Le jour même où s'ouvraient à Genève les pourparlers de paix en Syrie et alors qu'à partir de Ryadh le Haut comité de négociations (HCN) composé de représentants d'oppositions syriennes armées ou politiques téléguidées par l'Arabie saoudite et la Turquie claironnait qu'il ne se rendra à Genève et prendra part aux négociations qu'à la condition d'avoir l'assurance que ses exigences « humanitaires » seront prises en compte, nous écrivions qu'il sera bel et bien contraint de s'asseoir à la table des négociations car ses « protecteurs » l'y forceront. Pour sauver la face devant le fait qu'il est assis à la table des négociations malgré qu'il n'a pas été tenu compte de son préalable, le HCN prétend avoir reçu du représentant de l'ONU sous l'égide de laquelle se déroule les pourparlers et de l'Arabie saoudite les « assurances » qui motivent sa présence. En fait, le HCN a été enjoint d'aller à Genève par ses protecteurs saoudiens et turcs eux-mêmes sommés par les Etats-Unis de ne plus faire obstacle à la tenue des pourparlers qu'ils parrainent conjointement avec la Russie et l'approbation de la communauté internationale. Il est confirmé en effet que le secrétaire d'Etat américain John Kerry et par voie de conséquence Washington ne sont plus sur la même longueur d'onde avec Ryadh et Ankara sur la question syrienne, du moins sur la priorité qu'ils estiment être leur objectif immédiat dans le conflit. Les Etats-Unis et Kerry se sont faits à la réalité que la chute de Bachar El Assad et de son régime que l'Arabie saoudite et la Turquie se sont fixée en tant que but prioritaire et qu'eux-mêmes ont un moment entrevue comme la panacée à la sanglante crise syrienne est non seulement loin de se produire, mais que si elle survenait alors que Daech occupe une partie du territoire syrien, ses conséquences en seraient le pire des scénarios qui puisse se produire pour la Syrie, la région et la paix dans le monde. Contrairement à Ryadh et à Ankara, les Etats-Unis ont également perdu la confiance qu'ils ont placée dans l'opposition sponsorisée par ces deux capitales au constat que militairement sur le terrain elle n'est pas parvenue à émerger en tant que force apte à prendre le dessus sur les partisans du régime de Damas malgré les soutiens qu'ils lui ont dispensés en armement, formation et finance et que pire certaines de ses composantes en sont à être des supplétifs de l'organisation terroriste Daech avec laquelle elles ont en partage la doctrine politico-religieuse et les mêmes pratiques et comportement rétrogrades et barbares. Ce constat a fait comprendre aux Etats-Unis qu'ils font fausse route à continuer à miser sur cette opposition dans la lutte qu'ils ont déclarée à Daech et n'entrevoient désormais de succès militaire en Syrie contre cette organisation qu'avec la participation de l'armée du régime syrien. Ils se sont ralliés à cette stratégie que Moscou n'a cessé de leur prôner mais qu'Ankara et Ryadh persistent à rejeter dans « l'intérêt du peuple syrien ». Il leur faut maintenir faire pression sur ces deux capitales pour qu'elles intiment à leurs « protégés » syriens qu'ils ne se contentent pas d'être présents à Genève mais qu'ils négocient véritablement et avec le pragmatisme qu'impose le rapport de force en leur défaveur avec le régime syrien.