C'est soudain et quasi simultané : beaucoup d'anciens responsables, entre PDG, ministres et surtout des Premiers ministres, sont sortis de leur douce retraite et annoncer, pour enfoncer le gouvernement, que le pays va connaître bientôt des moments difficiles. La présentation au Parlement par le Premier ministre de son plan d'action et «sa» solution pour contourner la crise financière induite par la baisse de plus de moitié depuis 2014 des recettes pétrolières a fait sortir de leur silence d'anciens responsables qui, tous, ont rejeté en bloc le recours d'Ahmed Ouyahia à la planche à billets, plutôt que d'autres solutions moins onéreuses politiquement, dont le recours à l'endettement extérieur, ce que font tous les pays ayant de solides actifs. Pourquoi un tel intérêt, et à ce moment précis, à ce qui se passe en Algérie où les planches de survie et les canots de sauvetage ont été sortis ? Après un ex-Premier ministre, qui a promis aux Algériens une inflation à quatre chiffres dans le cas d'un recours du gouvernement au financement non conventionnel, un ex-ministre du Commerce revendique tout haut «une révolution pacifique» pour changer de locataire à El Mouradia, ou un ex-président de l'APN qui, lui, estime qu'un 5ème mandat est possible, et jusqu'à un ex-chef de gouvernement et ancien «patron» de Sonatrach qui accuse Ouyahia d'arroser les Algériens de contre-vérités. Un tir groupé en fait non pas sur un gouvernement qui vient juste de prendre la main, mais sur un système de gouvernance. Est-il innocent, fortuit, sans objectifs ? Le doute est permis, mais au moins un tel déballage de vérités et de contre-vérités éclaire un peu plus l'opinion publique sur la manière peu honorable dont les affaires de la Nation avaient été traitées depuis la mort de Houari Boumediene. Car si un ex-chef de gouvernement accuse l'actuel ministre de mensonge et de mener le pays, comme le Titanic, vers l'iceberg, il oublie que le pétrole a toujours été, même de son temps, un alibi pour justifier toutes les dérives politiques. Car si on reproche à l'actuel gouvernement et à ceux qui l'ont précédé de mentir aux Algériens en leur faisant croire que la crise actuelle est le résultat tout simplement de la baisse des prix du pétrole, et non pas de l'incapacité du pays à exporter autre chose que des hydrocarbures, on oublie de dire cependant que le pays était en cessation de paiement déjà en 1980 et au début des années 1990, où le brut avait atteint les 10 dollars/baril, ce qui a ruiné le pays et l'a mené à frapper aux portes du FMI. Les gouvernants de cette époque avaient eux également menti aux Algériens en ne leur disant pas qu'ils se sont endettés et que le service de la dette culminait à près de 70% des recettes de pétrole. On a menti aux Algériens sur les termes de l'accord avec le FMI et on ne leur a pas dit ce qu'ils allaient subir. La suite on la connaît, des dizaines de milliers de licenciements, d'entreprises fermées, de drames familiaux, des années «noires». L'actuelle décennie est-elle plus noire que celles des années précédentes ? Il est permis d'en douter, ne serait-ce que par rapport aux mensonges servis sur des plateaux TV aux Algériens, les derniers informés sur la situation catastrophique de leur pays. Toutes les voix discordantes actuelles, qui culpabilisent tout et n'importe quoi, qui font dans la surenchère politique et de sombres prévisions économiques, comme si les Algériens méritaient ainsi une autre torture, morale celle-là, n'avaient pas fait avancer les choses lorsqu'elles avaient les commandes du pays entre leurs mains. Quel intérêt y a-t-il à achever un gouvernement, honni par la classe politique, qui est déjà aux abois et convaincu que sa tâche est pratiquement «mission impossible» avant même de commencer son travail ? 2019 ? Et après ?