Les manifestations de joie que des milliers d'Algériens avaient exprimées, mardi soir, dans plusieurs villes du pays, après l'annonce de la démission du Président Bouteflika, devraient se confirmer ce vendredi. L'annonce du départ du président ne sera pas une fin en soi, puisque déjà on annonce et les services de sécurité le prévoient également, des manifestations gigantesques ce vendredi, le septième depuis le début, le 22 février dernier, de la contestation contre le 5ème mandat. Par la suite la révolte citoyenne a changé de fusil d'épaule pour rejeter l'intention du président de prolonger le 4ème mandat et d'aller vers une transition qui mettrait, sous le boisseau, les revendications populaires pour le changement du système. Vendredi 5 avril, sera donc le 7ème que le hirak' algérien va vivre avec au menu des manifestations et des marches populaires pacifiques, d'abord pour fêter le départ du président, et donc une victoire du peuple contre le pouvoir, ensuite pour maintenir la pression pour la poursuite du changement de régime. Les départs du gouvernement Bedoui, ainsi que celui du président du Conseil de la Nation, Abdelkader Bensalah seront très, certainement, revendiqués par les manifestants. En effet, la nomination et la composition du nouveau gouvernement ont été rejetées par les Algériens, qui estiment que ce gouvernement est illégitime et n'a aucune crédibilité. Même scénario pour Bensalah. D'autant que ces deux institutions ont été l'œuvre de Bouteflika, qui a d'abord appelé son Premier ministre qu'il a nommé le 11 mars dernier à constituer un gouvernement « de larges compétences », ensuite à faire émerger Bensalah à la tête, provisoirement du pays, pendant les trois prochains mois en décidant de démissionner. Or, les Algériens, qui ont toujours revendiqué le départ du système et tous ses hommes, y compris les présidents des deux chambres du Parlement, ainsi que le gouvernement, ne vont pas rater l'occasion de sortir en masse ce vendredi 5 avril, pour rappeler une de leurs revendications, qui est « dégagez tous ». Comme il est, également, à prévoir que de nouveaux slogans vont être confectionnés par ces marcheurs algériens, et cette fois-ci, il est prévisible de voir des pancartes ou des banderoles vantant les mérites de l'Armée, tandis que d'autres seront moins magnanimes avec le président démissionnaire. En fait, les Algériens, depuis ce 22 février, ont appris non seulement à donner des couleurs et des sentiments à leurs revendications, mais ont pris surtout goût à ces rassemblements populaires jamais enregistrés depuis l'indépendance du pays. C'est comme si tous les Algériens, hommes et femmes, jeunes et vieux, veulent réinvestir la politique, qu'ils ont trop longtemps délaissée, pour se la rapproprier de nouveau, en exigeant, à travers des marches impressionnantes de par le nombre des participants, que les responsables de la banqueroute économique et politique du pays partent. Et, si possible, en « passant à la caisse ». La mise sous mandat de dépôt de l'ex-patron des patrons Ali Haddad, et le déclenchement de procédures judiciaires à l'encontre d'autres prétendument « hommes d'affaires », sera très certainement au-devant des slogans qui sont actuellement préparés par ces, désormais, centaines de milliers, sinon ces millions de manifestants pour le départ du pouvoir. Beaucoup d'hommes politiques sont à prévoir pour marcher côte à côte avec les manifestants. Il serait intéressant de suivre cette fois-ci le « tempo » et l'esprit de ces slogans, ils donnent, généralement, de bonnes indications sur l'état d'esprit et l'humeur de l'Algérie profonde et celle des villes.