Une centaine d'hommes d'affaires accompagnera le président français lors de la visite d'Etat qu'il compte entreprendre du 3 au 5 décembre prochain en Algérie. Ce sont les hommes d'affaires affiliés au mouvement des entrepreneurs français (MEDEF international) qui seront du voyage de Nicolas Zarkozy à Alger. Les milieux d'affaires algériens parlent de 80 à 100 d'entre eux qui se déplaceront à cette occasion pour participer avec leurs homologues algériens membres du FCE, à des rencontres qu'abritera en principe l'hôtel Sheraton. Les préparatifs vont bon train à cet effet et les échos qui en échappent se veulent assez positifs. « Ce qu'on veut, c'est positiver la rencontre », nous disent des sources proches de cercles diplomatiques français. A en croire d'autres, celles-là en contact avec le palais d'El-Mouradia, « les parties, d'un côté comme d'un autre, tiennent à ce que ne soient évoqués que les côtés positifs de la relation entre l'Algérie et la France ». Il est donc retenu entre Algériens et Français « de mettre en avant lors des rencontres de décembre, les avancées en matière d'environnement économique et du climat des affaires ». Certes, c'est une attitude nouvelle chez les Français qui, à l'unanimité, conviennent cependant qu'en matière d'affaires et d'investissements, « les ministres algériens racontent toujours la même chose, rien n'a changé dans l'environnement économique de ce pays ». Ils le disaient, il y a à peine quelques jours au cours de l'une des nombreuses réunions de préparation de la visite de Sarkozy, qu'ils tiennent à Alger avec les représentants algériens. « Si c'est pour nous raconter la même chose, ce ne n'est pas la peine », est la pique lancée à ce moment, précisément à propos d'une éventuelle rencontre des Français avec le ministre de l'Industrie et de la promotion de l'investissement (MIPI), Hamid Temmar. Ministre qui, à chaque visite du MEDEF à Alger, disent les patrons français, « tient les mêmes propos et promet des changements mais on rencontre toujours les mêmes problèmes et difficultés pour travailler avec les responsables algériens ». « LES FRANÇAIS PLUS DISPONIBLES... » En tout état de cause, il est prévu l'organisation à Alger de deux panels d'hommes d'affaires des deux pays. Il s'agira pour le premier, selon des sources crédibles, donc « de faire le constat des évolutions positives que l'Algérie a enregistré ces dernières années et celles susceptibles d'intervenir au fur et à mesure que les projets d'investissements se précisent ». Quant au deuxième panel, il aura à charge, toujours selon les mêmes sources, « d'identifier de nouveaux secteurs pouvant faire l'objet d'un partenariat algéro-français ». L'objectif des Français est, à en croire certains d'entre eux, que « les Algériens ne nous reprocheront plus de ne rien vouloir faire chez eux et que nous, Français, seront plus disponibles à dépasser les lacunes et les insuffisances des institutions algériennes qui empêchent l'allègement des procédures d'investissement et l'assainissement du climat des affaires ». L'objectif stratégique de ce rapprochement « positiviste » de la France est que l'Algérie constitue la locomotive du projet de l'Union de la méditerranée dans le Maghreb. L'Elysée a déjà pris acte des déclarations des officiels algériens à ce sujet et que Sarkozy lui-même juge d'ores et déjà satisfaisantes. Il faut dire que la visite à Alger des hommes du MEDEF intervient à quelques mois seulement de la décision de Renault de créer une usine de construction d'automobile au Maroc. « CE PROJET QUI RESTE A TRAVERS LA GORGE » En filigrane, tout au long des discussions qu'ont actuellement Algériens et Français en prévision de la visite de Sarkozy de décembre prochain, ce grand projet qui, disent nos interlocuteurs « reste à travers la gorge ». Mais voila que dès qu'on l'évoque, les Français replongent sans hésiter dans le « oui mais rien n'a changé en Algérie, et il est toujours difficile d'investir alors qu'au Maroc, le terrain a été donné à Renault très vite ». Mieux ou pis encore tout dépend de quel côté on se place - l'on apprendra que Renault était en discussion avec SNVI avant que ses responsables ne décident de trancher la question de l'installation de l'usine de construction automobile au profit de Rabat. Encore une fois, Temmar est cité. « Il prenait tout son temps pour recevoir les gens ou pour permettre aux responsables algériens concernés de rencontrer leurs homologues français », disent nos sources à propos de cet épisode de pourparlers SNVI-Renault. L'on tient cependant à rester confiant et rassurant en suggérant de « passer à autre chose » et en indiquant qu'un débat entre les représentants du FCE et ceux du MEDEF sur les opportunités d'investissement et de partenariat, sera organisé en plénière en décembre prochain. Il est même attendu que le président Sarkozy s'adresse aux hommes d'affaires parce que, dit-on, « Madame Parisot, la présidente du MEDEF, le connaît bien depuis qu'il était ministre de l'Intérieur, ils sont de la même génération ». En plus, on s'attend à ce que les Algériens annoncent officiellement l'entrée dans le capital du CPA, la française CAYLON « l'ex-Crédit agricole ». L'ouverture des plis devrait être entreprise en principe le 26 ou le 27 novembre prochain. « Si d'ici là, on ne trouvera rien à redire, sait-on jamais ! », lance-t-on. Il est en tout cas fait remarqué que « pour cette fois-ci, le MEDEF semble s'inscrire dans un programme dûment tracé par l'Elysée et non par Matignon ou par Bercy où se trouve le ministère de Christine Lagarde, qui regroupe l'économie, les finances et l'emploi ». MACIAS, UNE QUESTION QUI NE DOIT PAS EN ETRE UNE Même le milieu des affaires ne se prive pas de commenter la venue avec Sarkozy, d'Enrico Macias. Viendra-t-il ou pas, là n'est pas la question qui tarabuste les esprits. Mais l'on s'interroge sur la contrepartie que le président français serait apte à donner au président Bouteflika pour qu'il lui permette de déroger à la règle qui lui a été prescrite au début de son premier mandat à El-Mouradia, qui est celle de ne pas permettre à Macias, de faire un retour fracassant en Algérie. L'on susurre dans les coulisses des institutions concernées par la visite de Sarkozy, qu'il serait possible que ce dernier accepte de présenter officiellement les excuses de la France coloniale à l'Algérie révolutionnaire. Pour l'instant, on n'en est qu'aux spéculations sur une question qui ne doit pas en être une. En effet, l'on se demande pourquoi Bouteflika avait-il en 2002, choisi de faire du retour de Macias en Algérie, un acte solennel et officiel qu'il avait tenu à annoncer de surcroît sur un ton provocateur. La venue, il y a quelques années, de Robert Castel et de Roger Hanin en Algérie, à Bab El-Oued même, leur quartier de naissance, n'a aucunement dérangé la mémoire. Parce qu'elle n'a pas cherché à convoquer l'Histoire - avec un grand H - pour un rendez-vous de pure culture. Pourtant, bien que détenteurs d'un passeport français, Castel et Hanin, ces grands du monde du cinéma, sont tous deux d'origine juive et pieds-noirs. Exactement comme Enrico Macias. Et à une différence près, comme Nicolas Sarkozy.