Le royaume du Maroc remet de nouveau sur la table la question de la réouverture de la frontière terrestre avec notre pays. Cette fois-ci, c'est le ministre des Affaires étrangères qui est monté au créneau. Dans un entretien accordé au correspondant d'Al-Djazeera, à New York où il a représenté son pays à l'Assemblée générale de l'ONU, Al Fassi El Fahri a fait usage de toutes sortes d'arguments en faveur de la réouverture des frontières mais au-delà du règlement du conflit sahraoui. «Nous invitons nos frères algériens à la reprise immédiate du dialogue politique en vue d'aboutir à la réouverture de la frontière terrestre», appelle El Fahri. Une ouverture rapide des frontières «qui restent malheureusement fermées à cause d'une décision unilatérale des frères algériens», note-t-il. Cependant, le chef de la diplomatie chérifienne se garde de préciser la genèse de cette fermeture qui pénalise, au premier chef, toute la région orientale du royaume qui vit aujourd'hui un marasme économique sans précédent. En effet, cette fermeture est le fait unilatéral des autorités marocaines qui avaient accusé les Algériens d'être les auteurs des attentats de Marrakech en 1994. Suite à quoi, les ressortissants algériens dans le royaume ont été l'objet d'une chasse à l'homme. Il est vrai que pour se racheter de cette mesure, pour le moins inamicale, le roi du Maroc, une fois les auteurs des attentats identifiés, avait supprimé le visa pour les Algériens. Pour El Fahri, la réouverture des frontières n'est qu'un préalable à la normalisation des relations bilatérales qui sont prises en otage par le conflit du Sahara occidental, pierre d'achoppement à tout processus de relance d'une dynamique de coopération régionale. Il impute la situation actuelle de statu quo qui dure depuis 1975 à «l'entêtement de l'Algérie» tout en faisant valoir, dans le même temps, la solution marocaine à travers le plan «de large autonomie interne dans le cadre de la souveraineté territoriale et nationale du Maroc». «C'est une solution réaliste», insiste El Fahri qui oppose implicitement le dynamisme politique marocain, à travers son initiative d'autonomie, à l'inertie algérienne qui a toujours soutenu un règlement du conflit dans le cadre des résolutions pertinentes des Nations Unies, notamment le droit des peuples à l'autodétermination. Le ministre marocain des Affaires étrangères justifie l'urgence et la nécessité de relancer la construction maghrébine par les impératifs sécuritaires et le potentiel de déstabilisation qui menace toute la région. Implicitement, le ministre marocain des Affaires étrangères laisse supposer quelques connivences entre le Polisario et Al Qaïda au Maghreb islamique. Le défi sécuritaire conjugué au défi économique, qui se posent à la région, justifient aux yeux du ministre marocain des AE la nécessité de «la normalisation des relations bilatérales». « Le Maroc veut regarder l'avenir, il s'intéresse aux défis majeurs qui interpellent notre région», répète-t-il. «La construction du Grand Maghreb exige de dépasser les difficultés objectives du moment avec nos frères algériens», poursuit El Fahri. Le plaidoyer en faveur de la réouverture est une constante de la diplomatie marocaine qui n'est pas tout à fait dénuée de calculs politiciens. A travers cette insistance en faveur de la réouverture des frontières et du règlement de la question sahraouie, selon la proposition marocaine, n'y a-t-il pas une volonté de mettre l'Algérie, aux yeux de l'Europe et des USA, au banc des accusés au motif qu'elle s'abrite derrière l'option d'autodétermination du peuple sahraoui pour torpiller toute dynamique de paix dans la région?