Rien ne va plus en Algérie, selon la secrétaire générale du Parti des travailleurs. De nombreux signaux font craindre à Mme Louisa Hanoune une «dérive totalitaire» sur le plan politique, accompagnée d'une mise au pas économique en faveur des «oligarchies», le tout sous l'œil bienveillant des «étrangers». Ces aspects ont été longuement développés, hier, lors de son discours d'ouverture de la réunion du Bureau politique du parti. D'emblée, Louisa Hanoune annonce que le PT «ne peut pas se sentir concerné par l'appel du FLN» à la constitution d'une coalition pour défendre le «programme du président de la République». «De quel programme s'agit-il ? Du programme électoral du président dans lequel il a pris des engagements ou de la politique en cours qui est à l'opposé ?», s'interroge la secrétaire générale du parti. Pour elle, ce n'est pas le programme de Bouteflika qu'il faut défendre, mais l'Algérie. «C'est l'Algérie qui est en danger» et qu'il faut «défendre contre les menaces sur la pérennité de l'Etat», dit-elle. Pour le PT, un «changement radical» a lieu depuis une année où la destinée du pays a été «remise à l'oligarchie et aux multinationales». Elle voit dans le communiqué du dernier Conseil des ministres, annonçant l'adoption de la loi de finances 2016, des décisions qui vont dans le sens d'une «austérité contre la majorité» des Algériens et des «avantages fiscaux en faveur de l'oligarchie». Cette austérité va se matérialiser par une «hausse des tarifs de l'électricité, de l'eau et des carburants», ce qui va «aussi» créer une «flambée en chaîne des prix». Le Parti des travailleurs considère aussi que la décision de doubler la taxe d'habitation pour Alger et autres grandes villes du pays est «anticonstitutionnelle». Il voit dans la réduction des budgets de fonctionnement et d'équipement un «danger pour l'emploi» et la «mort certaine pour des centaines d'entreprises privées, notamment dans le secteur du BTP». Le PT estime qu'il y a aussi un «retour vers la privatisation via la Bourse». Pour Louisa Hanoune, la tripartite qui s'ouvre aujourd'hui à Biskra «est un cadre déséquilibré» où il y a «un syndicat en face du patronat et du gouvernement». Mais, dans tous les cas, elle dit ne pas attendre du bien de cette rencontre. «Va-t-elle (la tripartite, ndlr) prendre des décisions en faveur des travailleurs ? Nous en doutons», dit-elle, considérant que «seules les luttes des travailleurs sont en mesure d'assurer les droits». A propos de la décision du gouvernement d'autoriser trois entités privées de construire des usines de sucre, Louisa Hanoune estime que «c'est du pipeau» et que tous les producteurs privés «peuvent s'entendre». Alors que la solution, selon elle, était de «relancer les Enasucre» pour montrer que l'Etat est là pour «s'opposer à tout monopole». La SG du PT appelle aussi à se retirer de l'Accord d'association avec l'UE au lieu de renégocier. EQUILIBRE ROMPU AU SEIN DE L'INSTITUTION MILITAIRE Commentant les derniers changements opérés au DRS, Louisa Hanoune estime que «l'équilibre a été rompu au sein de l'institution militaire». Elle affirme son «grand étonnement» du «communiqué bizarre attribué à la présidence de la République» expliquant les changements au DRS. «Le DRS n'était pas un danger, ni du terrorisme. La dissolution du GIS est-elle en faveur du renforcement de la sécurité ? La dissolution de la section de l'intelligence économique au sein du DRS va-t-elle renforcer la sécurité du pays ?», affirme encore la secrétaire général du PT pour qui «ces décisions sont aux conséquences graves». «Nous sommes d'autant plus inquiets par le silence des autorités algériennes sur la prétendue erreur dans le Journal officiel de la France évoquant la présence de troupes françaises en Algérie. Ça ne peut pas être une erreur. Trois ministres (français) ont signé ce document», affirme-t-elle encore. MADANI MEZRAG N'EST PLUS ENCADRE PAR LE DRS La secrétaire générale du PT s'est aussi exprimée sur l'arrestation du général Benhadid et sur la fermeture de la chaîne El Watan TV. Pour le cas Benhadid, elle estime qu'il y a eu «violation des procédures légales» tout en se disant scandalisée par la manière avec laquelle il a été arrêté. «Nous avons honte que nos généraux, Benhadid et Hassan, soient traités de la sorte», dit-elle en remarquant le «silence des étrangers» sur ces questions. «En octobre 1988, Chadli a assumé les dérives. Maintenant, personne n'a le courage d'assumer», rappelle-t-elle. Elle qualifie de «décision grave» l'interdiction d'El Watan TV, remarquant au passage qu'elle «ne partage pas l'orientation (idéologique) de la chaîne». «On interdit la chaîne de télévision qui fait son travail d'information, alors que le responsable des déclarations personne ne l'inquiète», s'étonne Louisa Hanoune pour qui «Madani Mezrag n'est plus encadré» depuis le «démantèlement du DRS». Louisa Hanoune s'est aussi insurgée contre le viol de la Camerounaise à Oran par des sauvages et du refus des autorités d'enregistrer sa plainte, prétextant sa situation d'immigrée illégale. «Honte aux autorités qui ont permis cela», dit-elle, considérant que cette situation a été permise par le refus d'adopter le texte de loi qui punit la violence contre les femmes. «Cela traduit une position idéologique de l'Etat pour faire plaisir aux obscurantistes», déclare la SG du PT. Par ailleurs, Louisa Hanoune a annoncé la constitution par son parti de «Comités populaires» dans «le respect des opinions politiques des citoyens» pour une «mobilisation nationale contre la prédation» et pour «imposer l'avènement de la démocratie véritable», a-t-elle ajouté.