A moins d'opter pour un référendum d'initiative citoyenne, piloté par une commission indépendante de compétences et de sages, désignée par les membres du Hirak par un vote ouvert via les réseaux sociaux, il n'y a pas d'issue possible à l'horizon pour l'impasse actuelle. Décriés par la rue, les officiels du pays n'ont ni le charisme ni la probité morale ou intellectuelle pour mener à son terme une période de transition digne de ce nom. Le manque de crédibilité du clan présidentiel, déjà à la peine après la démission de Bouteflika, donne un avant-goût de fiasco pour toute démarche venant d'en haut. Faible et agonisant, le système dans son ensemble est incapable de secréter aujourd'hui une alternative fiable et consensuelle. En train de s'écrouler peu à peu, celui-ci joue son va-tout en se servant d'intox et de récupération alors que ses piliers ne retiennent même pas son propre toit ! L'Algérie est en pleine dissidence citoyenne et le moindre faux pas peut coûter cher. Cela est d'autant plus inquiétant que Bouteflika est parti, en nous laissant un pays gravement malade, tel qu'il l'a trouvé d'ailleurs en 1999, sinon pire, avec en plus une corruption endémique consacrée en sœur jumelle de la machinerie de l'establishment, des institutions symboliquement détruites, des caisses vides, des monstres boulimiques aux bras longs, un peu partout dans les appareils d'Etat. Nettoyer les écuries d'Augias n'est pas chose facile et tenter de faire du neuf avec du vieux semble peu fructueux et surtout en déphasage avec les revendications de la base. Mis au pied du mur, les maîtres du moment essaient autre chose, comprendre «dribbler» avec la volonté populaire pour contourner le branle-bas de combat de la rue, mais en vain. Le mépris manifesté vis-à-vis du peuple, en particulier ces vingt dernières années, est tel que toutes les digues de la peur sont fissurées. C'est pourquoi, la barre des revendications augmente au plus haut point, de semaine en semaine, suivant le rythme des actes de la protesta. En tout cas, la solution à la crise est entre les mains des Algériens, et seuls eux, ont le droit de décider de ce qui leur convient, de s'autodéterminer. La situation est critique et le Chef d'état-major a beau rassurer, il est aujourd'hui quasiment inaudible. Enfin, c'est quoi le changement voulu par la rue ? Sitôt la question posée, les réponses pleuvent. Elles tombent néanmoins en ordre dispersé, débordant parfois de sincérité et dégoulinant de mauvaise foi. Mais personne ne se tient coi. Tout le monde y va de sa petite idée, qu'il exprime à grands cris. Le changement, c'est la volonté de tous contre le diktat de certains privilégiés tapis dans l'ombre, disons-le, les fameux « les décideurs ».