Pour les boycotteurs actifs dont le mouvement «Barakat» qui tente de faire bouger la rue contre la perspective d'un quatrième mandat pour Bouteflika, les partis et postulants à la candidature qui ont opté pour la participation sont dans la connivence avec le pouvoir. Pour eux, en effet, ces acteurs politiques font, malgré leurs dénégations, le jeu de ce pouvoir en ayant accepté de prendre part à une compétition électorale dont par ailleurs ils dénoncent qu'elle est fermée au profit du président candidat et donné lieu déjà à des manipulations qui font présager la fraude électorale en sa faveur lors du scrutin du 17 avril. C'est dire donc que les «participationnistes» ne jouissent d'aucune sympathie auprès d'eux, même quand ils développent un discours et formulent des accusations tout aussi radicalement anti-pouvoir et anti-quatrième mandat que les leurs. Pour les boycotteurs, le fait de prendre part à ce qu'ils estiment allant être une mascarade électorale aux conséquences néfastes pour la nation démontrerait de la part des participationnistes qu'ils auraient sciemment endossé le rôle de faire-valoir et d'alibi à la fiction d'une élection présidentielle répondant aux normes de la démocratie et ouverte du fait de leur participation. Même Ali Benflis qui a un moment bénéficié d'un préjugé favorable auprès des anti-quatrième mandat est désormais voué aux gémonies par eux et mis dans le même sac que les Louiza Hanoune, Moussa Touati et autres postulants à la candidature, pour ne pas avoir pris la décision de se retirer du processus électoral après l'officialisation de la candidature de Bouteflika. L'ancien chef du gouvernement est d'autant vilipendé que son retrait aurait effectivement ôté à la compétition tout crédit quant aux incertitudes sur son résultat. Mais tout comme ils fustigent les participationnistes en les soupçonnant de rouler pour le pouvoir, les boycotteurs sont eux aussi accusés de ne pas être «blancs» et indemnes de manipulations dans la bataille qu'ils mènent contre le quatrième mandat et pour l'arrêt du processus électoral qui y conduit. Le soupçon dont ils font l'objet est qu'ils font cause commune avec les cercles du pouvoir pour qui un quatrième mandat pour Bouteflika entérinerait sinon leur écartement définitif des centres de décisions, du moins leur faiblesse à peser sur la redistribution du pouvoir dans l'après 17 avril. Qu'en somme ils seraient sous influence de ces cercles pour qui la disqualification du scrutin de la présidentielle n'est nullement envisagée comme une opération destinée à déboucher sur une transition appelée à jeter les bases d'une refondation démocratique et consensuelle du système de pouvoir en Algérie. Réponse évidemment du berger à la bergère dans un climat où la confusion est telle que toutes les prises de position des acteurs politiques qui s'agitent et controversent sont sujettes à interprétation où prédominent le doute et la méfiance sur leurs buts et intentions respectifs. Que ces deux sentiments prédominent dans l'opinion publique est la preuve que ni le pouvoir, ni le reste de la classe politique, ni le microcosme partisan n'échappent au discrédit auprès des citoyens. Ce qui augure que pour marquer leur rejet du faux vrai duel qui oppose les camps en présence, ces citoyens vont opter pour l'abstention disqualificatrice pour tous.