Le président de la République reçoit le ministre mauritanien de la Défense    Le Général d'Armée Saïd Chanegriha reçoit le ministre mauritanien de la Défense    Projet de centrale électrique d'Ain Oussara: l'achèvement des travaux confiés à un groupe chinois    Sonatrach participe au forum algéro-américain de l'Energie 2025 à Houston    L'ICT Africa Summit 2025 en avril à Alger    Ghaza: le bilan de l'agression génocidaire sioniste s'alourdit à 51.025 martyrs et 116.432 blessés    Journée du prisonnier palestinien: des conditions de détention horribles et des maladies mortelles    Foot/formation des préparateurs physiques: début du 4ème module à Tipasa    Baccalauréat professionnel: ouverture de 5 filières principales en septembre    Education: rencontres entre la tutelle et les représentants syndicaux sur le statut particulier et le régime indemnitaire    Rafales de vents jusqu'à jeudi dans plusieurs wilayas du pays    Journée du Savoir: la chercheuse Nachida Kasbadji et la moudjahida Farida Lebaâl distinguées    Un risque de dévaster les économies les plus vulnérables    Ouverture officielle de l'appel à candidatures algériennes    Les dernières pluies sauvent les céréales    Plus de 3.600 véhicules volés en 2024 !    Les conditions d'un produit intérieur brut de 400 milliards de dollars et d'une production de 200 milliards de m3 gazeux 2028/2030    « Dévoilez vos talents avec Ooredoo ! »    Le ministre des Moudjahidine rend visite à la moudjahida Meriem Ben Mohamed    "Cirta court-métrage": clôture de la manifestation avec la consécration du film "Il était une fois"    Le Quai d'Orsay et le lobby pro-israélien, principaux soutiens de Boualem Sansal    «Je reviendrai plus fort et meilleur qu'avant»    Un bilan qui promet    Lorsque le stratagème de l'ALN l'emporte face à l'arsenal militaire colonial    Décision de Paris de demander à 12 agents consulaires algériens de quitter le territoire français: Alger prend acte    Foot/ Coupe d'Algérie 2024-2025 (1/2 finale) : l'USMA donne rendez-vous au CRB pour une finale passionnante    Jeux scolaires africains 2025 : l'Algérie fin prête à accueillir cet événement continental    La crédibilité de la justice se mesure à l'aune du degré d'exécution des jugements civils et pénaux rendus    L'Algérie obtient avec brio un siège au Conseil de paix et de sécurité de l'UA    L'OPGI relance les retardataires à Relizane    Des demi-finales et une affiche    La corruption est partout dans le royaume    Participation de 12 œuvres cinématographiques    Hamlaoui présente trois projets d'aide pour les femmes du mouvement associatif    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    La Coquette se refait une beauté    Un rempart nommé ANP    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    Création «prochaine» de délégations de wilayas de la société civile    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Enseignements tunisiens
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 05 - 08 - 2021

Il est encore trop tôt pour connaître les conséquences définitives du coup de force institutionnel du président tunisien Kaïs Saïed (1). Dix jours après sa décision d'appliquer l'article 80 de la Constitution en concentrant tous les pouvoirs entre ses mains, la situation est loin d'être décantée. Accablés par la crise économique et sanitaire, révulsés par le comportement erratique d'une classe politique en-dessous de tout, les Tunisiens dans leur grande majorité ont applaudi à l'offensive du président (2). Personne ne pleurera l'ancien chef du gouvernement Hichem Mechichi - pourtant nommé par Kaïs Saïed, il faut le rappeler - et personne ne regrettera les comportements égoïstes et obscènes de parlementaires désormais privés de leur immunité. Mais le président doit maintenant tenir ses promesses de changement alors qu'au même moment, signe manifeste de la désespérance de la population, l'immigration clandestine à destination de l'Europe reprend en force.
Passons rapidement sur le débat de la légalité de ce tour de passe-passe constitutionnel. Nombre d'experts tunisiens estiment que l'article 80 ne pouvait être appliqué en raison de l'absence d'une Cour constitutionnelle censée adouber la décision présidentielle. De même, cet article n'est prévu que pour les situations de « péril imminent » ce qui reste à prouver dans le cas présent. D'autres questions se posent : que se passera-t-il après le 25 août, date théorique de la fin de la situation d'exception ? Et, d'ici là, que fera le parti Ennahda qui est le grand perdant de cet épisode politique ? Les prochaines semaines nous le diront et l'inconnue est d'autant plus grande que le président ne dispose pas d'un parti capable de relayer son action.
En attendant, il est un enseignement intéressant que l'on peut tirer de cette crise. A l'origine, la nouvelle Constitution tunisienne a été pensée pour éviter les erreurs du passé et empêcher l'émergence d'un pouvoir personnel autoritaire. En clair, pas de nouveau Habib Bourguiba (surtout celui de la période 1970-1987) et encore moins de Zine El Abidine Ben Ali (1987-2011). Cette question illustre un vieux débat fondamental concernant le monde arabe.
Pouvoir présidentiel fort ou régime parlementaire ? Risque d'autoritarisme ou risque de mainmise des partis ? La Tunisie a opté pour la seconde solution, ce que le président KaïsSaïed n'accepte pas, persuadé que cette option ouvre la voie à d'interminables joutes politiciennes qui finissent par bloquer la vie parlementaire et empêcher le vote de réformes vitales pour l'avenir du pays.
Nombre de Tunisiens lui donnent raison. Faut-il pour autant en conclure que le régime présidentiel est le plus approprié pour les pays arabes ?
Depuis 2011, la Tunisie est un laboratoire dont les expériences sont suivies avec intérêt.
Le comportement à venir de Kaïs Saïed sera donc examiné à la loupe. On guettera ses premiers accrocs autoritaristes d'autant qu'il n'existe aujourd'hui aucun contrepoids à son pouvoir. Bien au contraire, fidèles à une certaine tradition de servilité, on ne compte pas les laudateurs qui, hier encore, disaient pis que pendre de lui. Laudateurs mais pas téméraires puisque le poste de chef de gouvernement peine à trouver preneur...
L'autre grand enseignement est, bien sûr, l'échec d'Ennahda. Disposant de 52 sièges sur 217 au parlement, ce parti constituait jusqu'au 25 juillet l'élément-clé de la vie politique tunisienne. Impossible de faire sans lui, impossible de composer un gouvernement sans son accord, impossible de voter une réforme sans son aval, etc. On a beaucoup dit que la Tunisie démontre depuis 2011 qu'il est possible d'intégrer les islamistes au jeu politique - contrairement à la funeste expérience algérienne des années 1990.
On peut dire aujourd'hui qu'Ennahda a prouvé que ce n'est pas parce que ces partis sont intégrés qu'ils feront mieux que les autres. On a même la preuve que leur prestige et le crédit - dont se parait Ennahda en raison de décennies de persécutions -ne résistent pas à l'épreuve du temps et de l'exercice du pouvoir. Nombre d'électeurs de ce parti s'en détournent aujourd'hui citant pêle-mêle l'incompétence de certains de ses élus mais aussi son clientélisme, illustré notamment lors des pénuries d'oxygène.
Certes, cela ne signifie pas qu'Ennahada est en déclin. D'ailleurs, si Kaïs Saïed n'a pas décidé de dissoudre le parlement et d'appeler à de nouvelles élections, c'est parce qu'il sait que l'influence électorale des islamistes demeure et que cela n'aurait donné aucun changement majeur dans l'équilibre des forces au parlement. Une débâcle électorale d'Ennahda aurait pourtant été une meilleure solution que l'article 80 ; cela aurait démontré que l'on peut se débarrasser des islamistes autrement que par un coup de force, fut-il constitutionnel. Mais le président tunisien n'a pas voulu prendre le risque de reconduire la même situation. Pour autant, il faut se garder, du moins pour l'heure, de faire un parallèle avec ce qui s'est passé en Egypte. En 2013, les militaires égyptiens ont sciemment créé le contexte délétère (pénuries, rumeurs, etc.) qui a mené au coup de force contre le président Mohamed Morsi. En Tunisie, on ne peut nier la responsabilité directe d'Ennahda pour ce qui est de la situation chaotique du pays.
Mais on dira aussi que cette responsabilité n'est pas unique. La bourgeoisie tunisienne qui refuse tout changement structurel dans les rapports sociaux depuis 2011 et qui n'a pas investi le moindre millime dans son propre pays est aussi à pointer du doigt.
(1) Lire « Fantasmes autour d'un Etat fort en Tunisie », Olivier Piot, Horizons arabes, les blogs du Monde diplomatique, 1er août 2021, blog.mondediplo.net
(2) Lire « Tunisie. Un bouleversement inéluctable mais périlleux », Thierry Brésillon, OrientXXI, 3 août 2021.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.