Loin des salons feutrés et des beaux quartiers, les bas quartiers. Comme le faubourg de Tijjdit que l'on cite quand il y a lieu de parler de l'histoire ancestrale de Mostaganem, mais que l'on cache quand il pleut, pour ne pas invoquer les plafonds qui menacent de tomber en ruine sur les pauvres gens de plus en plus nombreux à demander un logement décent. Vendredi matin, la protection civile avait bien du pain sur la planche du côté de Tijjdit, à l'effet des petites précipitations qui se sont abattues durant la nuit. Outre les fils de la Sonelgaz qui ne semblent tenir qu'à un fil de soie, causant à chaque pluie de dangereuses masses, outre tout le désagrément occasionné au détriment de la population locale de par les interminables coupures, les interventions des pompiers étaient aussi assujetties aux vieilles frêles bâtisses, généralement pour procéder à de simples PV de constatation, quand la route le permet. Car, dans cette partie de la cité, à bonne distance du centre ville, ce n'est pas aisé de pénétrer dans ces quartiers dignes de la Casbah, qui ressemblent au fameux titre « Where The Streets Have No Name » de U2 (où les rues n'ont pas de noms) ! Le cas entre autres, de la rue n° 44. Là, Mme Benhamou Nebia nous ouvre sa porte, histoire de se faire entendre auprès des autorités de la ville et de la wilaya. Divorcée avec une charge de 3 enfants, elle vit dans un cadre austère qui rappelle le cadre de vie de Cosette avec le seau d'eau. A la petite différence, Mme Nebia Benhamou use de ces seaux quand il pleuvote, pour récupérer l'eau qui suinte du plafond afin que le sol ne s'inonde. « Mais quand il pleut, je me sers du frottoir, parfois toute la nuit, pour dégager les eaux pluviales qui s'infiltrent et du plafond et depuis les murs ». Femme de ménage, pour gagner son pain à la sueur de son franc, la dame prie chaque soir le bon Dieu à ce que son plafond ne se trébuche pas, elle qui tient bon dans cette maisonnette depuis 1994, dans l'espoir de se voir attribuée un logement social qu'elle attend depuis l'introduction de sa demande en 2006. Rue n° 44, porte 772 : ou la mort à petit feu ? Sur la même rue numérotée tel un taulard, à quelques autres pas, plusieurs autres pères de familles insistent à ce que leur immeuble soit journalistiquement ausculté. 4 familles y résident dans un délabré bâtiment d'un RDC + 1 qui ne semble tenir qu'à la bénédiction du Bon Dieu. Chacun a sa tranche de vie avec l'exiguïté. Mr Safi Youcef nous invite chez-lui. Ici, un chez-soi ne ressemble même pas à un Smig d'habitat. En tout et pour tout, il dispose d'une seule chambre de 3 sur 2 mètres. « Nous sommes 5 personnes à crécher ici, monsieur ». C'est-à-dire, le couple et les enfants qui cohabitent ainsi que les meubles, dans un 6 mètres carrés, dans des conditions des plus indigentes, à commencer par la puanteur pestilentielle de la moisissure à vous couper le souffle. Les 3 autres colocataires, Nadji Hakim, Hadjaj Djilali et Houcine Zidoud, tous des fonctionnaires, font leur entrée dans la petite chambre du voisin, pour relater les mêmes faits de d'indigence et de dénuement au pays du pétrodollar, eux qui cohabitent dans l'étroitesse et le mauvais sang depuis plus d'une décennie. Et ces chérubins qui à défaut d'un patio ou d'une courette, se distraient carrément sur des escaliers qui donnent le vertige de par leur état de décrépitude, sous un autre mur menaçant ruine, et qui demandent l'auteur de les prendre en photo. Ah, l'innocence ! Tout comme celle des adultes parmi les autres innombrables voisins du n° 44, qui insistaient tous à se faire photographier leurs semblants d'abris.