De l'homme fort du pays, le chef de l'état-major de l'armée qui a mis l'accent sur la nécessité de convenir à une solution de la crise politique dans les plus brefs délais, il était attendu qu'il démontre que le pouvoir réel qu'il incarne fasse le geste qui débloquerait la situation d'impasse dans laquelle est le pays du fait que le peuple refuse celle qu'on veut lui imposer sous prétexte de légalisme constitutionnel. Ce geste de Gaïd Salah, véritable détenteur du pouvoir en cette période exceptionnelle que travers l'Algérie, aurait pu consister en l'ouverture d'une concertation directe entre l'institution militaire et des acteurs dûment mandatés par le mouvement citoyen et les forces politiques qui partagent les revendications de ce dernier. Le scrupule qu'a l'institution militaire à vouloir que la solution à la crise ne sorte pas du cadre constitutionnel afin de ne pas prêter le flanc à l'accusation d'avoir confisqué le pouvoir doit tomber du moment que le peuple souverain, la classe politique dans sa quasi-totalité l'y poussent. Au lieu de cela, elle a donné son onction à une initiative dilatoire de la part de Abdelkader Bensalah consistant en la tenue d'une conférence nationale ayant pour objet la composition d'une instance indépendante qui serait en charge de veiller à la transparence et à la régularité de l'élection présidentielle censée avoir lieu le 4 juillet conformément à la feuille de route que fixe le cadre constitutionnel à la présidence intérimaire de l'Etat à laquelle il a été investi. Cette démarche n'est que perte de temps car celui qui l'incarne est unanimement disqualifié et son départ revendiqué en préalable d'une avancée vers une solution consensuelle. Persister à mettre en avant Bensalah pour la recherche de cette solution équivaut à faire comprendre au mouvement citoyen qu'il lui faut composer avec les résidus du régime dont il ne veut plus. Ce à quoi il n'est pas près de consentir même s'il y a effectivement nécessité impérieuse de dépasser la situation d'impasse dont Gaïd Salah a appelé à en sortir dans les plus brefs délais. En renonçant à sa revendication du départ de tous les résidus du régime Bouteflika encore en place à des postes névralgiques, le mouvement citoyen sait qu'il devra faire son deuil de l'aspiration populaire à l'instauration d'une république bâtie sur la primauté de la souveraineté du peuple, un Etat de droit et le respect des règles de la démocratie. Des initiatives comme celle lancée par Bensalah visent à tester sa détermination à ne pas se laisser déposséder des avancées que son insurrection citoyenne a fait faire à cette aspiration.