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2017 : le gouvernement sortira-t-il, ou pas, de la logique de l'endettement extérieur ?
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 29 - 12 - 2016

Il faut l'admettre, nos rapports avec le FMI seront toujours entachés de crainte, tant il symbolise la crise et nous renvoie à la face notre mauvaise gestion, la faillite de nos politiques et la limite des compétences de nos gouvernants ! A contrario, il faut aussi reconnaître que les thérapies du FMI ne sont pas sans douleur pour les populations. Petit rappel Dans les années 1990, le pays était non seulement étranglé par une lourde dette extérieure, mais faisait face également à une situation interne catastrophique, tant au plan social, qu'au plan économique ou sécuritaire. Le FMI exigeait du gouvernement algérien d'alors, le rééchelonnement de sa dette et le libéralisme de son économie, à grand renfort de réformes qui n'ont fait qu'appauvrir la population. Suite à l'application du Plan d'Ajustement Structurel (PAS) imposé par le même FMI, quelque 1 010 entreprises ont été liquidées et plusieurs centaines de milliers de salariés jetés à la rue. Un désastre socio-économique, sur fond de destructions causées par le terrorisme islamiste, désastre dont le pays ne s'est jamais relevé, et que la bonne conjoncture pétrolière des années 2000 et l'embellie financière qui s'en est suivie n'ont pu réparer. La peur du FMI, est-elle purement idéologique ? Nos rapports avec cette institution seront toujours entachés de crainte, tant elle symbolise la crise et nous renvoie à la face, notre mauvaise gestion, la faillite de nos politiques et la limite des compétences de nos gouvernants. Il faut l'admettre aussi, les thérapies du FMI ne sont pas sans douleur pour les populations. Regardez la Grèce par exemple, qui n'en finit pas de manger son pain noir, allant de P.A.S à P.A.S (Plan d'ajustement social) et de prêt en prêt, avec, planant sur sa tête, la menace d'une exclusion de la zone euro et l'appauvrissement de ses couches sociales. Prenez également l'exemple de l'Argentine, où le « désamour » se confirme entre ce pays et le FMI, le premier accusant l'institution extra-financière, d'être responsable de sa faillite, même si, depuis 2006, il est parvenu à rembourser sa dette de 95 milliards de dollars, déjouant ainsi toutes les recommandations de cette instance et renvoyant, au passage, les experts de l'institution à leurs chères études. Et le troisième exemple se trouve à Chypre, cette ile qui défraie actuellement la chronique financière suite au tsunami qui a frappé, durement, ses banques. Dans ce pays en effet, l'Europe des riches a fait un pas de plus dans l'expérimentation des mesures dures, visant à tester les réactions internes, celles des populations locales, notamment. Dans l'île, les gens étaient affolés, car le sauvetage des banques a été décidé au prix d'une taxe, à effet immédiat, de 6.75% sur les dépôts bancaires pour les sommes inférieures à 100.000 euros et de 9.9%, au-delà. Ils se sont précités pour retirer leurs maigres économies, craignant d'autres mesures plus drastiques, voire même, une faillite du système banquier chypriote, ce qui signifierait, à terme, la ruine des petits déposants, le chômage à grande échelle et la précarité, tant sociale que politique. Le remboursement, par anticipation, de la dette extérieure algérienne Tout comme le Brésil, l'Argentine ou encore la Russie, l'Algérie a utilisé ses réserves de change pour procéder à des remboursements anticipés de sa dette extérieure. Si, a priori, ce désendettement peut apparaître comme un choix positif dès lors que les créanciers avaient utilisé la dette comme moyen de pression pour maintenir leur domination et profiter des ressources naturelles du pays, à l'instar de tous les pays du Sud endettés, les critiques sur ce choix ont été multiples. Il suffit, pour nos besoins, de n'en citer que deux : 1. Ces paiements anticipés constituent un transfert de richesses supplémentaires du Sud vers le Nord, même si les créanciers perdent de l'argent en ne touchant plus les intérêts liés aux mensualités 2. Le désendettement anticipé ne signifie pas que le pays n'a plus l'intention de recourir aux crédits extérieurs ; au contraire, à travers ces remboursements, il vise surtout à améliorer son « rating » lui permettant de contracter de nouveaux prêts à des taux plus avantageux.
Les urgences du gouvernement Sellal V
L'Algérie, grâce aux recettes pétrolières, réinjecte tous les ans 10 milliards de dollars en transferts sociaux : logements gratuits, assurance chômage, dépenses de santé etc. Il est connu que la sortie d'une politique de subvention des prix est toujours problématique, surtout que l'on a ni le loisir d'en fixer les termes, encore moins les délais dont on dispose pour le faire. Les enjeux sont les suivants : 1. Le social à prendre en charge, la rue à apaiser et une opinion interne à satisfaire. 2. Une inflation endogène incontrôlable et des moyens financiers qui tendent à se limiter, baisse du prix du baril de pétrole oblige. 3. Et les injonctions du binôme FMI-OMC appelant à l'abandon des subventions.
Avec la crise, que fait le gouvernement ?
Pour avoir longtemps sous-estimé les répercussions de la chute du prix du baril de pétrole sur la situation financière du pays, le gouvernement se retrouve, aujourd'hui, acculé à rechercher de «l'argent frais », ou de « l'argent qui dort » nécessaire au fonctionnement de l'économie. Pour se rattraper, il a décidé d'aller vers la « bancarisation » de l'argent de l'informel. Amnistie fiscale, ont dit certains observateurs de la vie économique et tous ceux qui, dans l'opposition, se réjouissent des difficultés du gouvernement ! « Formule contre productive », répètent, à l'envi, les experts : « elle ne présente aucun moyen de pression pour réellement résorber ou bancariser l'argent de l'informel. Elle ne servira qu'à ceux qui vont se précipiter aux guichets des banques pour blanchir leur argent ». Pour d'autres, la formule n'est pas alléchante dans le sens où elle ne va pas bouleverser les procédures bancaires de gestion et de fluctuation de l'argent. Les plus radicaux persistent à penser qu'il faut aller vers « le changement des billets » pour éponger tout l'argent de l'informel ! De l'avis des experts, il faut passer à autre chose et admettre l'échec de la tentative de bancarisation de l'argent informel, tout comme celle se rapportant à « l'emprunt obligataire ». C'était d'ailleurs prévisible : la sacro-sainte confiance du peuple, toutes couches sociales confondues est une base fondamentale pour un choix économique de cette envergure. Ce que nos gouvernants n'ont pas pris en compte ! Le ministre des finances, de passage à la radio Chaine 3, a tenu à rassurer : « les clignotants ne sont pas au rouge ! ». Le gouvernement, tout aussi optimiste, espère une reprise des cours à partir de 2020/2021, dès lors que l'Agence Internationale de l'Energie (AIE) dit que le pétrole remontera à 80$ à cette date. En clair, le pays pourra résister jusqu'à 2018/2019 grâce à ses réserves de change qui s'élèvent à 143 milliards de dollars. Entre temps, même si le baril de pétrole est passé au dessus de la barre des 50$, grâce (un petit peu) à la persévérance de l'homme de l'année, Noureddine Bouterfa, le gouvernement d'Abdelmalek Sellal, continue à faire face à un énorme déficit budgétaire : Pourra-t-il, par exemple, éviter le recours à l'endettement externe pour financer ses besoins ? Des entreprises comme Sonelgaz ou Sonatrach ont besoin d'investir : c'est avec des dollars et non pas des dinars qu'elles pourront le faire ! Le gouvernement le sait, en l'absence d'un relèvement miraculeux des cours du pétrole, à 70$ voire plus, il ne dispose plus que de deux options pour pouvoir disposer de ressources financières conséquentes : 1. Recourir à l'endettement intérieur (bancarisation de l'argent de l'informel et lancement de l'emprunt obligataire) 2. Faire le choix d'emprunter à nouveau le périlleux chemin de l'endettement extérieur Le FMI, pointe son nez !
De ce qui précède, peut-on affirmer que le gouvernement actuel est en mesure de maintenir une inflation endogène incontrôlable, avec des moyens financiers qui tendent à se limiter, baisse du prix du baril de pétrole oblige et répondre aux injonctions du binôme FMI-OMC appelant à l'abandon des subventions et de la règle du 51/49 ? Le FMI, par la voix de ses représentants, a appelé Alger à faire face au choc pétrolier, jugé de « grande ampleur ». Une mauvaise conjoncture qui devra nécessiter un réel assainissement des dépenses publiques, « car le contrechoc pétrolier pèse sur la capacité de l'Etat à continuer à financer au même niveau qu'auparavant ». L'institution financière a également évoqué la nécessité de « mettre en œuvre des réformes à même de déplacer le centre de gravité économique du secteur public vers le privé de manière à s'affranchir de la dépendance aux hydrocarbures et amorcer une réelle diversification industrielle ». En définitive, le vrai conseil qui vaille a été donné par le représentant du FMI en visite à Alger, Jean-François Dauphin qui a déclaré : «l'endettement de l'Algérie est non seulement souhaitable, mais aussi inévitable pour financer tous les défis qui l'attendent ! ». Les prévisions de croissance du FMI pour l'Algérie laissaient entrevoir, pourtant, une amélioration jusqu'en 2021 malgré la baisse des cours de brut qui semble se maintenir dans la durée. En 2015, le PIB réel de l'Algérie a progressé de 3,9%, selon le FMI qui tablait sur une croissance de 3,4% en 2016 et de 2,9% en 2017. La croissance rebondira à partir de 2019 pour atteindre 3,4% en 2021, selon les mêmes projections du FMI. Le gouvernement sortira-t-il, ou pas, de la logique de l'endettement extérieur ? Il refusait, jusqu'à présent, tout recours au marché international, a en définitive, sollicité et obtenu un prêt de 900 millions d'euros de la Banque africaine de développement (BAD). Il s'agit du premier emprunt du pays auprès de cette institution dont Alger est l'un des premiers bailleurs au niveau du continent. En attendant, la cacophonie ambiante et les déclarations ambivalentes et contradictoires des membres du gouvernement en charge des secteurs clés de l'économie, ne présagent rien de bon : quand les uns parlent de lever de fond en interne, d'autres préconisent des emprunts extérieurs ! A ce stade de la réflexion, on est amené à croire qu'ils taperont dans les deux registres ! La mobilisation de l'épargne interne est la première étape pour faire face à la crise. Tout le monde en convient, il y a un potentiel énorme et un gisement d'épargne privée et publique dans notre pays, a dit Mustapha Mekidèche, mais il faut se préparer à un retour à l'endettement extérieur si le pétrole ne se redresse pas dans un délai de 3 ans !
Un accord avec le FMI, dès 2017, serait-il une bonne chose pour l'Algérie ? Trois bonnes raisons sont avancées par certains experts : La première est financière : les financements du FMI sont assortis de conditions avantageuses sur le plan des taux d'intérêt et des délais de remboursement. La deuxième raison, économique, est liée à l'assistance technique du FMI qui est susceptible de donner un contenu concret et opérationnel au programme des réformes. La troisième raison est politique : 2019 est une année cruciale pour le pays, chargée d'incertitude, voire d'instabilité en raison de la fin de mandat du président de la République. En conséquence, la signature d'un accord à moyen terme avec le FMI sur un programme précis de réformes économiques et partant, un calendrier contraignant seront de nature à rassurer les investisseurs étrangers. Conclusion : L'emprunt n'est pas une hérésie quand celui qui en bénéficie fait preuve de bonne gestion ; il le devient quand l'argent ne sert, en définitive, qu'à alimenter des tubes digestifs.


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