Dans le message lu en son nom à la tribune du Xème congrès du FLN par Tahar Khaoua, le frais émoulu ministre chargé des Relations avec le Parlement, Bouteflika s'est qualifié de « président de tous les Algériens » et de ce fait qu'il ne se réclame d'aucune attache partisane. S'il est vrai qu'en tant que président élu il est celui de tous les Algériens, Bouteflika n'en a pas moins gardé plus que des attaches sentimentales avec le parti du FLN dans lequel s'est déroulée sa vie militante. Bien qu'ayant en effet toujours refusé le qualificatif de candidat du FLN, Bouteflika n'a non seulement pas rompu le cordon ombilical le liant à ce parti, mais il a accepté d'en être dans un premier temps le président d'honneur. Depuis jeudi, il en est tout simplement le président doté de prérogatives qui en font l'omnipotent patron. Le chef de l'Etat ne peut désormais prétendre avoir une neutralité au plan partisan. Car si en tant que président honoraire il pouvait réfuter toute implication dans la vie organique du FLN ou dans les conflits dont celui-ci a été secoué, il est maintenant celui qui statutairement va décider et trancher pour ce parti. La question est de savoir pourquoi Bouteflika a décidé d'en finir avec le faux-fuyant d'une présidence honoraire du FLN qui lui permettait tout de même d'entretenir la fiction d'être au-dessus des démêlés et controverses internes au FLN pour prendre la présidence effective du parti, montrant ainsi que s'il est le président du pays il est également le patron du plus grand parti du pays. Son saut effectué ne lui a pas été imposé par les congressistes du FLN. Il résulte d'une opération mûrement réfléchie à son niveau. Qui peut croire que Tahar Khaoua a agi de sa propre initiative en proposant au Xème congrès du FLN de conférer à Bouteflika la présidence pleine et entière du parti et lui aurait ce faisant «forcé la main» ? Il ne fait aucun doute que Bouteflika a décidé de ne plus se contenter de contrôler la première formation politique du pays par le biais d'hommes de « confiance ». Cela au constat que certains de ces hommes de confiance à qui il a confié la mission se sont sentis naître des ambitions qui les ont poussés à se départir à son égard de l'allégeance absolue qu'il en exigeait. Bouteflika, avons-nous écrit hier, est tout à la manœuvre de la succession dont il veut être le grand et principal ordonnateur. Sa prise de contrôle personnelle et directe du FLN appelé à cautionner le scénario qu'il aura écrit est une mesure de précaution destinée à lui permettre d'étouffer toute velléité au sein du parti de s'inscrire contre. Même Saadani qui ne cesse pourtant de faire la preuve de sa totale adhésion au dessein présidentiel n'échappe pas à la méfiance de Bouteflika. Certes, l'appui dont il a eu besoin pour prendre la direction du parti lui a été clairement prodigué par Bouteflika. Lequel n'en a pas moins tenu à délimiter l'autorité sur le parti qu'il lui a concédé en se faisant attribuer le poste de président du parti, fonction qui coiffe le secrétariat général. Présidence à laquelle la révision des statuts du FLN opérée à la hussarde par le Xème congrès confère la réalité de la direction du parti. Saadani se retrouve ainsi certes patron nominal du FLN mais bridé en ses initiatives et prises de position qu'il ne pourra présenter comme étant celles du parti si elles n'ont pas l'approbation de son président. Ce qui se passe au RND n'est rien moins qu'une opération similaire à celle qui vient d'avoir lieu au FLN. Dans ce parti aussi le président et son clan ont décidé de se prémunir de toute surprise qui pourrait en émaner sur la question de la succession telle qu'envisagée par eux.