Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, n'a pas mâché ses mots contre l'OMC, hier à Téhéran, dans son discours devant le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres du G15. Très offensif, Bouteflika a dénoncé crûment les conditions «exorbitantes» imposées aux pays en développement candidats à l'accession à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). «Nous déplorons (...) la volonté d'imposer aux pays en développement candidats à l'accession à l'OMC des conditions exorbitantes non exigées des pays membres même développés» s'est indigné le président de la République. Il a enfoncé le clou en assénant : «Nous rejetons l'argument que tel serait le prix à payer par les pays en développement candidats, pour leur retard, un retard qui leur a été imposé et qu'ils n'ont pas voulu». C'est, sans doute, la première fois qu'un haut responsable algérien, président de la République de surcroît, parle aussi sèchement des «règles» de l'OMC depuis l'entame des négociations d'adhésion à partir de 1996. Abdelaziz Bouteflika vient de trancher dans le vif en excluant catégoriquement que l'Algérie puisse se soumettre comme un élève aux desiderata du puissant Club des riches. En effet, l'Algérie qui a répondu à plus de mille questions des membres de l'OMC (ex GATT) n'est pas encore parvenue, 15 ans après, à franchir les murs bétonnés de la surenchère. Ce faisant, notre pays a pris des mesures souvent impopulaires pour satisfaire la demande des pays riches sans que ces sacrifices ne soient pris en considération. C'est dans ce registre qu'il faudrait insérer le coup de gueule du président, hier, en relevant à juste titre que les règles de l'OMC s'appliquent en sens unique, au détriment des pays demandeurs d'adhésion. «L'accès aux marchés mondiaux de nos produits est encore plus gravement compromis par un nouveau protectionnisme vert qui transfère, par ce biais également, des pays du Nord aux pays du Sud la charge de l'ajustement qu'appellent les changements climatiques» a déclaré Bouteflika, en référence au dumping social pratiqué par les pays riches pour empêcher que les produits du Sud ne pénètrent leurs marchés. C'est pourquoi, le chef de l'Etat a carrément plaidé pour de nouvelles règles de jeu qui prennent en compte les préoccupations des pays en développement. Des règles qui devraient être adossées à un «partenariat international rénové» fondé sur le partage équitable des responsabilités et des bénéfices». La promotion de règles de jeu équitables dans les domaines du commerce, du financement, de l'investissement et du transfert de technologie est, d'après lui, «une condition incontournable» dans cette perspective. En effet, devait-il souligner, «les aléas de ces négociations interminables pénalisent d'abord les plus vulnérables qui voient, chaque jour, s'éloigner un peu plus les perspectives d'accès de leurs produits aux marchés des pays riches».