De nombreuses personnes en quête de soins sollicitent les services de guérisseurs, ayant pour habitude d'étaler leur "savoir-faire", chaque vendredi, au marché hebdomadaire d'Ain Defla. Venant des quatre coins de la wilaya et même de contrées bien lointaines, ces personnes, ayant pour la plupart déjà eu recours à la médecine moderne, se tournent vers ces guérisseurs dans l'espoir de se débarrasser d'un mal dont ils soufrent depuis de longues années. Toutes les catégories sociales semblent se côtoyer en ces lieux avec comme seul dénominateur commun la recherche du remède "miracle" et l'atténuation des souffrances. Des hauts parleurs pour rassembler les curieux et être écouté de tous A quelque 2 km du marché de la ville situé non loin de la gare ferroviaire, les voix des "guérisseurs" sont audibles grâce aux haut-parleurs, ce qui a pour effet d'inciter les curieux à s'en approcher pour voir de plus près ce dont ils parlent. Outre le fait qu'il permet au guérisseur d'être écouté de tous, le recours aux hauts parleurs pour communiquer avec les gens lui permet de rassembler autour de lui le maximum de personnes en tentant de les convaincre du bien-fondé de ces remèdes. Pour d'aucuns, le recours aux haut-parleurs est incontournable au regard de la densité de la foule comparativement à celle d'antan, mais il permet aussi de donner une certaine "couleur" au marché à la faveur de l'ambiance créée. Nerf sciatique, rhumatisme, eczéma, mal de dent et fractures au menu des guérisseurs Les maux et douleurs se rapportant notamment au nerf sciatique, aux rhumatismes, à l'ictère, aux eczémas, aux fractures et maux de dents sont incontestablement les causes pour lesquelles ces guérisseurs sont le plus souvent sollicités. Incontestablement, le guérisseur traitant les maux dentaires et les rhumatismes est celui qui rassemble le plus de personnes. "Mélangez ce liquide à de l'eau, gargarisez-vous 6 fois par jour et donnez-moi de vos nouvelles la semaine prochaine", lance le guérisseur à l'adresse d'un quadragénaire qui se plaignait de ses dents, lui conseillant de ne pas les arracher. "Avouez que le dentiste vous en aurait demandé bien plus", a-t-il ajouté après qu'il eut remarqué que les 200 dinars demandés en contrepartie des soins ont paru excessifs à son "client". Certains affirment que jusqu'à un passé relativement récent, il y avait une personne qui s'était spécialisée dans l'arrachage des dents, relevant toutefois l'absence des règles de stérilisation les plus élémentaires. Ain Defla de tout temps fief des guérisseurs Pour d'aucuns, Ain Defla a toujours eu ses guérisseurs et rebouteux qui transmettent le secret des plantes médicinales de père en fils et de mère en fille. Par le passé, il y avait, affirme-t-on le "djebar" (assembleur d'os) qui, muni d'instruments rudimentaires (morceaux de roseaux, ficelle, couteau), s'adonnait à l'orthopédie. Le savoir-faire du "djebar" était tel qu'il arrivait à connaître le degré de gravité de la facture et la manière de l'immobiliser. Certaines femmes s'étaient (elles le sont toujours) même spécialisées dans le traitement de la stérilité féminine. Par des massages dont elles seules ont le secret, elles arrivent à rendre des femmes, jusque-là stériles, fécondes. Le recours aux guérisseurs, un réflexe d'ordre socio-culturel "Inutile de dire que ces guérisseurs savent pertinemment qu'un malade ayant épuisé tous les recours de la médecine est prêt à s'accrocher à n'importe quelle+bouée de sauvetage+se présentant à lui, d'où les formules +envoûteuses+ utilisées en guise d'appât", lance Ali qui semble bien au fait du sujet. Selon lui, la médecine traditionnelle prend ses racines dans un terrain d'abord socioculturel qu'"irrigue" un certain nombre de "rites", de "conceptions" et de "considérations". Pour Djamel, la raison susceptible d'expliquer l'engouement pour la médecine traditionnelle a trait au fait que celle-ci entraîne moins d'effets secondaires que les médicaments de synthèse, relevant que ce type de médecine est beaucoup moins onéreux. Cet enseignant a affirmé que ce ne sont pas seulement des individus disposant d'un niveau d'instruction limité qui ont recours à ces guérisseurs mais même des intellectuels ou des gens ayant un bon statut social. Selon lui, la guérison d'une personne ayant recouru aux guérisseurs se propage telle une traînée de poudre si bien que de nombreuses personnes préfèrent se faire soigner par les guérisseurs et non par des médecins.