La direction des moudjahidine de la wilaya d'Ain Temouchent a choisi comme siège pour le musée du moudjahid à Beni Saf, une ancienne demeure coloniale résidentielle, en lui donnant une fonctionnalité nouvelle, celle de dépositaire de la mémoire de la guerre de libération nationale. Ce musée dispose, aujourd'hui, d'un ensemble de documents, de photographies et autres objets historiques, tels des armes, des débris d'avions abattus, rappelant l'histoire de la guerre de libération nationale. Une salle du premier étage a été, spécialement, réservée à une exposition de photos et la maquette d'un centre d'internement situé dans la commune de Châabat El L'ham où étaient détenus les moudjahidine, dont Kadour Boutlilis, aspirant commandant en opération dans la zone 8 (Ain Sefra, Bechar, Tindouf). Ce héros de la guerre de libération nationale a témoigné sur ses conditions d'internement sur place et des tortures subies. Présentement, ces lieux chargés d'histoire ont besoin de plus d'intérêt pour faire connaître les affres des tortures subies par les moudjahidine et la population civile. Selon la directrice des moudjahidine, une action avait été lancée pour restaurer le bâti et préserver cet endroit, qui a été squatté par des indus occupants. La bâtisse renfermait, également, quatre pièces de détention et de torture bâties dans un angle du petit parc, entourant aujourd'hui le musée. La pratique de la torture était monnaie courante, selon plusieurs témoins de cette période de lutte pour l'indépendance nationale. Les personnes âgées de la région gardent en mémoire la sinistre destinée de cette habitation où se pratiquaient des actes barbares et inhumains. C'est dans ce sens que a direction des moudjahidine a voulu préserver comme lieu de souvenir et de mémoire. Parmi les témoignages écrits en lettres d'or au niveau de ce musée, figurent ceux de l'épouse du chahid Boubekeur Cheikh, dont les six frères sont tombés, également, au champ d'honneur. Mme. Boudlal Kheïra raconte que les martyrs Chikh, El-Habib, Boucif, Mohamed, Miloud, Ahmed et Boubekeur ont sacrifié leur vie pour que vive l'Algérie libre et indépendante. C'est dans le quartier populaire de Boukourdan (baptisé El-Nahda) que les Boubekeur cultivèrent le patriotisme. Cheikh et ses frères, El-Habib et Boucif, ont rejoint les rangs de l'ALN en 1956. Les quatre autres, Mohamed, Miloud, Ahmed et Boubekeur en feront de même. Cheikh est le premier à mourir pour la patrie après avoir mené la vie dure à l'occupant lors de la bataille de M'dadha. Son frère Ahmed qui était fidaï (moudjahid en milieu urbain) est mort en martyr en 1958 à l'âge de 42 ans près d'El-Ançor (3 km sur l'ancienne route d'Oran). Le troisième chahid, Mohamed, agent de liaison, a été tué près d'El-Bitour, autre vieux quartier de Béni-Saf. Miloud, lui aussi, était fidaï. Arrêté en 1959, ses bourreaux le jetèrent par-dessus le pont de Boukourdan et le laissèrent succomber à ses blessures. Le sort réservé à son frère El-Habib était encore plus cruel. Arrêté en compagnie de deux autres moudjahidine, il fut enterré vivant dans une fosse. Il avait rejoint les rangs de l'ALN en 1956. Boucif, comme son frère Boubekeur, tomba aussi sous les balles assassines des forces militaires françaises en 1957. Le martyre enduré par les membres de cette famille est un cas parmi tant d'autres des sacrifices consentis par la population de la région pour la cause nationale. Le musée de Beni-Saf tente d'entreprendre un véritable travail de mémoire pour transmettre aux jeunes générations l'esprit et le message de la révolution du 1er novembre 1954.