La mise en garde lancée, le 31 mai dernier, par le prince Abdelaziz Ben Salmane, ministre saoudien de l'Energie, en direction des hedge funds et des traders, qui spéculent sur la chute des prix de pétrole, à travers laquelle il a laissé entendre qu'une nouvelle chute de la production de pétrole pourrait intervenir le 4 juin, a été mise à exécution. Dimanche, à l'occasion de la réunion de l'Opep+, à Vienne, l'Arabie Saoudite est passée à l'action, décidant de procéder à une nouvelle coupe volontaire de sa production de l'ordre d'un million de barils par jour. Une réduction qui s'applique à compter de juillet et pourra être prolongée, a déclaré le prince Abdelaziz Ben Salmane, à l'issue de la réunion à Vienne de l'Opep+, regroupant les treize membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs dix alliés conduits par la Russie. La production pétrolière saoudienne passera ainsi à 9 millions de barils par jour, pour une réduction totale de sa production de 1,5 million de barils par jour, selon le ministère. Le ministère a précisé que cette nouvelle baisse de production visait à renforcer les mesures de précaution prises par les pays de l'Opep+ en vue de soutenir la stabilité et l'équilibre des marchés pétroliers. Le prince Abdelaziz Ben Salmane s'est félicité d'avoir ménagé «le suspense» avec cette mesure qu'il a qualifiée de «cerise sur le gâteau» pour «ramener la stabilité sur un marché» extrêmement volatile. Dans ce sillage, le vice-Premier ministre russe Alexander Novak a précisé pour sa part que les baisses instaurées depuis début mai par neuf pays, dont Riyad, Moscou, Bagdad ou encore Dubaï, pour un total de 1,6 million de barils quotidiens, «sont étendues jusqu'à fin 2024". Les négociations entre les 23 participants, qui représentent 60% de la production mondiale d'or noir, ont duré plusieurs heures, et à l'issue des discussions, les Emirats arabes unis, désireux de pomper davantage, ont obtenu un relèvement de leur quota de production de brut pour 2024, selon le nouveau tableau publié par l'Opep. En contrepartie, l'Angola, le Congo et le Nigeria notamment, réticents dans un premier temps, ont vu un abaissement de leurs objectifs, qu'ils peinent à atteindre. «Nous avons réussi à nous mettre d'accord», a déclaré Bruno Jean-Richard Itoua, ministre congolais des Hydrocarbures. «On est très content», a-t-il insisté. La réduction décidée par l'Arabie Saoudite, qui intervient dans un contexte de baisse des prix du baril ces derniers mois malgré l'annonce début avril de coupes drastiques, a fait gagner une légère hausse de 0,24% sur le prix du Brent (76,58 dollars), qui s'échangeait à 76 dollars le baril, loin des sommets enregistrés en mars 2022 au début du conflit en Ukraine (près de 140 dollars). Selon certains analystes, les membres de l'Opep+ ont affiché un front uni, démontrant qu'ils savaient travailler ensemble. Nous assistons à la fin de la globalisation néolibérale Pour Mourad Preure, consultant international en questions énergétiques, la cohésion entre les pays de l'OPEP et de l'OPEP+, qui fait naturellement face à des lobbies qui veulent lui porter atteinte, participe activement au changement de l'ordre mondial. « Grâce aux changements qui s'opèrent dans le monde, nous aurons prochainement plusieurs marchés pétroliers. Nous assistons à la fin de la globalisation néolibérale et, par conséquent, de celle de l'Occident », a-t-il estimé dans une intervention, hier, sur les ondes de la Radio algérienne. L'Algérie a décidé de prolonger sa réduction volontaire de 48.000 barils de pétrole par jour, jusqu'à fin décembre 2024, a annoncé dimanche le ministère de l'Energie et des Mines dans un communiqué. Après avoir participé aux travaux de la 186e réunion de la Conférence de l'Opep, M. Arkab a pris part ce dimanche aux travaux de la 49e réunion du Comité ministériel conjoint de suivi (JMMC) et de la 35e réunion ministérielle Opep et non-Opep (Opep+). Lors de ces réunions, les ministres en charge du pétrole de la Déclaration de Coopération (Opep+) ont échangé sur la situation actuelle du marché pétrolier international et de ses perspectives d'évolution à court terme. A l'issue des réunions, M. Arkab a déclaré que «les pays de l'Opep+ sont particulièrement attentifs à l'évolution des fondamentaux du marché pétrolier international», selon la même source. «La conjoncture économique mondiale devrait croitre modérément jusqu'à la fin de l'année en raison d'une croissance faible dans les pays industrialisés, une inflation élevée et un rebond modéré de la croissance économique dans les pays émergents. L'ensemble de ces facteurs agissent sur la demande mondiale de pétrole qui devrait rester relativement contenue au second semestre 2023 alors que le marché pétrolier reste convenablement approvisionné», souligne le ministre cité dans le communiqué. «Au terme de nos discussions, les pays de la Déclaration de Coopération ont décidé de maintenir les niveaux de production décidés en octobre 2022 pour le reste de l'année en cours», a-t-il fait savoir. Après l'annonce de Ryad, les analystes s'attendent à «une réaction positive du marché», sans éloigner la possibilité d «un repli de la demande sous la pression inflationniste, qui pourrait annuler l'effet de cette diminution de l'offre». Mais, consciente de cette volatilité, l'alliance a prévenu qu'elle convoquerait une réunion en urgence «si nécessaire» pour équilibrer la balance.