CCXX?me Nuit (Suite) Apr?s qu?ils eurent tous essuy? leurs larmes, Ganem en arracha de nouvelles en faisant le r?cit de tout ce qu?il avait souffert, depuis le jour qu?il avait quitt? Tourmente jusqu?au moment o? le syndic l?avait fait apporter chez lui. Il leur apprit que, s??tant r?fugi? dans un petit village, il y ?tait tomb? malade; que quelques paysans charitables en avaient eu soin; mais que, vu qu?il ne gu?rissait point, un chamelier s??tait charg? de l?amener ? l?h?pital de Bagdad. Tourmente raconta aussi tous les ennuis de sa prison; comment le calife, apr?s l?avoir entendue parler dans la tour, l?avait fait venir dans son cabinet, et par quels discours, elle s??tait justifi?e. Enfin, quand ils se furent instruits des choses qui leur ?taient arriv?es, Tourmente dit: ?B?nissons le ciel qui nous a tous r?unis et ne songeons qu?au bonheur qui nous attend. D?s que la sant? de Ganem sera r?tablie, il faudra qu?il paraisse devant le calife avec sa m?re et sa s?ur; mais, comme elles ne sont pas en ?tat de se montrer, je vais y mettre bon ordre: je vous prie de m?attendre un moment.? En disant ces mots, elle sortit, alla au palais et revint, en peu de temps, chez le syndic, avec une bourse o? il y avait encore mille pi?ces d?or. Elle la donna au syndic, en le priant d?acheter des habits pour Force des c?urs et pour sa m?re. Le syndic, qui ?tait un homme de bon go?t, en choisit de fort beaux et les fit faire avec toute la diligence possible. Ils se trouv?rent pr?ts au bout de trois jours; et Ganem, se sentant assez fort pour sortir, s?y disposa. Mais, le jour qu?il avait pris pour aller saluer le calife, comme il s?y pr?parait avec Force des c?urs et sa m?re, on vit arriver chez le syndic le grand vizir Giafar. Ce ministre ?tait ? cheval, avec une grande suite d?officiers: ?Seigneur, dit-il ? Ganem en rentrant, je viens ici de la part du commandeur des croyants, mon ma?tre et le v?tre. L?ordre dont je suis charg? est bien diff?rent de celui dont je ne veux pas vous renouveler le souvenir; je dois vous accompagner et vous pr?senter au calife, qui souhaite de vous voir.? Ganem ne r?pondit au compliment du grand vizir que par une tr?s profonde inclination de t?te et monta un cheval des ?curies du calife, qu?on lui pr?senta et qu?il mania avec beaucoup de gr?ce. On fit monter la m?re et la fille sur des mules du palais; et tandis que Tourmente, aussi mont?e sur une mule, les menait chez le prince par un chemin d?tourn?, Giafar, conduisit Ganem par un autre et l?introduisit dans la salle d?audience. Le calife y ?tait assis sur un tr?ne, environn? des ?mirs, des vizirs, des chefs des huissiers et des autres courtisans arabes, persans, ?gyptiens, africains et syriens de sa domination, sans parler des ?trangers. Quand le grand vizir eut amen? Ganem au pied du tr?ne, ce jeune marchand fit sa r?v?rence en se jetant la face contre terre; et puis, s??tant lev?, il d?bita un beau compliment en vers, qui, bien que compos? sur-le-champ, ne laissa pas d?attirer l?approbation de toute la cour.