production, l'Union nationale des agronomes estime que l'Algérie demeure en danger en matière de sécurité alimentaire. Le secrétaire général de l'Union, Yahia Kerrouche, a précisé hier, au forum d'El Moudjahid, lors d'une conférence-débat intitulée «L'agronome au cœur des défis de la production alimentaire», que, selon les prévisions, l'Algérie continuera à importer des produits alimentaires pour longtemps. «La balance des importations est en hausse. On importera 50 à 60% de produits alimentaires pour les 20 prochaines années», a-t-il affirmé. Et d'enchaîner : «Notamment, si on continue à travailler avec des méthodes archaïques dans le secteur agricole». Pour Kerrouche, la croissance démographique ne peut que compliquer la situation. Et de souligner que nous étions 37,9 millions d'habitants au mois de janvier 2013 et on sera 38,7 millions en janvier 2014. Il a précisé que la croissance démographique poursuit son rythme haussier depuis 2009 avec en face une production agricole en hausse mais insuffisante. L'expert agronome est catégorique. «Parler d'autosuffisance, c'est vraiment une chimère», a-t-il souligné, en précisant qu'il faut une stratégie révolutionnaire dans le secteur agricole basée sur la science, le savoir et la recherche pour une utilisation rationnelle des terres agricoles et une production en masse. Les agronomes proposent de revoir la carte agricole qui, certes, est en train de s'améliorer mais sa marge de progression reste faible. Le SG de l'UNA a affirmé que 8,5 millions d'hectares seulement sont des terres cultivées. Et sur 8,5 ha de terres cultivées, 1,2 million d'hectares seulement sont des terres à potentiel agronomique appréciable. Sans parler des 3 millions d'hectares de terre laissés en jachère. Le président d'honneur de l'UNA, Abdelmalek Seraï, indique dans le même sens que l'Algérie est réellement en danger en subissant des pressions américaines, canadiennes et françaises par le fait qu'on soit parmi les premiers importateurs de céréales dans le monde. Elle est en danger parce qu'elle subit une importation sauvage des produits alimentaires avec en face une industrie agroalimentaire, la très faible dans la région voire dans le monde. A. Seraï a également dénoncé, au même titre que les agronomes, le manque de coordination entre les différents secteurs concernés, à savoir ceux de l'agriculture, l'industrie, le commerce, l'environnement et la santé. Les agronomes tendent la main aux pouvoirs publics pour trouver des solutions afin de moderniser le secteur agricole avec des techniques de pointe qui visent l'amélioration de la production en quantité et qualité. L'Union des agronomes qui prépare son 3e congrès national, prévu les 26 et 27 décembre, exige la mise en place d'un conseil national de l'alimentation et demande au ministre de l'Agriculture de convaincre le gouvernement pour une tripartite réservée spécialement au secteur agricole et qui regroupera tous les acteurs ayant un lien direct avec l'agriculture. Les agronomes se disent persuadés «qu'il ne peut pas y avoir un développement agricole sans la science et la technologie». Les agronomes regrettent le fait que «la question de la recherche agronomique n'est pas encore prise très sérieusement par les autorités».