Ce matin, les Egyptiens se rendent aux urnes en vue d'élire leur président. L'issue du scrutin est connue par avance, le maréchal Abdel Fattah Al Sissi, chef de l'Etat en exercice, qui postule à sa reconduction pour un second mandat en sera à coup sûr le «vainqueur». Pour se prémunir contre toute mauvaise surprise, Al Sissi s'est arrangé pour éliminer de la compétition électorale présidentielle les candidats susceptibles de lui faire de l'ombre en empêchant que le scrutin tourne au plébiscite en faveur de sa réélection. Arrivé au pouvoir par un coup d'Etat militaire qui a mis fin au règne de l'islamiste Mohammed Morsi et de la confrérie des Frères musulmans à laquelle il appartient, le maréchal président a incontestablement bénéficié d'une grande popularité au début de son accession à la plus haute fonction du pays. Ce dont après avoir établi de nouvelles règles politiques et électorales en Egypte, il a profité pour obtenir de l'électoral égyptien son élection « triomphale » pour un premier mandat. Même s'il reste indéniablement populaire auprès d'une certaine frange de la population égyptienne pour laquelle il serait l'homme fort dont le pays a besoin pour ne pas retomber sous la coupe des Frères musulmans ou de toutes autres factions islamistes, le président candidat a néanmoins beaucoup déçu en mettant en place un régime qui a tourné le dos aux aspirations de la « révolution » de la place « Tahrir » de 2011 et du mouvement populaire qui s'était élevé ensuite contre la dérive autocratique et intolérante de la présidence Morsi et des Frères musulmans et a offert à l'armée sous son commandement l'alibi à son coup d'Etat qui l'a propulsé aux commandes du pays. Al Sissi n'a fait en fait que reproduire en l'accentuant le régime autocratique que les Egyptiens ont vécu du temps de Hosni Moubarak et qui sous son autorité s'est avéré incapable de relever le défi de sortir l'Egypte de la crise économique et sociale dont pâtissent terriblement les citoyens dont l'écrasante majorité en est réduite à l'extrême paupérisation. Al Sissi a de plus éteint l'espoir de démocratie qui s'est exprimé place « Tahrir » en prenant prétexte de la confrontation qui l'oppose à la rébellion islamiste armée dont le pays est le théâtre depuis la destitution du président Mohammed Morsi. Sous le paravent de cette contestation, le maréchal président et le régime militaire dont il est l'émanation ont entrepris d'étouffer toute forme d'opposition même celles qui tout en contestant leur dérive autocratique n'en soutiennent pas moins le bien-fondé de leur politique à l'égard du courant islamique qui entretient la rébellion armée. L'élection présidentielle dont le premier tour se tient aujourd'hui et demain constitue pour les observateurs politiques le baromètre qui établira ce qu'il reste à Al Sissi et à son régime de soutiens dans la société égyptienne. De ce point de vue, ce ne sera pas la réélection du président candidat qu'ils savent acquise par avance qui va en être l'indicateur pour eux, mais le taux de participation des électeurs au scrutin. D'autant que pour une fois d'accord les Frères musulmans et les courants politiques hors régime qui leur sont opposés ont appelé au boycott de ce scrutin. De toute manière, la candidature pour un second mandat de Abdel Fattah Al Sissi a sonné le glas pour la parenthèse ouverte en Egypte par la révolution de la place « Tahrir », tant le maréchal président s'est franchement démarqué de ses revendications et fait la preuve de sa détermination à les empêcher de ressurgir au sein de la société égyptienne.