Votre magazine se veut neutre au regard de l'actualité politique. Sans doute est-ce vrai pour la politique intérieure du Maroc, c'est certainement moins vrai pour ce qui touche aux relations du Maroc avec son voisin de l'Est. En effet, quand l'Algérie a-t-elle cessé d'affirmer que le conflit au Sahara occidental concerne les deux antagonistes que sont le pouvoir marocain et le Polisario ? Que des Etats adoptent les positions qui leur conviennent, pour ou contre la position marocaine, voilà une banalité, même si un de ces Etats est frontalier avec le Maroc. Ce n'est point une dérobade que d'affirmer que le différend en appelle aux négociations entre les deux belligérants. Durant la lutte pour son indépendance, l'Algérie a bénéficié de solidarités multiples, comme de positions contraires de la part des nations, mais les négociations de cessez-le-feu conduisant à l'indépendance se sont déroulées entre les deux protagonistes : la France et le FLN. Enfin, si l'Algérie ne peut adhérer au rattachement du Sahara occidental au Maroc, ce n'est pas pour de sombres raisons mercantiles d'accès aux côtes atlantiques, mais tout simplement parce que la revendication marocaine repose sur un principe d'allégeance au Makhzen, un principe dont la rationalité est de type féodal, au même titre que celles qui avaient fondé les régimes de droit divin dans l'Occident chrétien médiéval. À cela s'ajoute que votre diplomatie confond entre allégeance et rattachement territorial. Quelle que soit la réalité du Dominium britannique, ni le Canada ni l'Australie, pour ne retenir que ces exemples, ne sont territorialement une possession britannique. L'Algérie est consciente du fait que, en reconnaissant la marocanité du Sahara occidental, elle signe son arrêt de mort pour ses propres oasis de l'Erg occidental, soit un territoire avoisinant les 500.000 km2, qui n'a toujours pas apaisé les convoitises marocaines, depuis Allal al Fassi en 1956, jusqu'à celles qui investissent aujourd'hui les réseaux sociaux. Salutations d'un citoyen du Maghreb !