Classée en 1950 et portée sur la liste du patrimoine national en janvier 1968, la ville archéologique Tobna (Batna) demeure enveloppée par l'oubli en dépit de son glorieux passé. Selon plusieurs sources historiques, la construction de cette cité remonte au 2ème siècle. Les ruines de la partie visible de cette cité ont disparu, sous l'effet des éléments de la nature et les actes de pillage, assurent des habitants de la région. Aujourd'hui, ce qui reste de cette prestigieuse ville est enseveli sous terre attendant les fouilles pour livrer ses secrets. Thubunae, citée par des sources de l'antiquité Tobna a été mentionnée pour la première fois par les sources de l'antiquité sous la dénomination de Thubunae. Pline l'Ancien (23 av JC) dans son livre "Histoire naturelle" la désigne par Tuben oppidun qui signifie ville fortifiée. C'est son nom durant la période de l'occupation romaine et byzantine. Après la conquête islamique, cette appellation devient, par glissement phonétique, Tobna. Occupant une aire de 70 hectares, elle fut, selon certaines sources, la capitale du Zab qui s'étendait entre les monts des Zibans du côté de l'actuelle Biskra jusqu'aux massifs des Aurès, du 8ème siècle à la fondation de la ville M'sila vers 1017 par la dynastie Hammadite qui avait annexé Tobna à ses territoires. L'historien Abou Oubeïd El Bakri (1014-1094) rapporte dans son ouvrage "El Maghreb" que Tobna fut conquise à la fin du 1er siècle de l'hégire par Moussa Ibn Noussayr. Il relève que la ville fut reconstruite en l'an 154 de l'hégire, suite à une vague de troubles qui l'avait ravagés, par Omar ibn Hafs El Mouhalabi, gouverneur sous le califat Abbasside. Ce même Omar avait renforcé les fortifications par la construction d'un mur tout autour, selon El Bakri. Le service patrimoine de la direction de la culture assure que le site de Tobna, sous terre, renferme des ruines romaines et islamiques dont un "merveilleux" palais de la dynastie Ziride. Délimiter le site et stopper sa dégradation La délimitation des contours de la ville et l'engagement de mesures d'urgence pour stopper sa dégradation constituent des "impératifs", estime le directeur de la culture, Omar Kebbour, qui souligne que la première phase de l'étude sur le site a été terminée en 2012 et sera suivie "prochainement" par la seconde phase qui permettra de mieux connaître "le contenu" du site dont la partie apparente n'en rend nullement compte. La direction de la culture a, entre-temps, agi et convenu avec l'Office national de gestion et d'exploitation des biens culturels protégés (OGEBC) d'affecter 4 à 5 gardiens pour surveiller le site et signaler d'éventuelles extensions urbaines ou tentatives de pillage, assure M. Kebbour. La réalisation d'une clôture ne peut être actuellement envisagée faute de délimitation du site, a ajouté le directeur de la culture qui a fait état d'un projet de fouilles à soumettre "avant fin 2016" au ministère de la Culture. Le projet, proposé aux deux archéologues Fellah Mohamed Mostefa et Mahfoudh Ferroukhi et leurs équipes qui ont réalisé un travail similaire à Tahouda (Biskra), pourrait être mis en £uvre début 2017, ajoute ce responsable. Ces fouilles seront longues et les découvertes lorsqu'elles sont effectuées seront présentées au public lors de rencontres et feront l'objet de publications, a indiqué M. Kebbour qui a insisté sur l'implication de l'Institut d'archéologie de l'université et de ses étudiants à ce projet. Tobna, une page radieuse de l'histoire et du patrimoine national Pour nombreux, le "malheur" du site historique de Tobna est liée à sa situation géographique, à 5 km au Sud de la commune de Bitam et à 4 km au Nord de Barika à l'Est de la RN n°70 reliant Barika et M'doukal. Plusieurs mesures ont été prises pour empêcher toute atteinte au site et certaines affaires ont été même renvoyées devant la justice, assure le président de l'APC de Barika Saker Berri. Des voix d'intellectuels, de moudjahidine et d'associations n'ont pas cessé de s'élever, ces dernières années, pour dénoncer les agressions subies par le site de Tobna, conduisant à la suspension de certains projets de logements après l'exhumation de vestiges. Depuis trois années, l'Office national de gestion et d'exploitation des biens culturels protégés et le Centre national de recherches en archéologie ont dépêché des commissions qui avaient ordonné l'arrêt des travaux d'un projet de logements promotionnels aidés, engagé sur un terrain renfermant des ruines romaines. Le mouvement associatif s'est également impliqué dans cet effort de préservation de cette cité archéologique. C'est le cas de l'association Tawassol pour la culture et l'information de Barika qui vient d'organiser un séminaire sur "Tobna, entre passé prestigieux et présent enfoui". La rencontre a donné lieu, selon Ferhat Berrani, président de l'association, à l'organisation d'une campagne qui "a eu bon écho" de récupération des vestiges de l'antique Tobna détenues par des particuliers. "Tobna n'est pas des pierres anciennes mais une page radieuse de l'histoire et du patrimoine de l'Algérie", affirme le jeune Ferhat Berrani qui, paraphrasant l'historien algérien Zouhir Ezzahiri lors de son intervention au premier colloque sur Tobna en 1988, assure que "Tobna est la mère de Kairouan et la s£ur de Tihert".