Des centaines de personnes se sont rassemblées jeudi soir à Paris pour exiger "vérité et justice" sur le massacre d'Algériens le 17 octobre 1961 dans la capitale française, appelant les autorités officielles du pays à reconnaître un "crime d'Etat". Les manifestants, pour la plupart des militants et responsables associatifs, des syndicalistes et des représentants syndicaux et partisans, répondaient à l'appel du Collectif pour la Mémoire du 17 octobre 1961 qui, depuis des années, organise un rassemblement, pont Saint Michel, duquel des dizaines d'Algériens ont été jetés, il y a 52 ans, dans les eaux glaciales de la Seine pour avoir bravé le couvre-feu discriminatoire qui leur a été imposé par le préfet de sinistre mémoire Maurice Papon. Pour Mehdi Lallaoui, de l'Association Au nom de La Mémoire, le rassemblement a pour objectif de demander encore une fois " vérité et justice " sur un évènement qui doit être "reconnu comme crime d'Etat". Evoquant la reconnaissance "avec lucidité des faits ", l'année dernière, par le président Hollande, il a estimé que cette déclaration était " importante ", mais " ne disait pas tout ". " Il y a encore des choses à faire. Depuis lors, rien n'a bougé : les revendications sur l'ouverture des archives, la redéfinition de la Fondation pour la Mémoire de la Guerre d'Algérie et l'annulation de la loi du 23 février 2005 dont l'article 4 (abrogé) reconnaissait le rôle positif de la colonisation sont toujours en vigueur ", a-t-il expliqué. L'universitaire et historien Olivier Lecour Grandmaison a, de son côté, rappelé qu'il a fallu dix ans pour obtenir la plaque apposée au coin du pont Saint Michel rendant hommage aux victimes des massacres, et qu'il a fallu 21 ans pour obtenir la déclaration de reconnaissance du président François Hollande. "Cette affaire n'est pas une sanglante répression (comme dit dans la déclaration de Hollande). Ce n'est pas seulement une affaire liée à la reconnaissance par des maires à Paris ou en Province, mais c'est effectivement une affaire nationale", a-t-il dit, ajoutant que c'est pourquoi " nous continuerons d'exiger que celui qui incarne le changement, qu'il vienne l'année prochaine sur ce pont pour qu'il reconnaisse ce que jusqu'à présent aucun parti politique national, aucun président de la République, aucun premier Ministre n'a voulu reconnaître : le crime d'Etat commis à Paris ". Dans un appel rendu public et signé par une vingtaine d'associations, des syndicats et des partis politiques de Gauche, le Collectif pour la Mémoire du 17 octobre 1961, tout en prenant acte du " premier pas important" qui a été franchi par le président Hollande avec sa déclaration de reconnaissance des faits, signale que le terme " crime " n'est pas repris, et la responsabilité, sous entendue, n'est pas clairement définie. Il estime qu'il est temps que le président de la République, au nom de la France, "confirme, par un geste symbolique, la reconnaissance et la condamnation de ce crime d'Etat ", que la liberté d'accès aux archives soit " effective " pour tous, historiens et citoyens, et que la recherche historique sur ces questions soit encouragée, dans un cadre franco-algérien, internationale et indépendant. A la fin du rassemblement, les participants ont jeté symboliquement des fleurs dans la Seine en hommage aux victimes algériennes d'il y a 52 ans.