Ils étaient des centaines de personnes à répondre, hier, à l'appel lancé par des internautes et des journalistes pour un rassemblement devant la Fac centrale (Université d'Alger) contre un 4e mandat du président de la République. Mais ce qui devait être une manifestation pacifique a vite tourné à une répression musclée de la part de la police qui a voulu, semble-t-il, mettre un terme à la contestation avant même l'arrivée de tous les manifestants. En effet, une armada de policiers a pris position dès les premières heures de la matinée, du côté de la Fac centrale, en bouclant toute la rue à la circulation. Les policiers ont entamé les interpellations musclées dès 9h30, avant même l'heure fixée par les initiateurs de la manifestation, à savoir 10 heures. Journalistes, étudiants, membres des droits de l'homme, personne n'a été épargné. Il faut relever que les personnes interpellées ont été embarquées dans des fourgons cellulaires, sans ménagement. Certains policiers, avons-nous constaté sur place, ont même usé de violence gratuite à l'encontre de certains journalistes venus pourtant couvrir l'événement alors que ces derniers avaient obtempéré aux ordres de quitter les lieux. Pis encore, certains policiers ont insulté des journalistes. En tout, une douzaine de journalistes ont été interpellés lors de ce rassemblement. Ils ont été conduits dans des commissariats distants du lieu de la manifestation de plusieurs dizaines de km, avant d'être relâchés vers midi. Dans un communiqué parvenu à notre rédaction, la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LAADDH) dénonce, avec énergie, ces interpellations musclées visant à «empêcher des citoyennes et des citoyens à exercer leurs droits d'expression et de rassemblement pacifiques». «Ces pratiques reflètent la dégradation perpétuelle de l'état des libertés et des droits de l'homme en Algérie, malgré la levée officielle de l'état d'urgence», est-il écrit dans le communiqué qui a également tenu à rappeler aux autorités «leurs engagements nationaux et internationaux en matière du respect des droits de l'homme et prend à témoin l'opinion publique nationale et internationale sur ces dérives qui interviennent en période de tensions politiques, économiques et sociales». «La LADDH reste attachée, plus que jamais, aux principes immuables qui fondent une société démocratique», conclut le communiqué signé par le président de LADDH, Noureddine Benissad. De son côté, «L'initiative pour la dignité du journaliste» s'est élevée également énergiquement contre la répression policière des journalistes. Elle dénonce énergiquement les insultes et les atteintes à l'intégrité physique d'une douzaine de journalistes qui ont participé à une action qui visait simplement à exprimer son avis», lit-on dans un communiqué qui nous est parvenu. La même source souligne que ce qui venait de se passer à la Fac centrale est extrêmement grave et représente une réelle menace pour les libertés et le droit de manifester pacifiquement. Enfin, «L'initiative pour la dignité du journaliste» appelle à la libération de tous les journalistes interpellés lors du rassemblement et exhorte la corporation à rester solidaire face à ce qu'elle a qualifié de «nouvelle attaque contre la presse et les journalistes». A noter, par ailleurs, que les journalistes comptent saisir les instances des droits de l'homme internationales pour dénoncer cette répression qui rappelle une autre période, celle des années 1990 où les journalistes étaient la cible privilégiée des islamistes.