A une question posée à un ancien maire de la commune d'Aïn El Türck, sur le tourisme, il répondit: «Il faut savoir d'abord ce que l'on veut faire de cette station balnéaire: une cité dortoir ou une zone touristique par excellence?» Le temps a donné raison à cet ancien maire, peut-être un peu plus visionnaire que les actuels décideurs qui se retrouvent avec des bombes à retardement entre les mains: des milliers de demandes de logements sociaux à satisfaire, et qu'il est impossible de satisfaire, et, un secteur touristique moribond, improductif, incapable de donner l'impulsion nécessaire au décollage économique local, faute d'associer intelligemment les différents opérateurs économiques, dont les tenants d'établissements hôteliers ayant consenti de gros investissements! D'où, l'absence de prospérité et un appauvrissement général de la population, dont la masse juvénile est représentée à plus de 75 %! Amer constat. Taxes et bureaucratie Ce qui est paradoxal, c'est qu'avec le plus grand nombre d'hôtels en Algérie, soit un total de 49 équipement plus 15 en projet, la zone d'Aïn El Türck ne retrouve pas ses marques. Ce qui est encore plus paradoxal, c'est le fait que les gestionnaires n'aient pas compris que la localité vit des taxes issues des équipements touristiques, tels que complexes et hôtels, qu'elle ne met pas à profit en encourageant l'investissement. Selon un opérateur économique, «on bloque l'investissement au profit des habitations et de la construction»! Pourtant, des opérateurs désireux d'investir dans le domaine de l'hôtellerie ne manquent pas. Mais il va falloir faire avec la bureaucratie. Ceux existants, opérationnels, ayant procédé à des investissements conséquents, et qui constituent de gros gisements fiscaux pour la commune, ne demandent qu'à être entendus ou régularisés dans leur situation. Pour preuve, des demandes de permis de construire déposés en octobre ne sont pas encore traitées, à ce jour… A quoi sert la Loi 15/08? Et bien que la loi 15/08 ait été justement promulguée pour régulariser les cas contentieux et litigieux datant de 2008, celle-ci a eu l'effet d'un coup d'épée dans l'eau! Limitée dans le temps, soit 05 années, cette loi n'a permis de régulariser aucune situation contentieuse, du fait que la majorité des dossiers déposés ont été touchés par la péremption! Encore un hic, car l'administration locale étant au fait des limites de cette loi, n'a pas daigné prendre le dossier à temps! D'où le commencement des déboires juridiques pour les opérateurs concernés qui se voient ainsi exposés à des poursuites pénales faute de régularisation. Quand l'enquête commodo freine l'investissement! Il va de soi que l'enquête commodo-incommodo, dispositif légal et obligatoire s'impose pour l'implantation d'un projet dans un secteur précis. Ce dispositif a aussi pour mission de protéger la quiétude des citoyens face aux différents types de nuisances que peuvent provoquer certaines activités. Mais, est ce toujours à juste escient qu'une enquête commodo-incommodo est établie? Le tourisme nécessite l'implantation d'infrastructures qui s'inscrivent dans ce cadre là, c'est un fait. Comment alors expliquer, qu'une simple opposition de locataires peut faire avorter tout un projet structurant, créateur d'emplois et porteur de ressources? En revanche, comment peut-on tolérer l'apparition de stations de lavages-autos, de tôliers, de mécaniciens et autres, dans des quartiers huppés et répertoriés résidentiels au détriment du véritable investissement, notamment l'hôtellerie, seul segment qui réponde à la vocation touristique? «On ne conteste pas la loi, on conteste son application» C'est sûrement l'étroitesse de vision chez certains décideurs locaux qui offusque certains opérateurs économiques, dont des hôteliers. A propos de la taxe de pollution, objet d'équivoque, la loi prévoit une taxe sur les activités polluantes. L'exemple des laveries, pose en effet un problème d'interprétation des textes. L'article 1430 du décret 336/09 stipule que « « seuls les établissements hôteliers dépassant les 5000 kg/ jour sont soumis à cette taxe et qu'ils sont soumis à l'obligation d'une autorisation communale préalable. Or, par méconnaissance des textes ou autre, des établissements hôteliers dont les laveries fonctionnent à 15kg/jour par exemple, se voient fiscalement imposés avec effet rétroactif! D'autres établissements se retrouvent dans cette situation de « deux poids, deux mesures». La promulgation fin 2009 de ce décret sur la production de pollution, relatif à l'usage des laveries, a eu l'effet d'un couperet, alors que certains établissements ne sont pas du tout concernés par cette mesure. Absence de vision ou de volonté? Alors que, la nature de la zone d'Aïn El Türck, balnéaire par excellence, interpelle administration locale, tutelle et élus confondus à réfléchir sur les stratégies de développement du secteur touristique, dont on considère (en théorie), qu'il peut constituer la locomotive économique de toute la wilaya d'Oran, c'est apparemment une autre vision qui s'installe. Foisonnement de revendeurs de matériaux de construction- un quartier est né presque naturellement sous l'appellation de «Chteïbo»-, existence d'activités en surnombre qui dénaturent l'image touristique de la ville, tels que les commerces de karentika et autres, un marché informel qui a pignon sur rue, occupation anarchique de la voirie et des trottoirs, les retards enregistrés dans la préparation de la saison estivale, notamment les accès vers les plages, les accès aux infrastructures touristiques. A propos de ce dernier point, le prélèvement de la taxe de séjour dont sont redevables au trésor les hôteliers, est justement destiné à l'embellissement de la ville et sa préparation à l'ouverture de la saison estivale en temps opportun. Où en est le projet d'une école d'hôtellerie? Question basique: comment une zone touristique peut-elle se prétendre telle sans une école d'hôtellerie, capable de fournir les ressources humaines nécessaires pour prendre en charge ce secteur vital? Aussi, comment peut-on prétendre à une professionnalisation de ce secteur, sans un savoir faire et une technicité? Pourtant, le sujet a été maintes fois posé sur la table par les différents opérateurs avec les décideurs qu'ils soient au niveau de la daïra ou de la wilaya. Enfin, pourquoi, ne pas permettre aux rares professionnels existants d'investir le créneau de la de la formation? Le marché informel, location à la cubaine Le cri de détresse des membres de l'ACICO( association des commerçants et investisseurs de la corniche oranaise) est assez significatif face à cet ensemble d'incohérences. Etant, les principaux pourvoyeurs de gisements fiscaux pour la localité, dans une région où il n'existe aucune zone d'activités, ils ne sont que partiellement pour ne pas dire rarement associés aux actions de développement. Pour sa part, l'administration locale se plaint de la faiblesse de l'investissement et d'absence de prospérité économique! L'autre fait dénoncé réside dans ce marché informel qui prolifère durant la saison estivale, à savoir la location chez les particuliers. Une part importante du marché échappe ainsi aux hôteliers durant cette période estivale, alors qu'il s'agit de locations non conformes à la loi, sans parler du manque à gagner pour la commune, qui se voit ainsi privée de ressources fiscales importantes si l'on considère que près de 10 millions d'estivants séjournent de manière régulière ou passagère durant la saison estivale. A quand le sursaut? Les enseignements tirés ne semblent finalement pas plaider pour un avenir rassurant pour la région d'Aïn El Türck, ni à servir de base de réflexion aux responsables locaux. Et tant que le binôme « tourisme de masse - tourisme High standing » - l'un ne peut être dissocié de l'autre-, n'accapare pas l'attention de ces derniers, il serait illusoire de parler de relance ou de redynamisation du secteur du tourisme. Sans une association des principaux acteurs économiques. L'état de désuétude dans lequel semble végéter cette station balnéaire est des plus inquiétant. Les campings familiaux n'existent plus, pas de salles de cinéma, pas de théâtre, les espaces verts inexistants, pas de centre de loisirs, ni de centres commerciaux, une braderie pour vendre de la vaisselle, histoire de faire ambiance de fête estivale, parfois un chameau de fortune ramené de loin pour amuser les baigneurs, pas d'activités nautiques, des cabanes de fortunes creusées à même la roche sur les plages, des constructions illicites qui fleurissent comme des champignons, etc. Peut-être que les idées, les bonnes, sont en place chez certains décideurs, on n'en doute pas, mais les textes doivent suivre et surtout la bureaucratie ne doit en cas prendre le pas sur l'esprit d'initiative. La balle est dans le camp des responsables locaux.