Les travailleurs du complexe sidérurgique d'Annaba ont décidé de défier la justice en maintenant leur grève. Une première ! Rien ne pouvait plus les faire reculer sur les revendications salariales. Au lendemain d'une décision du tribunal d'El Hadjar, ordonnant aux travailleurs d'arrêter leur grève, l'on s'attendait que les salariés de l'Indien ArcelorMittal reprennent le travail, mais le syndicat a appelé à une assemblée générale extraordinaire afin de décider de la suite à donner à l'action de débrayage illimitée, enclenchée lundi dernier. Contre toute attente, les travailleurs ont tourné le dos à la décision de la justice et maintenu l'action de protestation. «Les salariés, réunis en assemblée générale, ont décidé de poursuivre leur grève, mais la direction va prendre toutes les mesures légales pour faire appliquer la décision de justice ordonnant l'arrêt du mouvement», a déclaré, hier, Mohamed Guedha, directeur de la communication d'ArcelorMittal d'Annaba. C'est-à-dire qu'il faut s'attendre à des rebondissements spectaculaires qui peuvent amener la direction d'ArcelorMittal à faire des ponctions sur salaires, désormais «légalisées» par la décision de la justice. La direction de ArcelorMittal pourrait aller jusqu'à mettre à profit cette occasion pour régler ses comptes avec certains responsables du syndicat qualifiés de «perturbateurs». Une plainte a été déposée déjà contre Smaïn Kouadria, le SG du syndicat de l'entreprise. Le film retraçant les événements a été émaillé de quelques séquences qui donnent matière à réflexion. Les travailleurs, qui ont observé en 2009 une grève illimitée pour arracher une augmentation de salaires, avaient eu gain de cause et décidé de surseoir à la grève après avoir signé un document d'entente. Début 2010, le syndicat a négocié une convention de branche pour une nouvelle revalorisation salariale avec seulement la Société de gestion des participations de l'Etat Translob, qui ne détient pourtant que 30% des actions dans ArcelorMittal Annaba. Les négociations autour de cette convention ont exclu l'employeur indien, chose qui l'a amené à refuser le contenu de la convention et saisir la justice. Lundi, un tribunal d'El Hadjar, (Annaba), saisi en référé par la direction, avait ordonné l'arrêt de la grève illimitée lancée le même jour par le syndicat d'entreprise pour des revendications salariales. Le même tribunal doit se prononcer le 30 juin sur le fond, pour décider de la légalité de cette grève que la direction conteste. Faut-il reconnaître que, dans le fond, il y a bel et bien lieu de se poser des questions sur la justesse de ces mouvements de grève cycliques que mène le syndicat, allant parfois jusqu'à défier les décisions de justice? M. Smaïn Kouadria restait injoignable, toute la journée d'hier. La grève a des conséquences financières désastreuses sur l'entreprise qui risque de ne plus honorer ses engagements avec des fournisseurs et des acheteurs étrangers, et grever ses finances qui se répercuteront sur les salaires.