Le Président de la Cour des Comptes Abdelkader Benmarouf a appelé lundi à Alger les administrations et les institutions publiques à s'intégrer dans un nouveau modèle de gestion, orienté vers les résultats, en remplacement du modèle actuel qui a montré ses limites. Lors d'un séminaire sur "la nouvelle gestion publique" (NPG), M. Benmarouf a mis en exergue l'importance de cette nouvelle approche dans l'efficacité de l'action des administrations publiques notamment dans la gestion des finances publiques. "Le budget classique est un budget qui consacre des crédits et des moyens à l'administration sans savoir la valeur de ce qu'elle va faire (l'administration) avec ces moyens", a expliqué M. Benmarouf. Mais la NPG, poursuit M. Benmarouf, consiste à se demander: quels sont les objectifs recherchés par les administrations, est ce que ces objectifs sont réalisés et avec quels moyens? Une telle gestion permettra, selon la même source, une transformation des modes de contrôle de la Cour des Comptes, en tant qu'institution supérieure de contrôle, en évaluant les résultats réalisés par les différentes administrations et secteurs au lieu de se contenter du contrôle de régularité et des aspects financiers. Dans cette approche, "en plus du contrôle de régularité et du contrôle financier (par la Cour des Comptes), il s'agit de savoir si les fonds alloués à une administration ont permis d'atteindre les résultats attendus ou non", a-t-il dit. En effet, la NGP devrait permettre une meilleure gestion des ressources financières et une rationalisation des dépenses publiques, d'après M. Benmarouf. Des expériences pilotes ont été menées par les ministères de 'Agriculture, des Ressources en eau, de la Justice et celui de l'Intérieur avec des résultats "satisfaisants", selon lui. M. Benmarouf a rappelé, à cette occasion, les efforts de l'Etat pour moderniser son administration notamment la création d'un comité de réforme pour donner un renouveau souffle à la gestion publique orientée vers les objectifs de bonne gouvernance. La réflexion de ce comité a porté, entre autres, sur une modernisation accrue de la fonction publique, un meilleur accès aux méthodes et outils de la sphère privée, l'évaluation des politiques publiques et le rétablissement de la confiance entre l'Etat et les citoyens, selon ce responsable. Sur le plan des finances publiques, a poursuivi le Président de la Cour des Comptes, la réforme budgétaire a été édictée pour pallier un certain nombre d'insuffisances constatées comme l'absence d'un cadre de planification budgétaire pluriannuelle et la dualité du budget (fonctionnement et investissement). le facteur humain est important Cette réforme permettra aussi de pallier une gestion des dépenses centrée sur les moyens, un manque de lisibilité des documents budgétaires et des contrôles à posteriori sans grand impact sur l'amélioration de la gestion publique. De leur côté, les experts nationaux et étrangers présents à ce séminaire ont mis en lumière l'importance de cette approche dans un environnement qui ne cesse de changer. D'après eux, cette NPG permettra aux ministères, collectivités locales, institutions et autres administrations de mettre en place un système "plus efficace" au service du citoyen avec des coûts maîtrisés. Dans cette optique, l'expert en management Abdelhak Lamiri estime qu'un changement du mode de fonctionnement administratif est nécessaire notamment dans le contexte actuel marqué par une crise financière. D'après lui, il y a une forte volonté politique, exprimée au sommet de l'Exécutif, pour changer ce mode de fonctionnement qui entrave même les réformes économiques du pays. Une prise de conscience est également enregistrée chez les chefs d'entreprises qui considèrent que le mode actuel, caractérisé par la bureaucratie, est la première entrave à l'investissement et au développement économique en Algérie. Pour M. Lamiri, l'Algérie doit s'inspirer du NGP pour faire évoluer son monde de fonctionnement administratif en l'adaptant au contexte algérien. Le plan de modernisation managériale nécessite, selon lui, une qualification humaine à travers un recyclage du personnel et une décentralisation partielle de la prise de décision. Le séminaire sur la NGP a été organisé dans le cadre du jumelage entre la Cour des Comptes et les institutions homologues de France et de Portugal, par le biais du programme d'appui à la mise en œuvre de l'accord d'association entre l'Algérie et l'Union européenne (P3A). D'une durée de 24 mois, ce jumelage porte sur le renforcement des capacités institutionnelles de la Cour des Comptes en matière de contrôle juridictionnel, d'exécution de la loi de finances et de la qualité de gestion. Il devrait permettre de renforcer le système national de contrôle des finances publiques, de contribuer au développement de la bonne gouvernance et d'améliorer la qualité des politiques publiques. Parmi les objectifs de ce jumelage "orienter le travail de la Cour des Comptes vers une appréciation de résultat plutôt que la vérification purement limitée à la régularité, c'est à dire de savoir si les dépenses ont été faites en accord avec la réglementation en vigueur", a souligné le nouvel ambassadeur, chef de la délégation de l'UE en Algérie, John O'Rourke.