Le conflit communautaro-confessionnel qui secoue Ghardaïa depuis maintenant plusieurs mois ne semble pas vouloir se résorber malgré toutes les tentatives gouvernementales d'y mettre fin. La raison de cet échec est à chercher du côté même de cette volonté officielle à intervenir énergiquement et sans concession pour arrêter la violence qui affecte toute une région du pays. En effet, depuis le début de la crise, les discours et les actes ne sont pas à la hauteur de l'événement, le gouvernement se contentant d'intervenir par procuration, laissant le soin à des services de sécurité décriés et des notables locaux peu représentatifs de ramener le calme. Pourtant, ce qu'il faut craindre le plus dans cette affaire c'est que le conflit, circonscrit à deux communautés distinctes et à une région définie, risque de déborder et de conduire à un embrasement généralisé. Le danger n'est pas simplement théorique mais bel et bien physique, gangrénant chaque jour qui passe le semblant d'équilibre entre les différentes communautés algériennes. Lorsque les coupures de presse évoquent Arabes et Mozabites ou rites malékite et ibadite, on a la désagréable sensation de voyager dans un quelconque pays africain ou arabe gagné par la guerre civile. L'incapacité chronique de l'Etat à garantir la stabilité dans la région du M'zab pose plusieurs points d'interrogation auxquels il faut impérativement trouver des solutions concrètes et durables pour circonscrire le feu. La dernière visite du Premier ministre à Ghardaïa passe du coup pour un tir à blanc puisque, moins de trois jours plus tard, le cycle des violences a repris poussant les commerçants mozabites à décréter une grève pour deux jours reconductible. Même la décision de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN) de transférer une soixantaine de policiers après les accusations portées contre le parti pris de certains uniformes bleus n'a pas échappé à la critique ambiante. Les habitants «arabes» de Guerrara ont, de leur côté, manifesté contre le transfert d'une quarantaine de policiers vers Ghardaïa accusant la DGSN d'avoir pris des décisions disciplinaires contre une dizaine de policiers sans aucune preuve. Par ailleurs, l'appel des notables à l'intervention de l'armée au lieu et place de la police renseigne également sur l'état général de pourrissement qui caractérise la région. Ce refus de la présence policière nous renvoie à la même exigence de la Kabylie, lors de son printemps noir, qui avait demandé le départ de la Gendarmerie nationale de la région. Ces interférences sécuritaires et cette mauvaise gestion des conflits, privilégiant la répression «ciblée» au détriment de solutions plus en profondeur, contribuent grandement à ce climat délétère qui sent de plus en plus mauvais. Cette absence d'initiatives courageuses des décideurs en place nous amène à nous interroger sur la durée de ce conflit et surtout sur la manière à adopter pour en sortir. Les réponses, si elles existent, semblent être malheureusement reléguées à l'après-avril. Tout comme le reste des problèmes de l'Algérie.