Avec l'anarchie qui règne dans le marché de la volaille, il est devenu difficile, voire impossible de réguler cette filière et par conséquent maîtriser les prix. Si le poulet a plumé le consommateur durant la période des grandes chaleurs atteignant jusqu'à 420 DA le kilo pour le poulet de chair, il a connu une légère baisse en septembre où son prix est descendu à 300 DA le kilo pour atteindre ces jours-ci 260 DA. Mais rien n'est encore gagné pour le consommateur puisque durant les deux mois à venir, le marché devrait connaître une crise avec une autre hausse des prix. C'est ce que prédisent les professionnels du secteur qui, eux, restent sceptiques sur la situation de cette filière en l'absence d'une étude scientifique qui soit en mesure de mettre de l'ordre dans le secteur et identifier tous ses acteurs. On a beau justifier l'augmentation des prix par la forte demande en périodes de fêtes et les conditions climatiques, mais ces justificatifs restent superficiels, selon les professionnels du secteur, notamment les aviculteurs, étant donné que le fond du problème qui gangrène cette filière n'est jamais abordé et continue à freiner son développement. L'informel brouille la traçabilité de la volaille De plus en plus, les associations des consommateurs alertent contre les dangers qui guettent les consommateurs en l'absence de traçabilité pour certains aliments qui atterrissent dans nos assiettes. La volaille figure parmi ces produits qui circulent dans le circuit informel et dont on ignore l'origine. Le président du conseil interprofessionnel de la filière avicole de la wilaya d'Oran, M. Hadj Boudaoud, estime que ce qui fait peur de nos jours c'est que «nous ignorons ce que nous mangeons». Pour lui, le consommateur doit être exigeant sur la qualité des produits à consommer car sa santé en dépend. Concernant le marché de la volaille, il explique que «tous les arguments sont bons pour justifier les augmentations des prix. Les fêtes, l'été mais cela n'explique pas le pourquoi de la chose ni le fond du problème». Pour ce professionnel, «il n'est guerre question de réinventer le monde pour maîtriser le marché de la volaille. Il faut juste que l'Etat fasse son travail de contrôle et suivi sanitaire auprès des producteurs et des bouchers de volaille». Mieux encore, souligne le président du conseil avicole, «vu la demande sur ce produit, il est plus correct de faire de la viande blanche et de l'œuf des produits de première nécessité et aussi d'inciter ministère de l'Agriculture et les éleveurs de volaille à s'asseoir autour d'une même table pour discuter des moyens à mettre en place pour maîtriser ce marché livré à l'informel et s'entendre sur un prix de revient fixe et décider ainsi d'une marge de bénéfice qui couvre les charges des éleveurs». Notre interlocuteur plaide pour le retour aux normes dans ce marché qui semble perdre le nord actuellement. «Ce marché doit être régulé avec une étude scientifique. Il faut s'inspirer de ce qui se fait dans d'autres pays pour décider d'un programme d'amélioration de la filière qui réponde aux besoins du marché local». L'intrusion de courtiers dans ce marché, selon certains bouchers de volaille, crée le désordre et fait grimper les prix. Une activité familiale Quant au secrétaire général de cette même organisation, M. Krioua, qui active dans l'élevage de la volaille, il souligne qu'il est impératif de recenser les éleveurs et de les identifier à travers une fiche d'identification afin de lutter contre l'informel. Il est nécessaire, selon ce professionnel, de mettre en valeur cette filière en réglant le problème du foncier agricole et le problème d'agrément. Par l'identification des éleveurs, il y aura récupération d'un grand nombre de professionnels qui activent dans l'informel sachant que cette activité est une activité familiale qui se transmet de génération en génération. Près de 500.000 familles vivent de l'élevage de volaille. Cet éleveur considère aussi qu'il est important de faire un état des lieux des éleveurs, d'identifier les besoins du marché et produire la quantité nécessaire avec établissement d'un cahier des charges pour la vente du poulet. «C'est ce qui se fait dans les pays voisins tels la Tunisie et le Maroc», a précisé le secrétaire général du conseil interprofessionnel de la filière avicole. Concernant les prix, les deux professionnels estiment qu'il faut s'attendre à une augmentation du prix du poulet de chair dans deux mois pour insuffisance de la production. Avec les pertes que les éleveurs ont enregistrées durant la saison estivale à cause de la chaleur et des maladies dans certaines régions du pays, les répercussions seront visibles les deux prochains mois. En effet, actuellement le prix du poulet aux abattoirs est de 240 DA le kilo. Le poulet est vendu en poids vif chez les éleveurs à 155 DA le kilo. Chez les bouchers, le poulet est proposé à 260 DA le kilo. Pour M. Krioua, à 155 DA, l'éleveur n'est pas gagnant vu le prix de l'aliment qui ne cesse d'augmenter. A 180 DA fixe le kilo en poids vif, l'éleveur couvre ses frais, selon ce professionnel. Du côté du groupement avicole de l'ouest (ORAVIO), on affirme cependant que les perturbations dans les prix de la volaille sont dues au problème de disponibilité du produit, selon un représentant de cette entreprise. Souvent, le marché enregistre une insuffisance d'approvisionnement à cause des épidémies qui se déclenchent dans certaines régions et qui freinent considérablement la production. Dans cette entreprise publique, les prix sont stables. Pour le représentant de l'ORAVIO, le problème du marché de la volaille est l'informel et l'abattage clandestin qui rendent impossible le suivi et la traçabilité du produit. Un phénomène qui menace actuellement la santé publique.