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La barbarie n'a pas de nom
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 30 - 10 - 2014

«Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m'est étranger» Héraclite (544-480 AV J.C), philosophe grec.
J'aurai presque fini cette chronique lorsque j'ai découvert à l'improviste sur les réseaux sociaux qu'une parlementaire de la Knesset israélienne a récemment affirmé n'avoir trouvé aucune différence entre la monstruosité des bidasses de la Tsahal et l'horreur des fantassins de l'Etat islamique. «En Irak et en Syrie, les takfiristes de l'EIIL se font photographier avec un couteau à la main, et ici, les soldats israéliens se font photographier avec des cadavres et des bombardements en arrière-plan, le tout en rigolant», a-t-elle relevé avec une pointe d'amertume. Voilà une belle leçon de sagesse et du discernement que nous offre Haneen Zoabi, cette responsable qui osa défier le temple du «politiquement correct» érigé en sacerdoce par l'establishment sioniste et ses relais occidentaux, en faisant une percée dans «cette chape du black-out» damée sur le charnier de cadavres de Ghaza. S'il y a une évidence qui en ressort à première vue, c'est que la vérité est en marche et personne ne peut lui barrer la route! Une victoire d'autant plus symbolique pour nos frères palestiniens qu'elle est révélatrice, à nous aussi, du deux poids, deux mesures de la politique internationale post-1945.
Revenir sur ce vieux concept de la barbarie me tient trop à cœur vu l'énorme gabegie qu'il installe sans cesse dans notre inconscient collectif. Le terme barbare désigne chez les athéniens celui qui est étranger à la Cité dont il ne partage ni les codes ni les habitudes. A l'origine, ce barbare est porteur d'une connotation péjorative auprès des autres parce qu'il n'a pas fait sienne la loi de l'ordre et de la civilisation des anciens Empires. Bref, il est inassimilable parce que sauvage et surtout indomptable. Sélectifs et exigeants à l'instar des grecs, les romains ont considéré leur forum comme le vrai marchepied à la citoyenneté authentique. Il en fut presque ainsi, toutes proportions gardées, de la civilisation précolombienne de l'Amérique Latine (Aztèque, Incas et Toltèques), de l'empire confucéen en Chine, du bouddhisme en Inde, de la civilisation orientale en général (akkadienne, égyptienne, sumérienne, etc.) et des religions monothéistes (Judaïsme, Christianisme et Islam). Ces dernières quoique différentes dans la forme, aient pris la tolérance (en lieu et place de la citoyenneté) comme fil conducteur de leur philosophie d'existence. L'assise préexistante du fanatisme : le non-respect du point de vue de l'autre et le déni de son identité (sociologique, existentielle, religieuse) a été bannie au premier abord par l'expérience de l'amour du prochain et de l'idée de «la reliance» de la communauté religieuse établie au moyen de l'horizontalité des rapports humains. Or là aussi les choses ne sont pas assez nettes que l'on en imagine.
Car, l'expérience nous a montré que souvent quand le dogme l'a emporté sur la raison, l'irrationalité issue d'une foi non-raisonnée a tissé l'engrenage d'une violence qui prenait de plus en plus de l'embonpoint et du tonus. De la guerre des croisades (1096-1291) à l'épreuve de l'Inquisition au lendemain de la reconquête de Grenade en 1492, si l'on se limite bien sûr à la sphère occidentale, la chasse à «l'Autre», cet impie qui ne professe pas notre foi, cet infidèle qui ne pense pas comme nous ni n'adopte nos manières fut l'unique «modus vivendi» durant tout le Moyen Age. Dans notre monde contemporain, la barbarie des deux guerres mondiales fut un immense gâchis civilisationnel. Des millions d'humains furent fauchés au nom de la sainte Realpolitik, des minorités comme les juifs et les arméniens furent presque exterminées, des tirailleurs sénégalais et des maghrébins furent exposés en première ligne, au front, une chair à canon à l'artillerie allemande à Verdun et à Monte-Cassino, les Nazis et les fascistes arrivés pourtant au pouvoir via les urnes, dévastèrent sans ménagement l'Europe et le monde. Ce fut le «climax» de l'horreur. Décidément.
Aujourd'hui, après le collapsus soviétique de 1990, une autre stratégie, vieille dans le temps, refait surface : la guerre psychologique. Or chaque nouvelle vérité dévoilée ramène des remises en questions capitales, voire des révisions déchirantes du lexique. Commençons par le terrorisme post-septembre 2001 et culminons par ce phénomène «djihadiste» qui prend de l'ampleur et fait fureur en Occident. S'il y a un constat à dresser, c'est que nos dictatures encouragées par des décennies durant au nom de la guerre froide (1945-1990) et de la normalisation autoritaire ont un revers hideux : l'intégrisme. Une dictature se construit avec des soutiens tantôt déclarés, tantôt officieux, dans le cas arabe, elle a fabriqué ce que la philosophe Hannah Arendt (1906-1975) aurait appelé «les hommes superflus» ; ces sujets qui se laissent guider par l'idéologie. Car opprimés par des pouvoirs totalitaires qui les ont dépouillés de leur identité citoyenne, ils se sont abrités derrière le logo du consentement ou du consensus tandis que certains ont essayé de se révolter. L'équivocité originelle de cette volte-face occidentale dans le traitement des questions essentiels en rapport avec les pays du Sud en général et arabo-musulmans en particulier a pour corollaire : l'intérêt. On a vu l'invasion de l'Irak en mars 2003, le déboulonnement en fanfare de la statue du dictateur à Bagdad, les colombes et les coquelicots lâchés en l'air, puis, l'anarchie, les larcins et les pillages des œuvres d'art de la Mésopotamie en direct, ensuite un Ben Laden qui s'endurcit et s'allie aux Talibans en s'opposant à l'occupation de l'Afghanistan, les manigances, le double langage et tutti quanti. On sait bien ce qu'il en est advenu après. L'état d'insécurité permanente, la psychose et bien évidemment la rivalité interconfessionnelle qui n'existait plus jadis en telle intensité en terre d'Islam. Quand on insulte la morale, pend un homme en pleine fête religieuse, divise pour mieux régner, fait des esclandres à tout propos, on n'en récolte que de la tempête en fin de course. Des scènes horribles de la prison d'Abu Ghrib aux horreurs de Guantánamo, la pénétrante odeur du fumier de la barbarie nous obstrue les narines. De héraut de la liberté, l'Occident est devenu héros de la barbarie.
Cette affreuse abstraction du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et à décider de ce qui leur convenait a coûté cher au monde dit libre d'aujourd'hui. Or le charbonnier n'est-il pas maître chez soi? La véracité de cet adage ne devrait toutefois pas voiler l'autre face du problème : la responsabilité de la communauté internationale et de l'Occident en particulier d'instaurer la démocratie sans le recours à «la violence coercitive» des invasions militaires sous le fallacieux prétexte de guerres humanitaires. Hélas, l'histoire fourmille d'exemples où ceux-ci ont failli à leur devoir d'assistance à des populations en danger d'autoritarisme (allusion faite aux Kurdes par exemple dont les Peshmergas sont appelés au secours des américains en Syrie et ailleurs). L'O.N.U n'opère qu'en vase clos, condamnée par le diktat des détenteurs du veto et les institutions financières internationales (F.M.I, O.M.C, etc.) ne sont là que pour enfoncer «ces peuples insolvables du Sud» comme dirait le suisse Jean Ziegler dans le marécage. Comme les policiers des films hollywoodiens, les occidentaux n'interviennent qu'après que les dégâts sont faits, avec la matraque bien sûr! Le Tiers Monde perd du souffle dans cette longue marche malaisée où des élites prédatrices avalent avec gloutonnerie sans limites les richesses nationales, de mèche avec ces puissances compradores, gardiennes du temple de la liberté. En même temps, les positions médiatiques teintes d'immédiatisme, de la course derrière les clichés, des boucs émissaires et des proies faciles acculent les diasporas d'immigration arabe en Europe et en Amérique à la périphérie des aires de l'intégration dans les pays d'accueil. Les musulmans sont cantonnés dans le rôle de fusible à la nausée des groupuscules néonazis, de l'extrême-droite et des skinheads, la machine de la propagande fonctionne à plein régime.
Le regain de la haine de l'étranger de façon générale et de l'arabe et du musulman en particulier relègue au rang d'oripeau du passé le fameux dialogue de civilisations et foule au pied le principe d'hospitalité. On dirait que l'humanité s'arc-boute sur le vide et se complaît dans un simple rabâchage d'idées reçues. L'hystérie guerrière a anesthésié émotionnellement ces peuples progressistes du nord. La mayonnaise des concepts et des théories-maison au goût salé sert d'ingrédient de base dans la cuisine du grotesque. Le graphisme de pensée linéaire, binaire et primaire de certaines élites occidentales empire la donne, des livres-bidon sans autre teneur que l'animosité et le rejet de l'autre (musulman de préférence, terroriste potentiel) deviennent des best-sellers face à la montée enfiévrée de la misère sociale et de l'ignorance structurée parmi les couches défavorisées de l'Europe-citadelle, détrônant des étals des libraires et des bibliothèques les belles plumes qui prônent la tolérance et l'amour. Le credo de la finance a clochardisé des masses laborieuses à coups de bonus aux responsables de banques, les politiques d'austérité ravagent les économies les plus puissantes, le pessimisme se propage comme une épidémie de la peste. Nous sommes devenus étrangers à nous-mêmes dirait Julia Kristeva dans un monde sans repères quand ces magnats de la finance font la fine bouche, sucent nos os, nous demandent des sacrifices et en redemandent davantage, poussant les uns contre les autres. Le couvercle du cercueil se referme sur nos cœurs aux pouls palpitants, la rançon de la vie est chère.
Notre planète est polluée par les grandes puissances de ce monde que rien ne puisse arrêter, les saisons sont décalées, la sécheresse dévore la flore de l'Afrique, le réchauffement climatique menace la biosphère. Un crime odieux, une barbarie pire que Daech, voire le fascisme ou le nazisme parce que là on se tue par conscience, tranquillement et sans remords, détournant nos yeux du fond des problèmes pour des vétilles. On sombre dans la déception cruelle quand ces «magnanimes» essaient d'amputer le corps musulman gangrené de cet organe «djihadiste» qu'est Daech! Ce poison pourtant «made in outside» et instillé en injections prolongées dans notre anatomie en déréliction.
Quelle découverte et quelle générosité! Faut-il alors condamner cet Occident-là qui nous détruit à chaque fois que l'on essaie de se construire ou ce Daech qui feint combattre ceux qui nous détruisent en nous détruisant encore davantage? A force de céder au vertige de questions, on risque de ravir la vedette à l'absurde camuséen. Notre sentiment d'incompréhensibilité est la résultante d'un grand désarroi. L'hybris, l'arrogance et la démesure les plus abjectes de cet Occident trop pragmatique bascule les foules musulmanes dans l'égarement, la perte des sens et les pulsions intégristes. Nos âpres regrets n'apaiseront pas nos tourments ni ne trouveront d'échos dans ce monde à l'envers où totems et modèles préétablis dévastent les esprits à moins que nous fassions attentions à l'usage des mots. Un lexique juste nous évitera mille et un désastres. Sans doute.


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