Les consultations autour de la révision de la Loi fondamentale débutent aujourd'hui dimanche autour d'Ahmed Ouyahia, directeur de cabinet de la présidence de la République. Une partie importante de l'opposition est hostile à la démarche telle que présentée par le chef de l'Etat, fraîchement élu à la magistrature suprême pour un 4e mandat. En dépit de cette «hostilité», Ahmed Ouyahia et, par ricochet, le président de la République, ne semblent nullement affectés par le «boycott» de l'opposition qui ne reconnaît, faut-il le rappeler, même pas les résultats des élections du 17 avril dernier proclamés par le Conseil constitutionnel. En fait, c'est une sorte de course contre la montre que doit livrer l'ancien secrétaire général du RND pour tenir une promesse électorale galvaudée par Abdelmalek Sellal durant la campagne électorale. La crédibilité de ceux qui vont prendre part à ces consultations semble être le cadet des soucis du pouvoir qui veut, selon toute vraisemblance, une mouture avant la fin de l'année. Il faut rappeler que le 15 mai dernier, la présidence de la République avait adressé des invitations pour une «large concertation» sur la révision de la Constitution. Quelque 150 partenaires (selon la formule de la présidence de la République), constitués notamment de partis politiques, organisations et associations nationales et représentants de diverses corporations, étaient conviés à faire des propositions pour réviser une constitution qui a été «tripotée» en 2008 et qui avait permis à Bouteflika, en ce temps là, de briguer un 3e mandat. Selon le dernier communiqué de la présidence, il a été relevé que les invitations adressées ont été acceptées par «30 personnalités sur 36 destinatrices d'une invitation, 52 partis politiques sur 64 invités, toutes les 37 organisations et associations nationales destinatrices d'une invitation et les 12 professeurs d'université sollicités». La même source note que M. Ouyahia recevra entre le dimanche 1er et le jeudi 5 juin, au siège de la présidence de la République «9 personnalités nationales, 8 partis politiques, le président du groupe du tiers présidentiel au Conseil de la Nation et 2 organisations nationales». Les principaux amendements proposés pour la révision de la Constitution portent notamment sur la limitation à deux le nombre de mandats présidentiels, le renforcement de l'indépendance de la justice, de la liberté d'expression, la promotion des droits de l'homme, la lutte contre la corruption et l'interdiction de la transhumance politique pour les parlementaires. L'opposition, ou du moins une partie non négligeable, ne croit pas à toutes ces consultations estimant, à tort ou à raison, que le pouvoir a déjà finalisé son projet et qu'il ne lui restait qu'une touche : la participation de l'opposition pour faire passer la pilule devant l'opinion internationale, à ne pas confondre avec l'opinion nationale. Le président du MSP, Abderrazak Mokri, dans une conférence de presse organisée dimanche dernier, avait déclaré que «si les textes actuels avaient été appliqués et leurs objectifs respectés, il y aura eu plus de libertés» en soulignant en ce sens que «la séparation des pouvoirs, le principe de création des associations et la liberté d'expression existent, mais la réalité contredit les textes». Abderazak Mokri dont le parti a boycotté les élections présidentielles ne cache pas son «scepticisme» face à cette démarche du pouvoir conduite de surcroît par Ahmed Ouyahia rompu aux «dribles politiques». Un autre absent de taille lors de ces consultations. Il s'agit de Ali Benflis qui est arrivé en deuxième position lors des élections présidentielles. L'ancien chef du gouvernement qui ne reconnaît pas également les résultats du scrutin du 17 avril est désormais contre tout ce qui vient du pouvoir actuel. Enfin la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD), constituée de partis politiques et de personnalités issues de l'opposition, a réaffirmé hier son opposition aux consultations que devrait mener Ouyahia. Dans un communiqué, la CNLTD appelle à une «transition démocratique» qui passe, selon elle, par des principes tels que le «respect du cadre républicain de l'Etat algérien», la «préservation de l'unité nationale et le refus de violence sous toutes ses formes dans le travail politique». Il s'agit également du «refus de l'ingérence étrangère sous n'importe quelle forme» et de «rendre civil le régime politique et éloigner l'institution militaire et sécuritaire des conflits politiques». «La réussite de la transition démocratique nécessite un consensus national sur la base de négociations entre toutes les parties pouvant assurer l'encadrement et la sécurisation du processus pour mettre en place des institutions légitimes, élues démocratiquement et crédibles», ajoute le même document qui propose la constitution d'un gouvernement consensuel de transition démocratique et la création d'un organisme indépendant pour l'organisation et la supervision des élections.