Depuis dimanche et l'entrée des rebelles à Tripoli, la chute de Kadhafi ne fait plus aucun doute. Le CNT devrait s'installer officiellement aux commandes dans les prochains jours. Alger n'a toujours pas reconnu officiellement le représentant des rebelles. Depuis le début de la révolte contre le régime de Kadhafi, les relations entre l'Algérie et le CNT sont tendues. A plusieurs reprises, les rebelles ont accusé l'Algérie de soutenir militairement le régime de Kadhafi. Le CNT a même porté plainte contre l'Algérie auprès de la Ligue arabe.« L'Algérie, après la chute du régime Kadhafi, va être confrontée à de sérieuses difficultés de voisinage et d'insertion régionale », tranche le politologue Mohamed Chafik Mesbah. Le politologue Rachid Grim estime qu'en plus des inimitiés avec Rabat, Alger devrait aussi s'attendre à l'apparition d'un nouvel « ennemi » à l'est et avec qui elle partage une longue frontière. « Le CNT a un passif à régler avec l'Algérie officielle parce qu'elle a soutenu de près ou de loin Kadhafi », explique t il. La reconnaissance du CNT par l'Algérie qui interviendra, selon lui, tôt ou tard, n'y changera pas grand chose. . En fait,« hormis l'attrait circonstanciel qu'elle présente de par ses ressources financières appréciables, l'Algérie n'est plus un acteur qui compte sur la scène mondiale », souligne Mohamed Chafik Mesbah. Son statut de partenaire des pays occidentaux dans la lutte contre le terrorisme ne met pas l'Algérie à l'abri. « Il ne faut surtout pas croire que sa forte participation à la lutte contre le terrorisme va la prémunir contre les desseins stratégiques des grandes puissances. L'accélération des événements en Libye au cours de ces derniers jours confirme les errements de la diplomatie algérienne. « La position algérienne à l'égard de la Libye s'intègre parfaitement dans le cadre de la politique étrangère du pays », indique Rachid Tlemçani, politologue et professeur à l'Université d'Alger. Une politique qui est représentée, rappelle t il, depuis 1999 par le président de la République Abdelaziz Bouteflika. . Les autres responsables ne jouent pas un rôle très important dans l'élaboration et la prise de décision. « Une politique étrangère est, par excellence, le lieu du plus large consensus national. Ce consensus est inexistant en Algérie où, de toute manière, tous les consensus sont mous, par conséquent, fragiles », rappelle Mohamed Chafik Mesbah. . Au plan pratique, opératoire je veux dire, l'Algérie n'a plus les ressorts nécessaires pour concevoir et impulser une démarche diplomatique ambitieuse », poursuit il. Pour Rachid Tlemçani, l'Algérie pouvait pourtant être à l'avant garde dans le mouvement international de soutien aux révoltes ayant vu le jour dans le monde arabe. « L'Algérie était en retrait. C'est pire pour le cas libyen et syrien. Elle avait soutenu en catimini et discrètement le colonel Kadhafi alors qu'il n'avait aucune chance de survie ».Autre critique concernant la politique étrangère algérienne : son manque de vision. « Il y a pour le régime algérien, je ne dis pas pour l'Algérie, un revers symbolique exceptionnel », assure Mohamed Chafik Mesbah. Et de continuer : « outre sa perte de compétence avérée dans l'anticipation stratégique, il a voulu entretenir le mythe que les régimes autoritaristes pouvant surpasser les frondes populaires et même faire face à l'hostilité étrangère. Comme si le maintien au pouvoir du Colonel Kadhafi permettait de conjurer le mauvais sort ».