La formation d'un gouvernement de transition en Ukraine, initialement annoncée pour mardi, a été repoussée à jeudi après trois mois de contestation émaillée de violences conduisant à la destitution du président Viktor Ianoukovitch, alors que la Russie s'est prononcée contre une élection présidentielle en mai prochain. L'annonce du report de la formation d'un gouvernement de transition a été faite par le président par intérim Olexandre Tourtchinov qui a appelé "les dirigeants des fractions et des groupes parlementaires à faire en sorte que le vote (pour le gouvernement) ait lieu jeudi". M. Tourtchinov qui n'a pas donné de raison à ce report, a souligné que la "décision" (formation du gouvernement) doit être prise jeudi. "Menez des consultations jour et nuit, mais il faut que ce soit transparent", a-t-il dit à l'adresse des parlementaires. Olexandre Tourtchinov, un proche de l'opposante ukrainienne Ioulia Timochenko a été nommé dimanche au poste de président par intérim par le Parlement, désormais dominé par les anti-Ianoukovitch. La nomination d'un gouvernement d'union nationale devrait suivre d'ici à mardi, en attendant la tenue d'une élection présidentielle le 25 mai. L'Union européenne (UE) a renvoyé lundi l'éventuelle signature d'un accord de rapprochement avec l'Ukraine à la formation d'un gouvernement issu des élections anticipées du 25 mai et rappelé que toute aide financière était conditionnée à des réformes économiques. Moscou contre la tenue d'une présidentielle le 25 mai La Russie, pays frontalier de l'Ukraine dont l'Est est russophone et russophile, s'est quant à elle prononcée contre la tenue d'une élection présidentielle le 25 mai, estimant que cela allait à l'encontre de l'accord de sortie de crise signé à Kiev la semaine dernière. Pour le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, l'accord de sortie de crise signé à Kiev la semaine dernière par le président déchu Viktor Ianoukovitch et les dirigeants de l'opposition en présence de médiateurs européens prévoyait que l'élection présidentielle ne pouvait avoir lieu qu'après l'adoption d'une réforme constitutionnelle, prévue d'ici à septembre. De fait, la tenue d'une élection le 25 mai "est déjà un renoncement à l'accord" de sortie de crise, a souligné M. Lavrov qui appelé à "s'en tenir aux principes de l'accord". Depuis le début du mouvement de contestation en Ukraine, la Russie avait plusieurs fois dénoncé l'attitude de l'opposition ukrainienne et mis en garde contre une menace sur la souveraineté de ce pays. Le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev, a indiqué la veille qu'il était "difficile" de travailler avec les organes du pouvoir actuel. "Strictement parlant, aujourd'hui nous n'avons personne avec qui parler. La légitimité de toute une série d'organes du pouvoir là-bas suscite de sérieux doutes", a-t-il dit. Le parlement veut poursuivre Viktor Ianoukovitch Viktor Ianoukovitch, destitué par le Parlement et actuellement introuvable, risque des poursuites judiciaires après la mort de 82 personnes la semaine dernière à Kiev. Ainsi, une résolution approuvée mardi par les parlementaires à une très large majorité, appelle la Cour pénale internationale (CPI) "à établir les coupables de ce crime contre l'humanité (...) et à lancer des poursuites contre Viktor Ianoukovitch et d'autres hauts responsables qui donnaient et exécutaient des ordres criminels". "Ces trois derniers mois les forces de l'ordre utilisaient la force, des moyens spéciaux et des armes contre les manifestants pacifiques sur ordre de hauts responsables à Kiev et dans d'autres villes d'Ukraine", affirme le texte. D'après la résolution, "plus de 100 citoyens ukrainiens et d'autres pays ont été tués, plus de 2.000 blessées dont 500 sont dans un état grave", depuis le début du mouvement de contestation il y a trois mois. La crise en Ukraine s'est déclenchée en novembre 2013 après la suspension par le pouvoir des négociations sur un accord d'association avec l'Union européenne, au profit d'une relance des relations économiques avec Moscou.